Joseph Delaney : Premières heures d’un Épouvanteur

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L’écrivain britannique Joseph Delaney était de passage à Montréal dans le cadre d’une tournée de promotion entourant la sortie du film Le septième fils, inspiré de sa série « L’Épouvanteur ». L’auteur a accepté de discuter avec nous de sa saga, dont le onzième tome, Le pacte de Sliter, est paru au Québec cet hiver, mais également de ses sources d’inspiration, ainsi que du processus d’adaptation cinématographique qui s’est échelonné sur plusieurs années.

« L’Épouvanteur » raconte les aventures de Thomas « Tom » Ward, le septième fils d’un septième fils, qui – de ce fait – parvient à voir des choses invisibles aux yeux du commun des mortels. À l’âge de 12 ½ ans, il est placé en apprentissage chez John Gregory, un Épouvanteur qui chasse les différentes manifestations surnaturelles. Tranquillement, Tom apprend les rouages de ce métier particulier, en combattant des gobelins, des sorcières et, ultimement, le Diable lui-même. Alliant épouvante et fantastique, la série est extrêmement populaire auprès des adolescents.

Si le premier tome, paru en 2004, a connu un succès immédiat, l’ancien professeur d’anglais a essuyé plusieurs refus d’éditeurs au fil des ans avant de se voir finalement accorder une chance en 2001. On lui a alors donné un mois pour présenter une idée de roman fantastique. Heureusement, il a toujours tenu un journal d’idées et c’est dans celui-ci qu’il a puisé la matière première pour son histoire. « En 1983, je suis déménagé avec ma famille, et j’ai découvert que l’endroit où j’avais emménagé était hanté par un boggart. Pas la maison elle-même, mais l’église en haut de la colline. Le boggart renversait plusieurs pierres tombales, frappait à la porte de l’église et terrorisait les paroissiens. Éventuellement, le prêtre a dû le capturer et l’enfermer sous les marches du perron. » Ainsi, la légende locale de ce boggart – cet esprit farceur – a servi l’auteur dix-huit ans plus tard.

Outre la présence de boggarts, tirés du folklore britannique, Delaney s’est également inspiré des nombreux cas d’OVNI répertoriés aux États-Unis, particulièrement ceux où du bétail aurait été retrouvé déchiqueté. Ces évènements étranges lui ont inspiré son « gobelin éventreur » qui donne du fil à retordre à Tom dans La malédiction de l’Épouvanteur, le deuxième opus de la série. Comme nous pouvons le constater, les influences de l’auteur sont diverses. Il raconte qu’une idée mise en place dans le quatrième tome lui est venue d’une fillette qui lui a raconté une anecdote familiale lors d’une rencontre dans une école en Angleterre. Cette anecdote, d’ailleurs, illustre bien la relation qu’entretient l’écrivain avec ses fans!

Lorsqu’on lui demande s’il avait espéré ou anticipé le succès de sa série, Joseph Delaney avoue candidement : « J’étais seulement très, très heureux d’être publié! » Et si le contrat initial ne prévoyait qu’une trilogie, le romancier avait suffisamment d’idées pour se rendre à sept livres. On sait aujourd’hui que la série, une fois terminée, comptera treize tomes. Que les amateurs de Tom, de John Gregory et de la gentille sorcière Alice se rassurent, Delaney a commencé une trilogie qui se situe après l’action de « L’Épouvanteur ». On y suivra Tom, maintenant âgé de 17 ans, qui est officiellement un Épouvanteur, comme son maître.

Malgré l’ambiance très sombre de sa série, l’homme se considère comme un optimiste et il affirme, à propos du combat de Tom et de ses amis, « je crois qu’au final, nous vaincrons le mal… Malheureusement, de nombreuses personnes mourront. » Ce qu’il ne peut pas dire, ce sont justement ceux qui ne survivront pas à l’aventure, puisqu’il ignore lui-même comment se terminera l’histoire. Il préfère laisser les évènements survenir d’eux-mêmes durant l’écriture et voir où le tout va le mener.

Comme le premier tome de la série a été adapté au cinéma sous le titre Le septième fils, nous en avons profité pour discuter avec M. Delaney du processus d’adaptation. Si l’auteur était très enthousiaste lorsque les droits de son roman ont été achetés, il a vite déchanté devant la lenteur du processus. Comme il l’explique, « le processus fut très long. Je pense que la préproduction a duré cinq ans. Le film est passé par trois réalisateurs différents ». Il croit qu’une partie de l’essence du roman a été perdue dans cette longue procédure. « Parce que le film a été si long à faire, ils l’ont beaucoup changé. Ils ont rejeté beaucoup de mes dialogues. » C’est là son plus grand regret, car les dialogues sont ce qu’il a le plus travaillé dans ses romans, confie-t-il. Malgré tout, il considère que le film a été jugé trop sévèrement par les critiques et il demeure convaincu que les jeunes l’aimeront. Surtout, il espère que ceux-ci voudront ensuite lire les livres.

Oserez-vous plonger dans l’univers de « L’Épouvanteur » aux côtés de Tom, de John Gregory, d’Alice et de Grimalkin? Si oui, en sortirez-vous indemnes? Une chose est sûre, une fois votre lecture commencée, vous ne pourrez plus laisser la série avant d’avoir lu la dernière page du dernier tome. L’écriture de Delaney est aussi efficace sur le lecteur que la chaîne d’argent d’un Épouvanteur sur une sorcière. Vous voilà prévenus!

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