Après six mois de fréquentation, la narratrice demande à Jérôme de choisir entre elle et les autres et il ne fait pas le choix qu’elle espérait. Elle tente donc de l’oublier en multipliant les conquêtes. Même si elle souhaite le remplacer, le souvenir de cet ancien copain se fait persistant. Dans L’après-Jérôme, l’auteure Mia Caron dépeint les aléas des rencontres et la quête d’une célibataire pour trouver l’amour (et se retrouver) après une peine de cœur.

Quelle a été l’étincelle qui vous a donné envie d’écrire ce roman?
Lorsque j’ai commencé à écrire L’après-Jérôme il y a cinq ans, je vivais une grande noirceur à la suite d’une peine de cœur. Comme ma narratrice, j’ai eu la fièvre de regagner ce sentiment perdu. S’en est suivi rencontre après rencontre sans jamais retrouver ma dose de départ. Vous seriez surpris et surprises de constater combien il y a de vérité dans les situations farfelues que je raconte. L’exploration de ce microcosme, et je m’inclus dans ce groupe, était fascinante. Ça me paraissait intéressant de la mettre en mots. Puis, plus j’extériorisais, plus je reconstituais mon parcours sentimental. J’ai finalement réalisé que j’accumulais plusieurs petites peines. C’était ça, en fait, ma grande noirceur. Ce roman m’a aidée à réfléchir et m’a permis de comprendre la bataille que je vivais avec moi-même.

Quels sont les principaux défis lorsqu’on écrit sur l’amour?
Ah l’amour… le sujet universel!

Chaque personne possède déjà en elle son lot d’histoires d’amour, qu’elles soient réelles ou fantasmées. On voudra toujours se faire parler d’amour. Certains et certaines préféreront l’explorer dans une saga historique, une romance torride ou un récit coup de poing. Moi, j’ai choisi la comédie. Il n’y a pas de recette secrète.

 

Le défi se trouve sûrement dans la petite sauce relevée ou aigre-douce qui nous permet de nous distinguer.


Tout comme dans Chasses amoureuses, la quête amoureuse et les rencontres semblent vous interpeller. En quoi ces thèmes vous inspirent-ils?

Dans le roman, on a accès aux coulisses des rencontres et aux différents stratagèmes que la narratrice s’impose pour se sevrer de l’homme qu’elle aime. Je me suis simplement inspirée de ce que je connaissais à l’époque. En observant autour de moi, je me suis vite rendu compte que je n’étais pas la seule à suivre cet itinéraire. D’autres personnes se reconnaîtront peut-être dans la détresse de la narratrice. C’est un peu pour ça qu’on écrit aussi, le partage des expériences humaines. Je continuerai certainement à explorer ces thèmes, j’aimerais même aller encore plus loin. Je me penche en ce moment sur le comment du pourquoi on en arrive à un tel désarroi. Je suis dans l’époussetage de ma bibliothèque interne.

Même si les sites et les applications de rencontres se multiplient et facilitent les rencontres, la narratrice trouve difficile d’établir une vraie intimité avec quelqu’un. Diriez-vous que bâtir une vraie relation soit peut-être plus difficile de nos jours?
Il y a assurément un changement dans les mœurs. J’aborde cette question plus en profondeur dans le dernier chapitre : comment la multiplication des rencontres finit par rendre l’intimité avec l’autre banale. On se consomme comme on a l’habitude de consommer au XXIe siècle, c’est-à-dire, très vite. On est habitué à avoir tout, tout de suite et ici (pour citer Ariane Moffatt). Il y a moins de place à l’erreur tellement l’offre est grande, entre autres sur les applications de rencontres. De plus, on a tendance à penser qu’être avec quelqu’un peut combler une tristesse ou un vide, ou encore, mener vers un certain succès véhiculé par la société. On cherche probablement trop ce but ultime d’être en couple. En revanche, pour en revenir à la question, si je me fie à la relation que je vis actuellement, je dirais que la réponse est non, ce n’est pas plus difficile qu’avant de bâtir une relation. Il suffit d’être patient envers soi-même. Savoir se prendre et prendre l’autre tel quel.

Malgré que la narratrice vit une peine d’amour et essaie de combler sa solitude, cette quête est racontée avec humour et légèreté. Était-ce important pour vous d’insuffler de l’humour dans cette histoire?
Oui, l’écriture humoristique m’est toujours venue naturellement. C’est un trait fort de ma personnalité, je suis très ricaneuse dans la vie de tous les jours. Peut-être est-ce pour cacher une certaine nervosité, peut-être est-ce une façon de rendre le quotidien plus joli? Comme je l’ai énoncé plus tôt, je vivais une période sombre à l’époque et ce texte m’a permis de la dédramatiser. L’écriture de ce roman lumineux m’a été salutaire. D’ailleurs, je reçois beaucoup de commentaires de lecteurs et de lectrices qui me disent que mon livre leur fait du bien en cette période de grisaille. Ça, ce n’est que du boni dans ma vie.

Croyez-vous que votre travail de relationniste de presse dans le milieu du livre teinte votre rapport à l’écriture? Est-ce que ce travail nourrit votre écriture?
C’est une bonne question. Comme je suis diplômée en communication écrite, je pense que mon style d’écriture est très influencé par mon domaine d’étude, notamment en ce qui concerne le rythme, la couleur et la concision des phrases. Mes dix ans de leçon de piano m’orientent aussi avec la sonorité des mots. J’entends tout ce que j’écris! Il se peut très bien que mon travail dans le milieu de l’édition ait stimulé cette soif de création qui sommeillait en moi. L’un n’empêche pas l’autre.

Photo : © Céline Chapdelaine

Publicité