Geneviève Letarte: Tout bas très fort

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Discrète malgré sa démarche artistique singulière, Geneviève Letarte a publié au fil des vingt dernières années trois romans et un récit (Souvent la nuit tu te réveilles, L'Hexagone, 2002). Elle a aussi lancé, à titre de chanteuse, deux albums (Vous seriez un ange et Chansons d'un jour, D.A.M.E., 1990 et 2000), d'où ressortait toute l'originalité de sa poésie, parfois sombre, mais toujours en état d'observation de la « vie ordinaire ». Puis, enfin, elle livre cet automne Tout bas très fort, son premier recueil de poésie ; elle qui, pourtant, a participé à plusieurs événements où la verbalisation de cet art était à l'honneur. « Habituellement, j'écrivais de la poésie pour la dire, pour la scène avant tout, ou pour en faire des chansons ; et finalement, avec la sortie de Tout bas très fort, je suis maintenant contente qu'elle existe», confie-t-elle.

Ses poèmes (écrits sur une période de vingt ans), l’auteure devait réussir à les choisir et à les agencer sans que l’on y sente le fond de tiroir. Elle confirme travailler continuellement sur un texte, mais sa poésie, elle, a quelque chose de ponctuel :
« J’écris quand je marche, parfois quelques mots dans un carnet ; sinon, pour un spectacle ou un disque, ça arrive par soubresauts. La poésie et le roman, ce sont deux formes d’écriture qui se complètent. Je suis celle qui écrit comme celle qui voyage, qui fonctionne par flashs, par observations, à la cadence de la marche », souligne Letarte ; démarche se confirmant dans son poème au titre évocateur, Une fenêtre en mouvement.

Tout bas très fort lui a fait constater l’importance de son angoisse face au temps qui passe, sentiment mélancolique qui semble récurrent dans son œuvre. Admiratrice de Sylvia Platt et d’Anne Sexton (elle apprécie aussi Godin, Desbiens et Carole David), Geneviève Letarte affirme se sentir plusieurs affinités avec la poésie anglo-saxonne, plus narrative, plus concrète et à tendance sociale. L’auteure travaille présentement à un nouveau roman et un nouvel album, mais pour l’instant, il y a ce recueil teinté de la poésie de l’urgence : « C’est un pan de ma vie, ce livre rouge, ça me donne aussi confiance pour en écrire d’autres. » Et ce livre, il embrasse notamment la passion amoureuse nostalgique (Sushis et saké), la difficulté d’être femme aujourd’hui (Être une fille) et la résignation au quotidien (Vies brisées). Plusieurs lecteurs se reconnaîtront dans Tout bas très fort, parmi lesquels se retrouvent quelques bribes de ses chansons, qui démontrent l’intérêt de Geneviève Letarte pour l’Autre, dans lequel on aime se voir et à qui on aime qu’elle s’adresse comme dans Si je te dis (introduction de la chanson Dis-le-moi encore) : « Si je te dis qu’en toi je me vois, me diras-tu qu’en moi tu te vois ? ». Oui, tout bas…et très fort à la fois !

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