Le polar au Québec se porte bien; il est florissant. Ce n’est pas le choix qui manque pour plonger dans un roman policier ou une série mettant en vedette des personnages auxquels on s’attache et qu’on a envie de suivre d’une aventure à l’autre. Il y a notamment l’inspecteur Héroux de Guillaume Morrissette, l’enquêteur Daniel Duval de Jacques Côté, Alexandre Jobin, le retraité de l’armée canadienne et antiquaire d’André Jacques, le journaliste Joseph Laflamme d’Hervé Gagnon, la sergente-détective Sophie Comtois de Daniel Lessard ou la sergente-détective Judith Allison de Maureen Martineau. Pour ne nommer que ceux-là. En voici d’autres : dix écrivaines et écrivains à découvrir à travers les enquêtes et les personnages qu’ils inventent.
Photo : © Michel Paquet

Johanne Seymour
Scénariste et romancière, Johanne Seymour a fondé le festival international de littérature policière Les Printemps meurtriers de Knowlton, qui a eu lieu de 2012 à 2016. Son personnage, la lieutenante Kate McDougall, a vu le jour dans cinq aventures : Le cri du cerf, Eaux fortes, Le défilé des mirages, Vanités et Le cercle des pénitents (Libre Expression). Le cri du cerf a été adapté en minisérie télévisée sous le titre Séquelles. Dans les Cantons-de-l’Est, la sergente McDougall, une femme tourmentée, intense et touchante, mais souvent perçue comme asociale par ses collègues, trouve le cadavre d’une fillette sur la berge du lac devant chez elle. Puis, une autre fillette est retrouvée morte. Pour résoudre l’énigme de ce tueur en série, McDougall devra faire face à son douloureux passé et à sa fragilité. L’écrivaine a aussi imaginé un duo d’enquêteurs atypique : Rinzen Gyatso, une bouddhiste, et Luc Paradis, un athée tourmenté et insomniaque. On les retrouve dans Rinzen et l’homme perdu et Rinzen : La beauté intérieure et peut-être prochainement à la télévision puisque Johanne Seymour planche sur une adaptation télévisuelle mettant en scène ces personnages.

 

Photo : © Julien Faugère

Martin Michaud
Souvent qualifié de « maître du thriller québécois » et lauréat de plusieurs prix, dont Tenebris, Saint-Pacôme et Arthur-Ellis, Martin Michaud s’est lancé dans l’écriture après avoir fait carrière comme avocat d’affaires pendant vingt ans. Il a imaginé le personnage de Victor Lessard, enquêteur tourmenté, téméraire et instinctif, et celui de son acolyte Jacinthe Taillon, une collègue un peu bourrue, mais toujours loyale. Le célèbre duo, toujours complice, gravite dans six romans, dont le dernier, Jusqu’au dernier cri (Libre Expression), est paru cet automne et dans lequel les deux comparses recherchent un homme qui a assassiné trois personnes afin de pouvoir voler une valise pleine d’argent. Cette chasse à l’homme se déroule à un rythme effréné, comme toutes les aventures haletantes que signe l’auteur. Trois romans — Je me souviens, Violence à l’origine et Ghetto X — ont aussi fait l’objet d’une adaptation en série télévisée, intitulée Victor Lessard. En plus de participer à la scénarisation de la série, Martin Michaud a aussi écrit d’autres thrillers comme Quand j’étais Théodore Seaborn et Sous la surface.

 

Photo : © Cédric Trahan

Diane Vincent
Anthropologue de formation et auteure de romans policiers, Diane Vincent, maintenant retraitée de l’enseignement, a été professeure de sociolinguistique. Pour elle, « écrire un roman policier, c’est imaginer un affrontement entre au moins deux visions irréconciliables de la morale, de la justice, de la vie et de la mort, et faire en sorte que le lecteur y trouve un certain plaisir… », peut-on lire sur sa page Facebook. Dans ses romans, le sergent-détective Vincent Bastianello fait équipe avec la massothérapeute Josette Marchand pour élucider ses affaires. Ou plutôt cette dernière se retrouve toujours mêlée aux enquêtes d’une façon ou d’une autre et son aide s’avère précieuse pour le policier. Dans sa dernière aventure, la septième, le duo, qui forme maintenant un couple, essaie de résoudre le meurtre d’une jeune violoniste française, tuée lors de son passage à Montréal. Jeux d’été (Triptyque) aborde notamment les dérives que peuvent engendrer les mouvements d’extrême droite.

 

Photo : © Stéphane Chaput

Peter Kirby
Originaire d’Irlande, l’auteur et avocat montréalais Peter Kirby pratique le droit international en plus d’écrire des polars en anglais. Vague d’effroi est le premier titre avec l’inspecteur Luc Vanier, un personnage complexe, efficace et observateur, qui devait alors enquêter sur les meurtres d’itinérants à Montréal. Aux dires de l’écrivaine Kathy Reichs, c’est « une traversée saisissante des profondeurs sombres et brutales de Montréal ». L’auteur récidive avec son personnage de Vanier dans Les justiciers d’Hochelaga et La terre promise (traduits par Rachel Martinez chez Linda Leith Éditions). Dans cette troisième enquête, qui a remporté le prix Arthur-Ellis de Crime Writers of Canada dans sa version originale, une journaliste d’enquête d’origine guatémaltèque est kidnappée et son avocat est tué. Vanier essaie de comprendre les événements, ce qui l’entraînera dans les méandres du trafic humain et de la corruption.

