Sylvie Roberge : La sorcière aux 1001 mots

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En traduisant les albums jeunesse et les mini romans des aventures de Winnie, cette sorcière plus loufoque que terrifiante, Sylvie Roberge, auteure ainsi que directrice littéraire et artistique chez Dominique et compagnie, prouve que sa magie à elle, c’est assurément de savoir faire danser les mots entre les images colorées.

Winnie, c’est ce personnage que plusieurs ont connu sous le nom de Pélagie il y a quelques années, puisqu’au Québec, c’est grâce à la traduction française qu’on l’a d’abord découverte. Mais depuis, les éditions Héritage ont racheté les droits et ont redonné à la sorcière britannique son nom d’origine. Et, il faut dire que même si elle change parfois de prénom, Winnie ne cesse de gagner en popularité puisque ses aventures sont traduites en plus de vingt langues, dans pas moins de soixante pays et qu’environ deux millions d’exemplaires ont été vendus!

Loin d’être un jeu d’enfant
Attention, qu’on ne se méprenne pas : la traduction d’œuvres dédiées à la jeunesse n’est pas plus simple que celle des livres adressés aux adultes. Peu importe le lectorat, en traduction, un mot anglais équivaut souvent à cinq mots en français, explique madame Robert. « En littérature jeunesse, on a cependant un espace restreint puisqu’il faut faire entrer le texte dans l’espace disponible sur la page, en tenant compte que l’illustration demeure la même ». S’il y a donc contrainte sur la longueur des textes, il en est de même pour celle des phrases. « De plus, le vocabulaire doit être assez simple. S’il y a des métaphores, elles doivent être suffisamment simples pour que les enfants comprennent. Je vais parfois chercher longtemps, même si le récit est court, pour trouver des analogies, des métaphores ou des images qui vont être drôles, des jeux de mots. Ça m’oblige donc à une certaine gymnastique! », ajoute celle qui a inventé un patois bien québécois pour Winnie avec son « Poil de Wapiti! »

Mais si l’illustration contraint parfois, elle est néanmoins un support important pour le texte. Sylvie Roberge témoigne de l’importance que l’illustration dévoile ce que le récit ne dit pas, qu’elle aille plus loin : « L’enfant passera plus de temps sur l’image lorsqu’elle est bien faite, parce qu’elle va lui apprendre des tas de choses qui vont le ramener vers le texte, puisqu’il voudra connaître la suite. C’est ce travail d’équipe entre auteur-illustrateur qui fait un travail réussi. »

Berceuse pour petits et grands
Mais traduire – écrire – pour les enfants, c’est également écrire pour les adultes : « Ce qui est intéressant, c’est qu’on peut avoir un double niveau de langage. L’adulte pourra ainsi ressentir la deuxième intention, et peut-être la faire ressentir à l’enfant. Un adulte qui éprouve des émotions en lisant un texte sera amené à engendrer la discussion avec l’enfant une fois le livre refermé. Quand j’écris, j’écris toujours à haute voix, parce que j’écris beaucoup pour les petits. Je m’assure qu’il y a une belle musicalité dans la phrase, un rythme qui fait que l’adulte qui lit va trouver ça facile à lire et que l’enfant qui écoute va être plus accroché. Je veux que l’histoire s’installe un peu comme une chanson. »

Sylvie Roberge ne déplore qu’une seule chose : qu’il n’y ait pas plus de livres québécois traduits dans d’autres langues! Et elle a raison : on a certes une belle relève qui mérite l’attention du monde entier!

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