Romane vit une période difficile : ses parents se séparent, sa meilleure amie est loin pour une partie de l’été, mais le pire, c’est que son ami a abusé d’elle. Dépassée par les événements, elle commence par banaliser la situation, puis elle accepte l’inacceptable : son ami en qui elle avait confiance l’a violée. Avec justesse, l’auteure Sophie Rondeau donne la voix à une victime d’agression sexuelle et aborde les répercussions d’un tel traumatisme et la quête pour se reconstruire.

Pourquoi avez-vous eu envie de parler de consentement et d’agressions sexuelles? Pourquoi vous semblait-il important d’écrire sur ce sujet?
Je ne connais pas les chiffres exacts, mais je sais qu’un fort pourcentage de jeunes filles et de femmes se verront malheureusement agresser au cours de leur vie. Je suis maintenant la maman d’une belle jeune fille de 12 ans et plus elle vieillit, plus j’y pense. C’est probablement le cas de tous les parents… Si elle se retrouve en mauvaise posture, je veux qu’elle soit capable de dire non, qu’elle soit à l’aise de se confier, à moi, ou à une autre personne. Il faut parler de ces choses-là, souvent, de toutes les manières possibles, afin que les victimes ne se sentent pas isolées, qu’elles se lèvent debout et que les éventuels agresseurs y pensent à deux fois avant de poser des gestes inacceptables. C’est loin d’être un sujet évident, mais se mettre la tête dans le sable ne réglera rien, c’est pourquoi j’ai décidé de l’aborder de front, sans détour.

Quels sont les principaux défis lorsqu’on écrit sur un sujet aussi délicat et traumatisant?
Il ne faut pas tomber dans les clichés qui sont, je crois, trop souvent véhiculés dans les œuvres de fiction destinées aux jeunes quand on parle d’agressions sexuelles. Il faut défaire les préjugés que les agressions se passent toujours de telle ou telle façon. Les agresseurs n’ont pas tous l’air du gros méchant loup, bien au contraire. Ce sont parfois des personnes qu’on aimait, en qui on avait confiance, ce qui est d’autant plus difficile à vivre. On se fait rarement violer dans le fond d’une ruelle mal éclairée… Et les victimes ne sont surtout pas des personnes faibles. Elles se voient peut-être de la sorte, mais j’aurais envie de leur crier qu’au contraire, ce sont des battantes. Romane, mon personnage, est l’une de celles-là.

Je n’ai rien pris à la légère. J’ai voulu que mon personnage soit plus vrai que vrai. J’ai pleuré plus d’une fois en écrivant ou réécrivant certains passages parce que je voulais m’immerger totalement dans cette histoire, vivre la douleur de Romane et ainsi mieux la rendre sur papier.

Qu’est-ce qui vous inspire dans l’adolescence?
J’ai toujours aimé les ados, leur ouverture d’esprit, leur franchise, leur grande lucidité malgré leur jeune âge, leur bonne humeur contagieuse, leur exubérance… Mais je sais aussi que ces adolescents vivent toutes sortes de montagnes russes hormonales, qu’ils sont dans une période de leur vie qui est forte en émotions. Ils sont en perpétuelle contradiction et cherchent des réponses aux questions qu’ils ne sont même pas capables de formuler parfois. Quand j’étais moi-même adolescente, les livres étaient mes meilleurs amis. J’étais rassurée en sachant que les personnages des romans que je lisais avaient des peurs qui ressemblaient aux miennes, qu’ils étaient aussi en guerre avec leurs parents ou n’osaient pas avouer leur amour à un garçon, pareil comme moi. C’est à mon tour de m’adresser aux jeunes d’aujourd’hui.

Photo : © François Couture

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