La censure ailleurs dans le monde

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La censure ailleurs dans le monde

Nouvelle-Zélande :
10 000$
C’est la somme de l’amende à laquelle s’expose une librairie néo-zélandaise si elle vend le livre pour adolescent Into the River de Ted Dawe. Le roman, paru en 2012 et primé deux fois depuis, a été interdit de vente il y a quelques mois, à la suite de pressions d’un lobby conservateur qui reproche au roman son langage vulgaire, ses descriptions de scènes de sexe et de consommation de drogues. C’est la première fois depuis 1993 qu’un livre est ainsi censuré en Nouvelle-Zélande.

Japon :
Le plus récent titre de Tetsuya Tsutsui, Poison City – qui a remporté le prix du meilleur manga de l’année de l’ACBD –, critique ouvertement la censure qui sévit dans le milieu de la bande dessinée japonaise. L’auteur parle en connaissance de cause, car il est lui-même placé sur la liste noire du département de Nagasaki depuis 2013 pour sa série « Manhole », considérée par l’Agence pour l’enfance et l’avenir comme une « œuvre nocive pour les mineurs ». Étrangement, les ouvrages sont jugés par cet organisme d’un point de vue graphique uniquement.

Italie :
49
C’est le nombre de livres pour enfants que le maire de Venise, Luigi Brugnaro, a fait interdire dans les écoles de la ville. Sur cette liste, on retrouve des titres abordant l’homoparentalité, le handicap, le mélange des cultures… Ernest est malade de la collection « Ernest et Célestine » est également du nombre.

Russie :
Les librairies de Moscou ont retiré au printemps de leur inventaire Maus, le chef-d’œuvre d’Art Spiegelman, de peur de recevoir les représailles des autorités russes qui veillent à ce qu’aucun symbole nazi n’apparaisse en public. Pourtant, derrière la croix gammée qu’il arbore en couverture, le roman graphique de Spiegelman est un vibrant récit antifasciste.

Ukraine :
38
Voilà combien de livres russes sont actuellement interdits de circulation en Ukraine, pour des raisons d’« incitation à la haine et au séparatisme ». Les œuvres d’Edouard Limonov sont du lot.

Iran :
La poète et romancière iranienne Sepideh Jodeyri, qui avait publié déjà huit livres dans son pays natal, a eu la mauvaise surprise de constater au moment de faire paraître son dernier recueil de poésie qu’elle était devenue persona non grata. Les autorités locales n’ont en effet pas apprécié que l’écrivaine traduise en persan la bande dessinée française Le bleu est une couleur chaude de Julie Maroh, alors que l’homosexualité est interdite et réprimée dans le pays.

Arabie saoudite :
1 000
C’est le nombre de coups de fouet auquel le blogueur Raif Badawi a été condamné pour avoir écrit librement sur l’islam. Le jeune saoudien de 31 ans, dont la femme et les enfants sont maintenant réfugiés au Québec, doit également purger une peine de dix ans de prison. Les éditions Édito, en collaboration avec Amnistie internationale, ont publié cet été un recueil de ses textes interdits et jusqu’alors inaccessibles. Une partie des bénéfices de 1000 coups de fouet. Parce que j’ai osé parler librement est d’ailleurs versée à l’auteur pour assurer sa défense.

Chine :
16 115
C’est le nombre de livres étrangers que la Chine a traduits en 2012. Or, un grand nombre de ces ouvrages ont été modifiés avant d’arriver entre les mains des lecteurs chinois, parfois sans même que les auteurs soient prévenus. Paul Auster a par exemple découvert que son roman Sunset Park avait subi d’importantes coupures dans l’édition en mandarin. En revanche, certains écrivains acceptent tacitement d’être censurés pour être édités dans le pays le plus peuplé au monde. Ce consentement à la censure horripile le PEN qui invite entre autres, dans un récent rapport, à refuser catégoriquement les modifications qui altèrent la réalité historique. Quand on pense que J.K. Rowling a touché 2,4 millions d’euros avec la traduction de sa saga « Harry Potter », on comprend que l’attrait financier puisse inciter certains à fermer les yeux sur le processus d’élagage qui touche particulièrement les passages traitant du Tibet, de Taïwan, des événements de la place Tian’anmen, de l’homosexualité, etc.

États-Unis :
Saviez-vous que la série « Hunger Games » figurait dans le top 10 des livres les plus exposés à la censure aux États-Unis en 2011? L’American Library Association publie d’ailleurs chaque année un palmarès des ouvrages les plus persécutés dans les bibliothèques du pays. En 2014, la bande dessinée Persepolis de Marjane Satrapi arrivait en deuxième place, juste après le roman français Le premier qui pleure a perdu de Sherman Alexie. La censure populaire, liée à des demandes de particuliers ou de communautés, est loin d’être chose du passé aux États-Unis, Premier amendement ou pas.

Afrique du Sud :
Le romancier sud-africain André Brink, qui a souvent été présagé pour recevoir le prix Nobel de littérature, est décédé au mois de février dernier, laissant à la postérité une œuvre saluée, mais fortement censurée pour avoir véhiculé des idées antiapartheid. Brink fut d’ailleurs le premier écrivain sud-africain blanc à être frappé par la censure dans le pays avec son roman Au plus noir de la nuit, en 1973. L’œuvre qui lui a valu un prix Médicis (et qui fut adaptée au cinéma), Une saison blanche et sèche, est elle aussi interdite dans le pays.  

 

Crédit de l’image: Jacques Goldstyn

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