Guillaume Pelletier: Mélasse et autres idées noires

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Après avoir travaillé plusieurs années dans le milieu du dessin animé, Guillaume Pelletier fait le saut vers le neuvième art, un média qui lui sied beaucoup mieux avoue-t-il. « J’ai l’impression que mon imaginaire et ma façon de penser une histoire s’appliquent beaucoup mieux à la bande dessinée. Je pense que pour faire de l’animation, il faut que le mouvement soit au centre des préoccupations et, pour moi, le mouvement animé n’est pas nécessaire justement », confesse-t-il. Dans Mélasse, publié à la fin de l’automne chez L’Oie de Cravan, il laisse ainsi toute la place aux émotions brutes et aux délires qui naissent de son esprit, alors torturé par un visqueux chagrin d’amour.

« Le point de départ de Mélasse, c’est une rupture amoureuse qui a été assez difficile. L’écriture est devenue une façon de passer à travers. Ce n’est pas une solution magique, mais ça fait extrêmement du bien de purger tout ça », confie le Montréalais de 31 ans. Dans un élégant format à l’italienne, les planches – d’une ou deux cases tout au plus – entraînent le lecteur dans une noirceur qui vous colle à la peau, vous absorbe, jusqu’à la toute fin. Le dessin est en noir et blanc, vous l’aviez deviné, avec beaucoup plus de noir que de blanc.

Or, de ce recueil de petites histoires unies par une thématique assez sombre, émane également un vent de fraîcheur. C’est que l’auteur utilise une méthode de création inspirée de son passage à l’Académie des beaux-arts de Varsovie, qui diffère beaucoup de la façon de faire nord-américaine. « En Pologne, c’est une façon de penser qui est très introspective, très intuitive aussi. Quand j’ai commencé mes cours, mon professeur a rapidement compris que j’avais de la difficulté à laisser couler le flot créatif. J’avais tendance à penser un peu trop. Je fonctionnais de manière très rationnelle : j’écrivais un scénario que je peaufinais comme si j’allais avoir besoin de le partager à une équipe qui aurait besoin de le lire et de le comprendre et, une fois que le scénario complet était fini, je me mettais à dessiner. En fait, c’était la méthode que j’avais apprise en étudiant au Cégep du Vieux-Montréal », explique-t-il.

« Mélasse, c’est complètement différent, je l’ai écrit AVEC le dessin. Je n’avais jamais de scénario. J’avais une idée et je dessinais au lieu d’écrire la phrase avec des mots, sans même me demander où ça allait aller. C’est vraiment quelque chose que j’ai appris à Varsovie : me lancer dans quelque chose sans vraiment savoir où ça va aller et sans être critique de mon œuvre. » Les histoires ont donc un petit quelque chose « sans queue ni tête ». En fait, autant vous prévenir que l’absurde est au rendez-vous dans la première bande dessinée de Guillaume Pelletier, l’absurde et la spontanéité. Une mixture dense, mais qui ne manque pas de saveur.

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