CONTENU PARTENAIRE  

De ses nombreux métiers – journaliste, écrivain, réalisateur – c’est celui de critique que Frédéric Beigbeder se plaît à exercer dans ces Confessions d’un hétérosexuel légèrement dépassé. Critique vis-à-vis de lui-même et de la société contemporaine, peu amène avec les trublions de son espèce. Il se dévoile dans un essai autobiographique où, derrière la dérision, pointent la mélancolie et la nostalgie d’un enfant plus très à l’aise dans son siècle.

Trois décennies après Mémoires d’un jeune homme dérangé où un alter ego fictif racontait sa vie échevelée, vos Confessions révèlent un Frédéric Beigbeder plein de sagesse. Livre de la maturité ou manifeste spirituel?
« Livre de la maturité » est une façon polie de me traiter de vieux con. C’est tout à fait ça, mais il y a autre chose dans ce petit traité : j’espère que c’est aussi une sorte de bilan d’existence. Les cinq parties racontent un homme de 50 ans passés à la recherche d’une structure qui lui manque. Il explore son désir, les paradis artificiels, Dieu, la guerre, le sexe… Toutes ces choses qui autrefois donnaient un sens à la vie des hommes. Il en fait un autoportrait de sa génération. C’est chouette la littérature, car elle me permet de parler de moi à la troisième personne comme Alain Delon.

Sage, mais en colère contre notre époque bien-pensante. « Hétérosexuel légèrement dépassé »… par quoi?
Par #MeToo, le wokisme, les attaques dont j’ai été victime jusqu’à mon domicile privé. J’ai fui Paris en 2017, mais on m’a rattrapé. Je devais répondre. Je ne suis pas l’homme que vous croyez que je suis. Fichez-moi la paix. En basque, cela se dit : « Emak Bakia ». Ce livre aurait pu s’intituler « Emak Bakia », mais c’est déjà le titre d’un film de Man Ray… tourné à Guéthary en 1924 (avec Jacques Rigaud dans le rôle du feu follet).

Vous racontez entre autres choses votre retraite dans un monastère augustinien (de retour du Festival de Cannes…). Une façon de fuir le monde ou de cesser de se fuir soi-même?
Je crois l’inverse. Ma retraite au monastère est la fin de la fuite. Cette partie du livre s’intitule « Le refuge ». Jésus est un gars très hospitalier, il lave les pieds de ses invités. Jamais personne ne lave les pieds des invités au Festival de Cannes. C’est bien là le problème de notre civilisation. Nous avons perdu le sens de l’accueil. « La grandeur déchue est plus grande que la grandeur » : faut-il se perdre pour (re)trouver la foi? C’est un essai autobiographique, très nostalgique et mélancolique. J’ai beaucoup aimé m’égarer durant toutes ces années. Je ne prétends nullement avoir trouvé la sagesse. Ces confessions m’ont aidé, mais à quoi servent-elles? Je l’ignore. Si vous cherchez un guide de savoir-vivre, lisez plutôt la baronne de Rothschild ou Léna Situations.

Photo : © David Vital-Durand / Albin Michel

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