Poète, romancier et artiste peintre d’origine haïtienne, Gabriel Osson est maintenant établi à Toronto. Très impliqué dans la francophonie torontoise, il est notamment président de l’Association des auteures et auteurs de l’Ontario français (AAOF) et anime l’émission radiophonique Franco Découvertes, à CHOQ FM. Retraité du ministère de l’Éducation de l’Ontario où il a œuvré pendant dix ans, il se consacre aujourd’hui à plein temps à l’écriture, donne des conférences sur le sujet et anime des ateliers d’écriture, pour jeunes et retraités. Pour Gabriel Osson, connaître l’histoire de son pays et de son peuple est primordial, qui que nous soyons.

En 2017, vous publiez un premier roman, Hubert, le restavèk (Éditions David), qui raconte la vie de ces enfants haïtiens qui sont exploités, forcés de « rester avec » des gens qui les contraignent à travailler dans des conditions insupportables. En racontant cette histoire, avez-vous essayé de réparer cette injustice sociale?
Mon premier but : je voulais surtout faire connaître le sort de ces enfants invisibles et sans voix. Conscientiser le monde entier au sort de ces enfants abandonnés à eux-mêmes sans défense et sans personne pour défendre leur cause. On leur vole littéralement leur enfance, et la société haïtienne qui perpétue ce phénomène reste muette et aveugle devant leurs problèmes.

Mon second : remettre toutes mes redevances d’auteur provenant de la vente de ce livre à un organisme d’aide aux restavèks afin d’aider ces enfants.

En janvier 2020, votre deuxième roman, Le jour se lèvera (Éditions David), attire l’attention du grand public au Canada. Quelle est sa genèse?
En 1964, treize jeunes du mouvement Jeune Haïti quittent Miami pour tenter de renverser le régime de François Duvalier. Lors de la commémoration du 50e anniversaire de l’exécution de deux d’entre eux sur la place publique, je me suis rappelé ma présence en ces lieux et c’est en remontant le cours de l’histoire que m’est venue l’idée du roman. Puis, je me suis rendu compte que l’histoire de ces jeunes et de Jeune Haïti était mal connue ou peu connue. Il n’en est pas fait mention dans aucun manuel scolaire récent et la génération actuelle n’a pas entendu parler d’eux ni de leurs faits d’armes. J’ai appris chemin faisant qu’il faut réhabiliter l’histoire avec un grand et un petit « h ». J’ai adoré, grâce à la liberté du roman, pouvoir laisser libre cours à mon imagination et donner une vie différente à ces jeunes héros venus mourir pour un idéal de liberté, surtout leur parcours dans le maquis dans les montagnes haïtiennes.

Vous avez choisi les chemins de la littérature pour parler de votre pays natal Haïti et évoquer son histoire complexe. Qu’en attendez-vous?
J’ai quitté Haïti assez jeune et un grand pan de son histoire, ancienne et récente, m’avait échappé. Après le séisme de 2010, j’ai cru bon de me retremper dans son histoire autant écrite que réelle en y retournant chaque année comme volontaire pour aider à former des enseignants au sein d’un petit groupe. L’écriture me permet de faire sortir Haïti du folklore et de présenter sa beauté tant à travers mes romans que dans ma poésie. La littérature récente d’Haïti est riche et variée, tant par ses auteurs qui viennent dans le pays que par ceux qui résident à l’étranger. J’essaie par mes écrits de lever un pan du voile de cette complexité. La littérature, c’est comme peler un oignon, chaque couche en révèle une autre plus belle, plus riche en saveur. Il faut de la patience et de la persévérance pour en découvrir le cœur.

Qu’est-ce qui vous enchante dans la culture francophone du Canada?
Sa diversité, sa résistance et sa force à traverser le temps et à s’enrichir au passage de mots, d’expressions qui lui est propres tout en gardant vivantes la langue et la culture francophone.

Photo : © Christine Bérubé

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