Les auteurs québécois sont nombreux et talentueux. ils participent à enraciner notre culture et notre langue, se font ambassadeurs à l’international des richesses de notre province, éveillent nos sens et nos émotions. En voici quatre qui méritent toute votre attention.

1. Félix Girard
Il avait tout juste 18 ans lors de sa première exposition. Plus de 15 ans plus tard, les projets se multiplient pour cet artiste peintre de Québec : une soixantaine d’étiquettes de bière réalisées pour la microbrasserie La Souche, des clients tels que Fred Pellerin, Parcs Canada et le ministère de l’Éducation et, bien entendu, plusieurs albums illustrés pour la jeunesse. Dans le plus récent, Le village dans la mer (Isatis), il signe également le texte de ce conte où Philibert, un villageois aux prises avec la montée des eaux qui envahit son village, demande au géant de l’île voisine de l’aider à déménager. Après avoir foulé plusieurs territoires, Philibert réalise que le meilleur endroit pour vivre restera toujours… auprès de ceux qu’il aime. Une histoire tout en douceur, qui, comme toutes ses peintures, mélange habilement onirisme et humanité. Récemment, on retrouvait les illustrations à l’acrylique de Félix Girard dans la biographie pour enfants Clément Ader : L’homme qui voulait voler, faisant la part belle à la persévérance de cet inventeur, pionnier de l’aviation. Il s’agissait de sa deuxième collaboration avec l’autrice Katia Canciani, avec qui il avait travaillé sur Pique la lune, une biographie d’un autre aviateur : Antoine de Saint-Exupéry.

2. Michel Rabagliati
Existe-t-il un bédéiste plus connu dans la province que Michel Rabagliati, l’auteur de la célèbre série Paul? On en doute, vu la multitude de prix qui le décore ainsi que le succès retentissant de ses ventes! Pour preuve, son récent Rose à l’île a été le livre le plus vendu lors de la dernière journée « Le 12 août, j’achète un livre québécois! », autant dans les librairies indépendantes de tout le Québec que sur leslibraires.ca. S’inscrivant dans la série des Paul, bien qu’il n’en porte pas le nom, ce roman graphique explore la relation père-fille de son alter ego et de Rose, en vacances dans le Bas-Saint-Laurent. Rabagliati délaisse ici la ligne claire et opte pour un look au graphite, encore plus intime et propice aux grands paysages, un nouvel esthétisme dont vous avez un aperçu en couverture de ce magazine. Avec sa série, l’auteur dessine le passage du temps, abordant avec tendresse et simplicité le quotidien d’un jeune homme qu’on découvre parfois jeune (Paul a un travail d’été, Paul au parc), parfois plus âgé (Paul à la pêche, Paul à la maison). Au fil des pages, on revit notamment la crise d’Octobre, ses études en graphisme, ses années de scout, sa dépression. On rappelle que le touchant Paul à Québec a été la première BD québécoise à être adaptée au cinéma et que l’auteur a été nommé chevalier de l’Ordre des arts et des lettres de France, en 2022. Si le 9e art québécois a obtenu ses lettres de noblesse, on peut dire que c’est un peu grâce à lui!

3. Gabrielle Filteau-Chiba
Son roman Encabanée, paru en 2018, largement insufflé par la vie de l’autrice, est le premier de ce qui sera un triptyque avec la publication de Sauvagines en 2019 et de Bivouac deux ans plus tard. On y fait la connaissance d’Anouk Baumstark, une femme ayant fait de la forêt son lieu de vie et qui en est devenue une ardente défenderesse. En 2022, elle publie La forêt barbelée, un recueil poétique qui, toujours en accord avec les thèmes de prédilection de l’écrivaine, exhume les beautés de la nature. La même année est éditée Sitka, une nouvelle mettant en scène les aventures d’une louve. En octobre dernier, avec Hexa — mot allemand signifiant « sorcière » —, l’autrice présente un nouveau cycle empreint de magie. Chaque année, Sandrine se rend dans le nord du Québec pour planter des arbres. Cette fois, elle y amène Thalie, sa fille, et tout un groupe de femmes les accueillera. Se profilent à travers les livres de l’écoféministe Gabrielle Filteau-Chiba, tous édités chez XYZ, un irrémédiable amour du territoire et la profonde conviction de sa sauvegarde et de sa protection.

4. Mélikah Abdelmoumen
En plus d’avoir participé à plusieurs collectifs de nouvelles au courant de sa carrière, Mélikah Abdelmoumen a notamment signé en 2018 Douze ans en France (VLB éditeur), où elle relate ses années sur le Vieux-Continent. Si les sources de ce livre sont issues de son expérience personnelle, elles servent surtout à relever l’état de terreur vécue par l’autrice et causée par l’ambiance d’un pays marqué par la violence et la xénophobie. Elle y raconte également son implication auprès des Roms d’un bidonville et de l’ostracisme d’un système qui les a pris pour cible. L’an dernier, elle publiait l’essai fascinant Baldwin, Styron et moi (Mémoire d’encrier), prenant l’exemple de l’amitié qui unissait les deux écrivains, l’un Noir, l’autre Blanc, pour ouvrir la conversation sur le sujet du racisme. Cette saison paraît Les engagements ordinaires (Atelier 10), par lequel l’autrice retrace les combats pour une société plus juste menés de mère en fille et à l’ombre des projecteurs. Avec cette publication, elle rappelle l’importance du militantisme « à la petite semaine » et réitère son serment de résistance contre toute forme d’oppression.

Illustrations : © Félix Girard / © Michel Rabagliati
Photo de Gabrielle Filteau-Chiba : © Audrée Wilhelmy
Photo de Mélikah Abdelmoumen : © Simon Dumas / Productions Rhizome

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