À chaque édition de la revue Les libraires, nous vous proposons une sélection de livres qui se glissent facilement dans votre poche. Petit prix et petit format, certes, mais de grandes découvertes et de belles plumes!

Buru Quartet (t. 1) : Le monde des hommes / Pramoedya Ananta Toer (trad. Dominique Vitalyos), Zulma, 528 p., 21,95$
Ce premier tome d’une tétralogie somptueuse nous amène à la rencontre de Minke qui, à travers sa propre histoire, nous raconte celle de la décolonisation indonésienne. L’action se déroule à la fin du XIXe siècle, alors que le pays est encore sous la férule hollandaise. Le jeune homme a la chance, malgré sa condition d’indigène, de fréquenter une bonne école. Bientôt, il fera la connaissance d’Annelies, une métisse née d’un père européen et d’une mère autochtone qui dirige maintenant les affaires de la ferme. L’union entre les deux est loin d’être approuvée, car les codes sociaux sont très rigides et on ne voit pas d’un bon œil les relations entre Blancs et indigènes. L’auteur de cette fresque l’a élaborée alors qu’il était tenu prisonnier au bagne. Il la racontait à ses compatriotes d’infortune avec qui il endurait la détention. À sa sortie, il jette tout sur papier, nous transmettant un incroyable plaidoyer pour la justice et l’égalité.

 

Le sympathisant / Viet Thanh Nguyen (trad. Clément Baude), 10/18, 550 p., 16,95$
Au cœur d’une période chaotique, à Saigon en 1975, dans un camp, un homme doit délivrer des laissez-passer à ceux qui pourront quitter le pays à bord des derniers avions. Mais cet homme est un agent double au service des communistes, qui, une fois arrivé à Los Angeles avec ses compatriotes, continue de camoufler sa véritable identité et écrit des lettres codées à son ami resté au pays. Fresque historique et politique, roman d’espionnage d’une grande puissance, cette œuvre interroge l’identité, la trahison, la culpabilité et les contradictions des êtres humains. Ce premier roman de Viet Thanh Nguyen a remporté plusieurs récompenses, dont le prix Pulitzer 2016.

 

Le couple d’à côté / Shari Lapena (trad. Valérie Le Plouhinec), Pocket, 350 p., 12,95$
Quand la gardienne se décommande, Anne et Marco décident de se rendre quand même au souper chez leurs voisins. Ils surveillent le bébé grâce au moniteur et passent le voir toutes les trente minutes. Mais quand ils entrent enfin plus tard dans la soirée, leur bébé a disparu. La vie du couple, au bonheur apparent, bascule, les plongeant en plein cauchemar. Que s’est-il passé? L’enquête sera complexe, au cœur des secrets, des faux-semblants, des apparences trompeuses et du bonheur factice. La Canadienne Shari Lapena signe un premier roman enlevant, un thriller aux péripéties rocambolesques. Le couple d’à côté remporte beaucoup de succès et sa traduction est en cours dans trente pays.

 

La terre qui les sépare / Hisham Matar (trad. Agnès Desarthe), Folio, 352 p., 14,95$
Récompensé du Pulitzer de la biographie en 2017, La terre qui les sépare de Hisham Matar raconte sa longue recherche pour retrouver son père qui a été enlevé et fait prisonnier en Libye parce qu’il s’était opposé aux mesures du dictateur Kadhafi. Lorsque le règne de celui-ci prend fin, les portes des prisons sont ouvertes, mais aucune trace de Jaballa Matar. Son fils, avec sa mère et sa femme, retournera au pays natal pour tenter d’apprendre la vérité, rencontrant de nombreuses personnes afin de les questionner sur la disparition. En parallèle à l’enquête, on découvre l’histoire de la Libye et des gens qui l’ont faite. Un puissant témoignage marqué par la sobriété, où violence, démesure, perte et souffrance se côtoient, et qui pourrait aussi se lire comme un hommage à l’être perdu.

 

Les maisons / Fanny Britt, Le Cheval d’août, 224 p., 13,95$
L’auteure jeunesse, essayiste et dramaturge Fanny Britt signe un premier roman émouvant qui nous habite longtemps, une œuvre dans laquelle son amour des dialogues et son sens du rythme transparaissent. Même si tout va bien dans sa vie, que ce soit dans sa carrière de courtière immobilière ou avec son mari et ses trois enfants, Tessa a l’impression que quelque chose lui échappe, que la vie n’a peut-être pas rempli toutes ses promesses. Alors qu’un amour du passé refait surface et lui donne rendez-vous, Tessa songe à la possibilité d’être infidèle. En attendant cette rencontre, elle explore son passé, ses désirs, ses doutes. On se reconnaît dans ce personnage complexe et touchant ainsi que dans cette réflexion intérieure sur ce qui forge une vie.

 

Nos richesses / Kaouther Adimi, Points, 192 p., 12,95$
Couronné du prix Renaudot des lycéens, ce roman s’avère une ode à la littérature. En 2017, Ryad, un étudiant parisien âgé de 20 ans, ne s’intéresse pas à la littérature, mais on le charge d’aller à Alger vider une librairie. C’est sous le regard du vieil Abdallah qu’il devra accomplir cette tâche plus compliquée qu’il n’y paraît. Ryad apprendra l’histoire de ce local. En 1935, Edmond Charlot ouvre une librairie à Alger pour mettre à l’honneur les jeunes écrivains. Sa librairie se nommera Les Vraies Richesses et il publiera le premier texte d’un inconnu : Albert Camus. À travers le récit de Ryad et celui du libraire et éditeur Edmond Charlot se révèle un pan de l’histoire de l’Algérie et de la France.

 

La symphonie du hasard (t. 1) / Douglas Kennedy (trad. Chloé Royer), Pocket,
416 p., 14,95$
À New York, Alice, une éditrice, plonge dans son passé et ses souvenirs d’enfance alors qu’elle lit un manuscrit commençant par « Toutes les familles sont des sociétés secrètes ». Cette phrase résonne en elle, surtout que son frère Adam, qu’elle a visité en prison, lui a révélé un secret de sa jeunesse. Dans ce premier tome, Alice, 17 ans, entre à l’université et prend une distance de sa famille qui semble toxique, gravitant autour d’une mère juive dépressive et un père catholique rigide et souvent absent. Éprise de liberté, Alice rêve de s’émanciper, tandis que l’Amérique des années 70 semble en ébullition. Dans cette trilogie, Douglas Kennedy dissèque les silences, les mensonges, les trahisons, les contradictions et les secrets qui peuvent exister au sein d’une famille.

 

Les passeurs de livres de Daraya : Une bibliothèque secrète en Syrie / Delphine Minoui, Points, 168 p., 12,95$
Spécialiste du Moyen-Orient, la journaliste du Figaro Delphine Minoui nous fait découvrir une bibliothèque secrète en Syrie, à Daraya. Des résistants au régime de Bachar al-Assad, une quarantaine de jeunes révolutionnaires syriens, ont exhumé des milliers d’ouvrages ensevelis sous les décombres et ils les ont rassemblés, créant une bibliothèque clandestine. Grâce à ce lieu de savoir et d’échanges, ils résistent; ils refusent la domination ; ils sont insoumis. Les livres leur permettent de s’évader, mais surtout de réfléchir autrement, de créer un rempart contre l’embrigadement et la pensée unique. Ce récit rend hommage aux idées, à la diversité et à la tolérance. C’est une ode à la liberté et au pouvoir de la littérature.

 
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