Voter pour le livre!

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Chanceux que nous sommes, nous pouvons choisir notre crise préférée: celle de l'informatique, de l'immobilier, du crédit, des forêts... Moins chanceux, nous sommes seuls pour y faire face, car nos élus traitent la voracité des coupables comme un simple dommage collatéral du libéralisme. Heureusement, le livre compense, avec sa rigueur, sa saine délinquance, son indépendance. Grâce à lui, nous pouvons, au lieu de subir passivement la crise énergétique, identifier les ingrédients d'une politique. C'est la tâche des élus? Oui, mais ils la négligent. S'ils se réveillent, qu'ils lisent et qu'ils copient!

Qu’ils lisent l’argumentation étoffée de Bernard Saulnier et de Réal Reid: L’éolien au cœur de l’incontournable révolution énergétique. Même si, comme moi, ils glissent sur les équations spécialisées, ils se libéreront d’une brassée de préjugés. Non, l’éolien n’est pas inutilisable parce que variable. Oui, on peut rattacher sa production au réseau électrique sans causer de commotions. Oui, il est rentable. Non, il ne bouleverse pas le décor ni le sommeil. Oui, le gouvernement québécois se trompe en le confiant par miettes à l’entreprise privée. Oui, Hydro-Québec peut, en exploitant l’éolien du Moyen-Nord québécois, secouer l’emprise du pétrole autant que le Danemark, l’Espagne ou l’Allemagne. Nous avons là, disent les auteurs, cent fois plus d’énergie que dans toute la production d’électricité actuelle. Oui, l’éolien peut chauffer les maisons du Québec pour moins cher que des barrages du type de La Romaine. Voyez-vous émerger une politique?

Quand Gaétan Lafrance a osé écrire La boulimie énergétique: Suicide de l’humanité?, rien n’a changé. Quand il a récidivé avec Vivre après le pé­trole: Mission impossible?, le même honteux silence a persisté dans les hautes sphères de la démission politique.

Ces mois derniers, d’autres appels à la lucidité se sont ajoutés. En vain. Les pétrolières engrangent d’obscènes profits, le projet d’un terminus méthanier à Lévis recrute des endosseurs là où le bon sens exigerait des opposants, l’industrie automobile nord-américaine verse ses larmes de gigolo négligé. À Québec comme à Ottawa, on dorlote les amis, on enrichit les mauvais gestionnaires et on bouche les sorties de secours. Lisons encore!

Le chercheur Pierre Langlois démontre dans Rouler sans pétrole qu’on peut réduire les dévastations de l’automobile. En roulant moins et avec d’autres, mais aussi en répandant les voitures électriques ou hybrides. Oui, elles existent. Oui, les nouvelles batteries changent le poids des véhicules. Langlois l’affirme, Al Gore et James Bond seraient également satisfaits d’une voiture à moteurs-roues! Le physicien Normand Mousseau ajoute à cette thèse toute la pression souhaitable en rappelant que le pétrole et même le gaz sont en sursis dans deux ouvrages, Au bout du pétrole: Tout ce que vous devez savoir sur la crise énergétique et L’avenir du Québec passe par l’indépendance énergétique.

Si, à la suite du blitz publicitaire perpétré par les promoteurs de Rabaska, le citoyen moyen cherchait ses repères, l’ouvrage collectif Rabaska: Autopsie d’un projet insensé le guidera. Verdict sans appel: ce projet, inutile pour le Québec, ne comporte que des risques. Une autre lecture thérapeutique à prescrire aux élus.

Bernard Arcand n’est plus. Je souhaiterais qu’il vive dans les mémoires comme auteur des Lieux communs (avec Serge Bouchard), mais aussi comme dénonciateur de deux plaies: la pornographie et le racisme. Contre la première, Le jaguar et le tamanoir; contre la seconde, L’image de l’Amérindien dans les manuels scolaires du Québec (malheureusement épuisé).

Bibliographie :
L’éolien au cœur de l’incontournable révolution énergétique, Bernard Saulnier et Réal Reid, MultiMondes, 432 p., 39,95$
Au bout du pétrole: Tout ce que vous devez savoir sur la crise énergétique et L’avenir du Québec passe par l’indépendance énergétique, Normand Mousseau, MultiMondes, 156 p. et 188 p., 24,95$ ch.
Rouler sans pétrole, Pierre Langlois, MultiMondes, 312 p., 29,95$
La boulimie énergétique: Suicide de l’humanité? et Vivre après le pétrole: Mission impossible?, Gaétan Lafrance, MultiMondes, 272 p. et 468 p., 29,95$ et 39,95$
Rabaska: Autopsie d’un projet insensé, Gaston Cadrin et al., Fides, 272 p., 24,95$
Le jaguar et le tamanoir, Bernard Arcand, Boréal, 400 p., 29,95$

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