Edouard Launet: Pas folichon… mais jouissif!

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Après Au fond du labo à gauche et Viande froide et cornichon, Edouard Launet nous présente un troisième opus de ses étonnantes chroniques scientifiques. Tout aussi drôles que les précédents, les courts textes rassemblés sous le titre évocateur de Sexe machin proposent un tour complet (et étourdissant) de la sexualité moderne.

Voici un livre qui traite de sexualité du début à la fin. Aphrodisiaques miracles, joujoux insoupçonnés, fantasmes inavouables, masturbation, fétichisme — tout y passe. Mais n’allez surtout pas croire que Sexe machin est une lecture émoustillante. Car si l’humour d’Edouard Launet titille notre intellect, notre corps, lui, reste froid devant les expériences et découvertes scientifiques déconcertantes que l’auteur nous dévoile.

Rien d’excitant, en effet, dans le fait que des pneumologues indiens aient trouvé un condom dans le poumon d’une patiente qui se plaignait de toux chronique et de fortes fièvres. Tout aussi peu affriolante est l’idée que 1000 personnes meurent chaque année aux États-Unis pour avoir tenté de décupler leur orgasme par l’asphyxie. Et comment fantasmer à l’idée de faire l’amour dans un scanner sous l’œil vigilant des chercheurs?

Non, Sexe machin n’a rien de folichon. Pourtant, sa lecture s’avère jouissive.

Manipuler avec soin
Journaliste culturel au quotidien Libération depuis maintenant dix ans, Edouard Launet a d’abord été ingénieur, puis journaliste scientifique. «Ma perspective sur la science a changé depuis que je suis dans le domaine culturel, remarque-t-il. Je me sentais un peu à l’étroit dans la position de vulgarisateur.» Désormais libéré du ton des publications scientifiques, Launet aborde désormais la
science comme un phénomène social vaste, déroutant, instructif — et hautement cocasse.

S’il adopte une perspective plus large, Edouard Launet se spécialise malgré tout au fil du temps. Dans Au fond du labo à gauche, il traitait de tous types de science et tous objets d’étude confondus; on y apprenait évidemment beaucoup de choses, notamment que les scientifiques prennent vraiment tout au sérieux. Dans Viande froide et cornichon, Launet répétait l’exercice en réduisant le champ de ses recherches à la science médico-légale:
«Mon éditeur, au Seuil, m’avait confié que ce sujet le faisait hurler de rire, alors je lui ai proposé de faire un livre juste là-dessus.» Mais si les cœurs solides peuvent se taper sur les cuisses en entendant le récit d’une mort sordide, les natures sensibles grincent plutôt des dents. «C’est un peu pour contrebalancer que j’ai écrit Sexe machin, précise Launet. Je me suis dit: après avoir parlé de la mort, parlons de la vie! Et la vie, ça commence avec la sexualité.»

Beaucoup moins tabou, le sexe occupe déjà une belle place au rayon de l’humour. «C’est un sujet moins délicat que celui des décès, explique Édouard Launet, qui avoue pourtant avoir trouvé «plus jubilatoire» l’écriture du cynique Viande froide et cornichon. L’auteur précise toutefois ne jamais se censurer: «À l’écrit, on peut parler de tout si on prend certaines précautions de langage, certains chemins de traverse — l’humour étant celui que je préfère.»

Humour sérieux
S’il n’hésite pas à rire des recherches loufoques, Edouard Launet se défend de chercher à discréditer la science:«J’ai plutôt de la sympathie pour les chercheurs. Je ne fais ni du prosélytisme ni du dénigrement. Je veux simplement montrer que la science est toujours passionnante — et souvent très drôle, même si les communications scientifiques sont absolument dénuées d’humour.»

C’est donc avec le plus grand sérieux que vous rigolerez tout en vous instruisant sur la sexualité de vos contemporains. Et pendant ce temps, Edouard Launet fignolera le quatrième tome de ses hilarantes chroniques scientifiques, qui portera sur nos amis les animaux.

Bibliographie :
Sexe machin, Edouard Launet, Seuil, coll. Science ouverte, 176 p., 22,95$

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