À la rédaction, il nous arrive de découvrir des petits trésors de lecture sur le tard. Ces livres, qui ont accumulé injustement la poussière au coin du lit, méritent de prendre leur revanche.

Avec les romans Saga et Malavita, ainsi qu’avec la coscénarisation du film De battre mon cœur s’est arrêté, Tonino Benacquista a prouvé qu’il avait suffisamment de souffle pour tenir en haleine son lecteur. Dans Nos gloires secrètes, celui qui allie habilement le noir, l’humour et l’intelligence semble contenir ce même souffle puissant, non pas distillé mais bien décuplé dans six longues nouvelles qui s’élèvent avec adresse.

Il y a d’abord le récit de cet homme, qui, à la suite d’un accident, endosse le rôle de meurtrier; il y a l’histoire de ce célèbre auteur de chansons qui rend la monnaie de sa pièce à un bum de son école primaire; il y a aussi un vieux parfumeur qui tombe sous le charme de sa nouvelle voisine et veut sentir son intimité; puis l’aventure de ce couple qui, chez un antiquaire, se questionne sur l’identité du soldat dont le portrait est affiché au mur; la nouvelle suivante narre le quotidien d’un enfant qui, pour une raison qu’on découvrira avec stupeur, s’emmure dans le silence ; et finalement, la grandiose nouvelle d’un milliardaire qui célèbre ses 50 ans en invitant cinquante invités, mais dont seul l’aboyeur — employé pour crier le nom des convives à mesure qu’ils passent la porte — se présentera… Six histoires comme autant de petites gloires que vivent silencieusement les protagonistes, six histoires qui ne sont glorieuses que pour celui qui a choisi d’en tirer les ficelles, à l’insu de tous.

Avec ses finales simples mais d’une redoutable efficacité, ainsi qu’avec son vocabulaire recherché et précis (avec des phrases du genre « Nous avons échangé, dans cette langue que tissent les vieux couples, des messages codés, indé-chiffrables, où les abréviations, soupirs, points de suspension révèlent souvenirs et anecdotes »), il n’est pas étonnant d’apprendre que ce recueil fut couronné du Grand Prix SGLD de la nouvelle et du Prix de la nouvelle de l’Académie française.

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