Lors de la dernière année, un peu tout le monde a dû s’organiser pour se divertir en période de confinement. Évidemment, les chiffres sont là pour le confirmer : le livre vit présentement une espèce d’âge d’or. Je n’ai pas boudé mon plaisir, mais je dois avouer m’être aussi défoulé dans un autre univers connexe : le jeu! Je suis fan de jeux de société et, comme je suis monoparental et que je me retrouve seul une semaine sur deux, les jeux m’ont offert une superbe solution alternative solo pour affronter le confinement. En réfléchissant à ces deux mondes — celui de la littérature et celui des jeux —, on dénote un point commun : ces deux modes d’évasion nous font vivre une expérience, une histoire, un voyage…

J’ai découvert le jeu Terraforming Mars au printemps dernier. On y représente une corporation qui investit dans des contrats nous permettant de, lentement, terraformer Mars en haussant la température, l’oxygène et en créant des océans. En lisant les instructions, j’ai vite remarqué que les exemples mettaient en scène des joueurs nommés Kim, Stanley et Robinson. Kim Stanley Robinson, l’auteur de La trilogie martienne! Évidemment, dans les remerciements, je découvre que les auteurs du jeu se sont fortement inspirés de cette trilogie complexe et magnifique. Alors je ne fais ni une ni deux, et je saute dans l’aventure que ces romans me proposent, où j’ai vite fait d’y retrouver l’ambiance familière de mon jeu préféré. Mais je ne me suis pas arrêté là. J’ai lu sur Mars. Les livres Dernières nouvelles de Mars de Francis Rocard et Missions sur Mars d’Alessandro Mortarino, par exemple, m’ont vite permis de me mettre à jour sur les missions et les connaissances actuelles sur la mystérieuse planète rouge. Toutes ces découvertes grâce à un jeu! Combien de jeux découlent d’un livre? Il y en a beaucoup! On pourrait mentionner tous les jeux Harry Potter, les jeux basés sur l’univers de Tolkien, Herbert ou Lovecraft. Il y a même le jeu Les Piliers de la terre basé sur le livre de Ken Follett. Et j’en passe.

J’aime croire que le jeu est probablement l’ancêtre du livre. La première méthode utilisée par l’humain pour communiquer aux générations suivantes des règles, des leçons de vie, des morales, des histoires et même des divinations. En jouant, on apprend à mieux comprendre les règles utiles à la survie, à la vie en société, à la chasse, la guerre, la religion, peut-être même la mémoire d’un héros, d’un ancêtre, etc. Souvent, quelques lignes tracées à même le sol, quelques brindilles, cailloux ou coquillages suffisaient à réaliser un plateau de jeu pratique et même complexe. Si l’apparition de l’écriture vous intéresse dans l’histoire humaine (Histoire de l’écriture : De l’idéogramme au multimédia chez Flammarion est un livre génial), vous réalisez que diverses formes et reliefs apparaissent ici et là sur des supports comme des os, de l’argile ou des cailloux. C’est en voyant les fameux calculi dans le livre La Mésopotamie, dans la collection « Mondes anciens » chez Belin, ou les galets peints et gravés qui apparaissent dans Le beau livre de la préhistoire chez Dunod que je me suis fait la réflexion : et si c’était avant tout des pièces de jeux? Et si l’écriture, en parallèle avec les inventaires commerciaux, était apparue avec les jeux de société comme support? De plus, un jeu, par ses motifs, peut très bien être joué par des gens qui ne partagent pas la même langue. Ce qui permet une diffusion plus vaste de symboles et de signes distincts.

Alex Randolph (oui, celui dont la boutique ludique Randolph s’inspire) affirmait : « Un bon jeu doit être facile d’accès dès la première fois qu’on y joue… il doit pouvoir créer des situations inattendues ou des surprises… il doit avoir des buts suffisamment bien définis pour empêcher les questionnements et les arguments entre joueurs… il doit être infiniment rejouable. » Randolph affirmait aussi que pour mieux connaître un peuple, une civilisation, il fallait se demander à quoi ils jouent. Le jeu est aussi le premier support « dont vous êtes le héros ». Vos choix et décisions peuvent influencer le cours du jeu. Vous pouvez user de ruse, de logique pour arriver à vos fins. Récemment, Netflix a remis au goût du jour avec Le jeu de la dame (tiré du roman The Queen’s Gambit de Walter Tevis) un jeu dont les racines sont très anciennes et qui a traversé les frontières mondiales : les échecs. Un jeu à l’apparence si simple, mais dont les possibilités sont quasi infinies!

À notre époque, le jeu a maintenant un nouveau support : l’informatique. Le jeu vidéo est probablement l’une des industries les plus lucratives et diversifiées des dernières années. De Tetris (dont la genèse est racontée par Box Brown dans l’excellente bande dessinée Tetris aux éditions La Pastèque) à la filiale des Assassin’s Creed, le jeu a pris une forme aux variétés inimaginables, des plus simples au plus complexes, du 2D à la forme VR. Il y a des jeux pour tout le monde! Une petite bande dessinée où vous en appendrez davantage m’a beaucoup plu récemment, il s’agit des Mondes du jeu d’Edward Ross aux éditions Çà et là. L’auteur fait un magnifique survol de l’histoire du jeu en général, mais principalement de l’évolution du jeu vidéo.

Pour terminer, je souligne un livre dont j’ai fait l’acquisition il y a quelques années, mais qui n’est plus disponible aujourd’hui : Le tour du monde en 10 jeux d’Àngels Navarro, aux éditions Bayard Jeunesse. Ce livre qui incluait cinq plateaux de jeu imprimés recto verso nous faisait découvrir des jeux historiques et variés, selon les pays, et résume bien ce que j’explique plus haut. À un prix raisonnable, ce livre nous faisait visiter des nations, des époques, par le biais de jeux toujours aussi palpitants et indémodables. Mon souhait serait de voir cet ouvrage réédité : à mon avis, cette parution était une pure merveille. Voilà, les dés sont jetés.

Bref, je vous souhaite les plus beaux voyages à partir de la maison, que ça soit avec un livre ou un jeu, de plateau ou vidéo. Dans ces univers, tout est permis…

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