À la rédaction, il nous arrive de découvrir des petits trésors de lecture sur le tard. Ces livres, qui ont accumulé injustement la poussière au coin du lit, méritent de prendre leur revanche.
Ce roman graphique relate la relation de l’auteure avec sa mère en forant les strates de la mémoire pour débusquer et analyser les souvenirs les plus enfouis. Avec le concours de ses psychanalystes, elle rejoue les moments cruciaux de l’enfance jusqu’à l’âge adulte au moyen de constants allers-retours entre les différentes époques du passé et du présent, pour entreprendre une traversée au cœur de la psyché. L’usage d’un dessin réaliste, entrecoupé de quelques passages plus oniriques, garde les scènes et le fil du récit très vivants. Le personnage de la mère est à la fois sujet et critique puisqu’il intervient constamment dans le processus de création, Bechdel ayant besoin de son approbation tout en souhaitant s’en affranchir.
Dans sa recherche, où il sera aussi question de son rapport à elle-même et de celui avec ses amoureuses, elle aura souvent recours à Donald Winnicott, pédopsychiatre dont les travaux eurent un apport important dans le domaine de la petite enfance, pour extrapoler ses moments charnières. Elle convoquera aussi les figures de Virginia Woolf et de l’essayiste féministe Adrienne Rich, entremêlant théorie, réalité et fiction avec un humour certain et une surprenante habileté.