Vous aimez la vulgarisation scientifique? Vous allez être servis avec ces excellents livres!

Une certaine familiarité avec la science, ses lois, ses théories et ses méthodes est aujourd’hui une composante essentielle de la culture générale du citoyen. L’école aide à l’acquérir, mais les vulgarisateurs scientifiques jouent, eux aussi, un rôle pédagogique essentiel.

Je vous propose justement cette fois trois remarquables ouvrages de vulgarisation signés par deux journalistes et un universitaire.

Je vous les présente en vous montrant comment ils innovent pour mieux faire comprendre ce dont ils traitent.

Selye et le stress
Le journaliste Mathieu-Robert Sauvé nous propose une biographie du Dr Hans Selye (1907-1982). Deux fois docteur (en médecine et en chimie) et chercheur, il est universellement reconnu et célébré comme le découvreur du stress.

Dans Le stress d’une vie, Sauvé retrace son parcours et expose ses idées. On le suit depuis sa naissance à Vienne, son enfance en Hongrie, ses études à Prague. Puis c’est la venue à Montréal, les recherches et les publications sur le stress.

La matière, on le devine, est riche et abondante, parfois un peu complexe. Mais Sauvé, et c’est sa belle trouvaille, a eu l’idée de ponctuer son exposé de dix-neuf véritables scènes de théâtre qu’il a composées. Elles sont fidèles aux faits, mais font que vous devenez un peu spectateur d’épisodes de la vie de Selye. Cette manière de faire, très originale, est vraiment accrocheuse.

Voici un exemple.

Selye, homme ambitieux et compétitif, rêvait d’avoir le Nobel. Il ne l’a pas eu et, comble de malheur, c’est un de ses étudiants qui l’aura. Sauvé nous fait assister à cet épisode et grâce à ce procédé théâtral, on est là avec Selye à vivre ce moment douloureux avec lui.

Vous apprendrez beaucoup dans ce livre, qui vous tiendra en haleine, un peu comme un bon film.

Une idée, pour finir, qu’il m’a inspirée : et si un bâtiment de l’Université de Montréal portait (enfin) son nom?

Nos émotions
Michel Rochon, lui aussi remarquable journaliste scientifique, traite pour sa part de notre cerveau et des émotions « au temps des médias sociaux, du changement climatique, de la covid-19 et du terrorisme », comme le dit le sous-titre de son livre L’amour, la haine et le cerveau.

Le propos est très actuel : chacun devine combien les thèmes en question sont propices à susciter de vives émotions. Le livre est d’autant intéressant que l’auteur se reporte certes aux neurosciences, mais aussi à des philosophes, des psychologues et des anthropologues dont les vues ont parfois été confirmées par ces récentes découvertes.

Rochon, c’est sa belle trouvaille, a mis dans son ouvrage des histoires, des exemples concrets, et raconte même parfois des choses qui lui sont arrivées. Ce procédé, habile, suscite et maintient l’intérêt et prépare à recevoir l’exposé qui suivra.

Donnons un exemple : le chapitre sur la haine qui mène parfois à la violence et au terrorisme. Rochon l’amorce en rappelant sa rencontre, à Paris, avec le médecin urgentologue Patrick Pelloux. On est avec lui dans une ambulance filant à vive allure dans les rues de la capitale française. Dedans se trouve un homme poignardé qu’on espère sauver. Pelloux tenait une chronique dans Charlie Hebdo. Son travail fera qu’il ne pourra être présent à la fatale réunion du 7 janvier 2015 : des terroristes islamistes feront ce jour-là 12 morts et 11 blessés. Nous voici au cœur du sujet.

Le livre se referme sur un rappel bienvenu de notre salutaire capacité pour l’empathie, autre belle émotion, plus présente chez les femmes que chez les hommes, et sur l’importance d’enseigner les compétences émotionnelles.

Chaque chapitre de ce livre captivant se termine par des suggestions de lectures sur le thème abordé.

Extinction ou internationalisme
Chomsky (1928), éminent linguiste et philosophe, a lui aussi, à titre de militant anarcho-syndicaliste, accompli depuis plus de sept décennies un immense travail visant à faire comprendre ce que sont les institutions et les structures économiques, politiques et idéologiques dominantes de notre temps et à nous informer de leur fonctionnement. Il a lui aussi, sur tous ces sujets, accompli un remarquable travail de vulgarisateur.

C’est encore une fois le cas dans ce récent ouvrage, Danger d’extinction, dans lequel Chomsky, avec des sources crédibles, nous met en garde contre deux graves dangers qui nous menacent aujourd’hui d’extinction : le nucléaire et le réchauffement climatique.

Tous deux sont notre création. Les forces économiques et politiques qui ont permis qu’ils se déploient contribuent à nous empêcher d’y faire face comme nous le devons, notamment en privant les États de leur capacité d’agir comme il le faudrait. Stressant? En effet!

L’heure est pourtant gravissime, rappelle Chomsky. Notre salut, pense-t-il, passe par une prise de conscience citoyenne à l’échelle planétaire, en un mot par une forme d’internationalisme. Ce pourrait être là une des formes de l’empathie…

Ce qui fait depuis toujours de Chomsky un vulgarisateur exemplaire, c’est sa clarté et sa capacité à rendre compréhensibles des idées complexes, avec de nombreuses sources fiables à l’appui.

On retrouve dans ce livre bouleversant toutes ces qualités.

Publicité