Alexandra Larochelle : La jeune fille à la plume

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La narratrice l’annonce d’emblée : Des papillons pis de la gravité est une histoire non pas à l’eau de rose, mais à l’eau de cactus. Voilà, nous savons à quoi nous en tenir. Ce que nous ne savions pas, par contre, c’est qu’Alexandra Larochelle – la même qui, de 11 à 15 ans, a publié une série fantastique de six tomes, dont plus de 100 000 exemplaires ont été vendus – possède au bout de sa plume une dose d’humour impressionnante et une habileté à décrire avec un ton mordant les émotions contradictoires d’une adolescente.

Elle a eu 22 ans cette année, vient de terminer un baccalauréat en communication profil publicitaire, a emménagé dans son tout premier appartement à Québec, a acquis sa première voiture, a été embauchée pour son premier « vrai » emploi et est en amour. Non, on ne parle pas de la narratrice, mais bien de l’auteure elle-même, pour qui 2015, où s’ajoute également la parution d’un roman, est clairement une grosse année!

Celle qui a derrière elle plusieurs entrevues données durant sa jeunesse (on parle de 200 participations, rien de moins!) en raison du succès de sa série « Au-delà de l’univers » est toute aise, volubile et posée pour nous parler de son nouveau roman. Un roman que personne n’attendait, pas même l’auteure : « Je ne pensais pas retourner à l’écriture de romans. Après le dernier tome, je voulais prendre un break. J’avais 14, 15 ans, et je voulais avoir la vie d’une fille de cet âge-là », explique-t-elle avant d’ajouter qu’elle a mis deux ans à écrire le tout. « Je l’écrivais à temps perdu, parce que je n’avais pas l’intention de le publier. »

Finalement, c’est chez Libre Expression que Des papillons pis de la gravité sera publié, et ce sont autant les adolescentes que les trentenaires qui pourront apprécier cette histoire d’une adolescente qui cherche l’amour (entre quelques frenchs avec un rouquin, un pompier et un albinos), qui le trouve contre toute attente au creux des bras de son meilleur ami avant que tout dérape, et qui doit assister au mariage de son père avec sa nouvelle flamme – Love-Mei, qu’elle déteste – dans un camping nudiste lors d’un rassemblement hippie. Le tout, affublé du nom de Frédégonde : « C’est ce qui arrive quand on a un père passionné d’histoire française et pas de mère pour calmer ses ardeurs historiques : on se retrouve avec un nom qui sonne un peu comme une gastro-entérite », lit-on au début du roman.

Mais Fred, de son surnom résolument plus contemporain, est attachante comme tout, puisque, de ses propos à ses contradictions, de ses actions à ses émotions, elle est tout en crédibilité et en authenticité. Et pour cause : l’auteure s’est inspirée d’elle-même, non pas concernant les aventures décrites, mais concernant les émotions ressenties, pour créer son histoire : « Avec ce livre, c’est plus une mise à nue que pour les autres. Pas parce que c’est autobiographique, mais parce que c’est personnel sur le plan du ressenti. Forcément, c’est assez inspiré des choses que j’ai vécues – première fois qu’on tombe amoureux, première peine d’amour. Mais aucun gars ne se reconnaîtra dans les personnages masculins. » Voilà donc pourquoi Larochelle évite les clichés, et ce, même concernant l’expérience du rassemblement hippie : oui, elle l’a vécu, mais un peu différemment, entre amis. Et comme Frédégonde, elle y a fait de belles rencontres.

Histoire de blogues
À la lecture de Des papillons pis de la gravité, on ne peut éviter de trouver des ressemblances avec certains romans comme la série « Le journal intime de Georgia Nicholson » ou encore avec le roman Cœur de slush (Hurtubise), de Sarah-Maude Beauchesne, paru sensiblement à la même date l’an dernier. « Je n’ai pas lu ce roman, mais je connais bien le blogue de l’auteure, ‘’Les fourchettes’’», explique celle qui avoue lire beaucoup de blogues, y trouvant entre leurs lignes l’inspiration et appréciant particulièrement leur ton et leur humour cru. Alexandra Larochelle note avoir particulièrement apprécié le style oral et poétique du roman de l’une des blogueuses de « Les populaires », Miléna Babin, dans Les fantômes fument en cachette (XYZ), et spécifie qu’elle tient bien haut dans son estime cette adresse Web. On ne s’étonne donc pas de découvrir que la jeune auteure tient elle aussi un blogue humoristique (il faut absolument aller y faire un tour pour se donner un avant-goût de Des papillons pis de la gravité) et on ne s’étonne pas non plus d’apprendre qu’elle souhaiterait partager son écriture mordante sous d’autres formes que le roman : « J’ai réalisé que j’aimerais vraiment écrire pour des humoristes ou des séries télé », explique celle qui, entre-temps, travaille déjà sur le deuxième – et probablement dernier – tome de sa nouvelle série.

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