En 2011 est paru La chute de Sparte, roman pour adolescents signé par Biz, du groupe Loco Locass. Le livre a depuis fait son chemin, remportant au passage le Prix jeunesse des libraires du Québec et le Prix du livre jeunesse des Bibliothèques de Montréal, et connaît un fort succès auprès des jeunes. Le 1er juin 2018, c’est sur grand écran qu’on vous propose de découvrir cette histoire, celle d’un adolescent critique et instruit, qui raconte sa dernière année au secondaire…

« J’avais beau avoir lu toute la bibliothèque d’Alexandrie, j’étais démuni devant le réel », dit le narrateur, Steeve, 16 ans. Grand lecteur, il est par ailleurs un ado bien de son temps, cynique, critique, babouneux, amoureux. Afin de bien rendre son univers, les deux coscénaristes, Biz et Tristan Dubois, ont choisi de faire intervenir souvent la voix hors champ de Steeve. « Si dans le roman, on est comme dans le journal de bord de Steeve, dans le film, on se retrouve dans sa tête, toujours avec cette langue qui a une certaine exigence », nous explique Biz, joint au téléphone.

L’auteur affirme avoir eu un grand plaisir à scénariser le tout : « Tristan et moi sommes sur la même longueur d’onde, nous avons la même vision. On a voulu faire un film d’ados typique, un film avec la belle fille, le nerd, le gars de foot, etc. Mais avec quelques couches de plus. » Ces quelques couches en plus qui donnent corps et force au scénario, ce sont d’abord les références littéraires multiples, à Miron, Falardeau, Bourgault. « Au mieux, les ados les apprécieront, au pire, ils passeront tout droit. On ne voulait pas que ce soit un film codé pour les initiés. On a comme ambition de faire un film populaire, populaire dans le sens de “pour le peuple”. On voulait que le tout reste très digeste, goûte bon. Et sur le plan de la diversité, on souhaitait que le film représente la réalité du Québec et ça se reflète dans le casting [Lévi Doré, Karl Walcott, Lili-Ann de Francesco, Jonathan St-Armand]. » Autres couches ajoutées, celles d’un niveau mythologique et musical fort. Ainsi, la trame sonore est très présente et est à 100% québécoise, alors que les références à la mythologie sont nombreuses, surfant sur le thème imposé par le nom de l’équipe de football de l’école : les Spartiates. On découvre alors moult clins d’oeil à Hadès, Perséphone, Ménélas, autant dans le texte que dans certaines scènes guerrières.

Un vrai film pour ados, donc, avec le gentil garçon timide qui est amoureux de l’ex du quart-arrière de son école, mais avec une avalanche de questions ouvertes et de réflexions provenant des grands esprits de notre siècle et d’avant. Le résultat est à la hauteur de leurs désirs. Pas étonnant lorsqu’on apprend qu’ils y ont mis tout le paquet, engageant Étienne Boulay pour coordonner les scènes de football – lesquelles donnent par la bande de l’information sur les personnages et leur personnalité –, et ont fait affaire avec la meilleure équipe de cheerleading du Québec pour rendre les scènes impressionnantes et crédibles.

Entre le livre et le film
« Un film est un projet collectif. Ça part de ta tête, mais rapidement, ça tombe entre d’autres mains, qui en font d’autres choses, parfois pour le mieux. Le cinéma, ce n’est pas comme un roman. T’es 100% imputable comme auteur, alors qu’au cinéma, toute une équipe et plusieurs personnes viennent bonifier ton œuvre », explique Biz, avant d’ajouter qu’il est très satisfait et fier du résultat de son premier film.

S’il est risqué de mettre en images un roman et de le présenter au lectorat, Biz maintient que l’un et l’autre sont pour lui complémentaires. Il n’y a que quelques différences avec le roman : la trame temporelle est concentrée sur quelques mois plutôt qu’une année complète, il y a moins de personnages dans le film que dans le livre, certains noms et nationalités de personnage ont été changés, quelques petites différences se sont imposées dans le scénario. « Chaque lecteur est son propre réalisateur, fait son propre casting », explique-t-il, ajoutant qu’on se fait tous une image des personnages lorsqu’on les lit et que, invariablement, on sera surpris, indifférent ou déçu des choix faits pour le film. « Mais l’important, ce n’est pas que les personnages ressemblent physiquement à ceux que le lecteur s’est imaginé, mais qu’ils représentent l’esprit du personnage. » Et le film conserve ce côté revendicateur, authentique, littéraire qui en a fait le charme du roman, justement, parce que porté par des personnages forts.

Pour ceux qui ont lu le livre, vous vous souviendrez qu’on ne reste pas tout au long de la lecture dans un univers sans nuances et dans la simple histoire d’amour. Après tout, ce n’est pas pour rien que le roman, tout comme le film, porte le nom de La chute de Sparte

 

Photos : © Filmoption International

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