Question pour un libraire : Thomas Dupont-Buist, de la librairie Gallimard à Montréal

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J’aimerais entamer pour la première fois un recueil de poésie. Par contre, je n’aime pas ce qui est trop hermétique, ou trop lyrique. Que me conseillez-vous?

 - Isabelle, 38 ans

Chère Isabelle,

J’aimerais d’abord vous dire ce que j’aurais aimé que l’on me dise lorsque j’ai commencé à lire de la poésie. La lecture de vers (peu importe, finalement, que leurs pieds soient comptés ou que l’on préfère les laisser se trimballer en liberté) implique un état d’esprit particulier qui est celui de la contemplation, de la lenteur et de la rêverie. Il sera peut-être étrange de vous dire également qu’il ne s’agit pas de tout comprendre, mais bien de se laisser voyager sur le dos d’images improbables, de ressentir et de savourer l’agencement judicieux des sonorités. Prenez votre temps et vous trouverez dans la poésie bien autre chose que ce que peut vous procurer le roman ou l’essai. Et si je puis me permettre un dernier conseil; n’ayez pas trop peur de l’hermétisme, car, au demeurant, ce n’est qu’un mot pour désigner un secret que la persévérance aura tôt fait de percer.

Cela étant dit, voici quelques suggestions pour entrer en poésie sans douleur. Quoi de mieux qu’une anthologie pour découvrir ce qui nous plaît? Encore faut-il savoir en choisir une bonne. Bris de vers : les émeutiers du XXe siècle, de l’excellent éditeur Bruno Doucey, me semble toute désignée pour se frotter à ce qu’il s’est fait de meilleur au cours du siècle dernier. Regroupant en sections les différentes mouvances ayant marqué le siècle dernier, ce volume prend également la peine de contextualiser les poèmes présentés tout en offrant en écho des œuvres contemporaines qui créent un dialogue à travers le temps.

Seconde proposition, dans une veine plus intimiste : Birthday Letters de Ted Hughes (Gallimard). D’une beauté sans extravagance, ces lettres poétiques écrites chaque année pour garder vivante la mémoire de la défunte femme du poète (la non moins célèbre Sylvia Plath) surprennent par leur universalité. La chose est d’autant plus étonnante que ces missives adressées à une absence sont composées avec les perles d’un quotidien révolu. En vous souhaitant une exploration fructueuse.

 

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