Victor-Lévy Beaulieu

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Voilà plus de quinze ans que les Éditions Trois-Pistoles persistent et signent. Bien ancrée dans la ville qui lui a prêté son nom, avec à sa barre une figure majeure de la littérature québécoise, Victor-Lévy Beaulieu, la maison est aujourd'hui l'une des plus importantes de l'Est du Québec.

C’est une évidence: l’activité éditoriale de Victor-Lévy Beaulieu prolonge le projet de «littérature nationale», porté notamment par son œuvre monumentale. L’écrivain, autant que l’éditeur en lui, agit effectivement dans l’objectif de cette littérature, qui se démarque par l’utilisation d’une langue propre au peuple québécois et d’un choix d’auteur qui permet la création d’ouvrages moins urbains et davantage axés sur le terroir. Ainsi, autant par la forme que par le fond, c’est un caractère national qui s’affirme aux Éditions Trois-Pistoles. Et cette volonté, soulignons-le, est animée par le souci de voir éclore une diversité éditoriale au Québec: «Quand j’ai créé les Éditions Trois-Pistoles, je savais qu’il se trouvait beaucoup de bons auteurs en région qui n’avaient pas de lieu d’accueil», explique l’auteur de Bibi, qui mentionne au passage les contributions significatives sur les plans culturel et économique qu’une maison d’édition bien active peut apporter à sa communauté.

Tant que VLB sera actif dans le milieu du livre, le patrimoine littéraire n’aura pas à s’inquiéter de sa sauvegarde. En effet, grâce à sa collection «Contes, légendes et récits du Québec et d’ailleurs», cet éditeur préserve les récits qui sont à la base même de la francophonie de notre continent. Tous conviendront qu’il s’agit là d’un louable coup de pouce à notre mémoire collective. De plus, James Joyce, l’Irlande, le Québec et les mots, la série «Passion Maisons» ainsi que la publication des œuvres complètes du poète Renaud Longchamps s’inscrivent dans son projet de «littérature nationale», tout en rendant hommage à notre patrimoine.

À la base de tout choix éditorial, l’instinct prime. Avant d’opter pour un auteur, deux éléments guident VLB: «Dans le cas des écrits théoriques ou historiques, si j’y apprends quelque chose, je trouve important que d’autres l’apprennent. Pour ce qui est du roman ou de la poésie, je me pose la question à savoir s’il s’agit d’un écrivain porteur d’une grande œuvre. Ça ne m’intéresse pas de publier l’auteur d’un seul livre», avoue-t-il, affirmant mettre le temps qu’il faut afin de rendre efficace un manuscrit auquel il croit.

Bien que l’air salin inspire le scénariste de L’héritage, il n’y a pas que des avantages à travailler aux abords du fleuve. Ainsi, si on lui demande quelles contraintes fondamentales rencontrent les éditeurs en région, Victor-Lévy Beaulieu nous répond sans ambages que les dépenses en frais de poste et en transport peuvent s’avérer très élevées: «Cela doit faire de nous les meilleurs clients du bureau de poste des Trois-Pistoles!», s’exclame-t-il, toujours aussi mutin.

Mais l’auteur de Monsieur Voltaire déplore surtout la difficulté, autant pour les éditeurs que pour leurs auteurs, d’établir des contacts significatifs avec ce qu’il appelle «l’institution littéraire». Ce qui expliquerait, outre une certaine indifférence montréalaise pour ce qui est étiqueté « région », la visibilité moindre dans certains médias, à laquelle ont pourtant droit les éditeurs évoluant hors de la métropole: « Nous, on a publié 350 ouvrages, en littérature entre autres, et pas une seule fois un de nos auteurs n’a été mis en nomination pour un prix quelconque. »

Malgré tout, l’éditeur demeure convaincu qu’il est possible de pratiquer ce métier de manière aussi professionnelle en région qu’à Montréal. De plus, la qualité de vie y est meilleure, prend-il le soin de souligner.

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