 

Photo : © Tjerk Bartlema

Jean Lemieux
Passionné de voyage, médecin retraité et romancier, Jean Lemieux a écrit une série de polars qui mettent en scène l’enquêteur André Surprenant, meurtri par la disparition de son père quand il avait 9 ans. C’est un personnage passionné, sensible, indiscipliné, têtu et qui fait les choses à sa manière. On retrouve ce dernier dans On finit toujours par payer — qui a été adapté au cinéma —, Le mort du chemin des Arsène, L’homme du jeudi, Le mauvais côté des choses et Les clefs du silence. Plusieurs de ces intrigues se déroulent aux Îles-de-la-Madeleine, où Surprenant travaille. Il part ensuite pour Québec, puis pour Montréal où il sera sergent-détective aux crimes majeurs du SPVM. Dans le dernier titre, Les demoiselles de Havre-Aubert (Québec Amérique), l’intrigue navigue entre Montréal et les Îles, où il retourne pour des vacances. Comme la victime d’un meurtre est un prêteur sur gages de Montréal natif des Îles, Surprenant va donc enquêter sur lui pendant son séjour là-bas.

 

Photo : © Maxyme G. Delisle

Chrystine Brouillet
Maud Graham, personnage célèbre de la littérature policière et pionnière des polars québécois, existe depuis 1987. Elle apparaît discrètement pour la première fois dans Le poison dans l’eau, mais c’est avec Préférez-vous les icebergs? que l’aventure s’amorce réellement. Les lecteurs l’ont adoptée depuis, comme une amie. C’est d’ailleurs aussi comme ça que la voit sa créatrice Chrystine Brouillet. Avec plus de 800 000 exemplaires vendus des livres la mettant en vedette, cette série remporte un succès indéniable. Maud Graham a aussi été personnalisée au grand écran dans l’adaptation du Collectionneur. La gourmande et attachante Maud Graham, surnommée « Biscuit » par son protégé, Grégoire, est travailleuse sociale à ses heures, maternelle et adore la ville de Québec. D’ailleurs, l’ouvrage Sur la piste de Maud Graham : Promenades & gourmandises (Parfum d’encre) que Chrystine Brouillet a publié en collaboration avec Marie-Ève Sévigny permet d’en découvrir davantage sur ce fascinant personnage au grand cœur. Dans sa dernière investigation (Les cibles, Druide), la détective s’intéresse à deux affaires non résolues, un meurtre et une disparition datant de quelques années, qui la plongent dans les affres de la haine, de l’intolérance et de l’homophobie.

 

Photo : © Francine McNicoll

Richard Ste-Marie
Retraité de sa profession d’enseignant à l’École des arts visuels de l’Université Laval, artiste visuel et musicien, Richard Ste-Marie est aussi auteur de polars. C’est sous sa plume qu’est né le sergent-détective Francis Pagliaro, de la Sûreté du Québec, un personnage « particulièrement réussi » selon Michel Bélair dans Le Devoir : « […] on se retrouvera même parfois à rêver de rencontrer un jour dans l’actualité un policier aussi présent au monde et aussi intelligent. » Après Un ménage rouge, L’inaveu, Repentir(s) et Le blues des sacrifiés, ce policier philosophe et humaniste est de retour pour une cinquième aventure dans Stigmates (Alire). L’enquêteur s’intéresse cette fois à un prisonnier, condamné à perpétuité, qui a tenté de mettre fin à ses jours et qui s’automutile. Pagliaro plonge dans l’histoire de cet homme, qui a assassiné une mère et son fils il y a plus de vingt ans. Mais même s’il a plaidé coupable, l’enquêteur doute de sa culpabilité et revisite l’enquête, la reprenant du début, pour tenter de comprendre le comportement du détenu.

 

Photo : © Jean-François Bérubé

Louise Penny
Couronnés de nombreux prix, les romans de Louise Penny remportent beaucoup de succès. Ils se déroulent à Three Pines, un village fictif des Cantons-de-l’Est, région où l’écrivaine vit et puise son inspiration. On peut même découvrir son univers romanesque à travers des parcours touristiques. Sa série Armand Gamache enquête — qui comporte jusqu’à maintenant dix-sept titres — a été traduite en trente et une langues et vendue à neuf millions d’exemplaires dans le monde. Le premier roman de la série, Still Life, édité sous le titre En plein cœur au Québec, a fait l’objet d’une adaptation en long métrage. Son univers sera également adapté en série télévisée, intitulée Le village de Three Pines. Le tournage est en cours dans les Cantons-de-l’Est et à Montréal. Armand Gamache, chef des homicides à la Sûreté du Québec, un homme bon et droit, un personnage inspiré par son mari, qui était médecin, sera de retour dans La folie des foules (Flammarion Québec), une dix-septième aventure, qui paraîtra en novembre en français. Une conférencière attendue à l’université, aux discours controversés, sème la pagaille.

 

Photo : © Melany Bernier

Marie-Eve Bourassa
On lui doit notamment la trilogie Red Light, mettant en scène un enquêteur atypique, ancien policier, reclus, opiomane, infirme de guerre, Eugène Duchamp. Cette série envoûtante, campée dans l’atmosphère glauque et enfumée des années 1920, se déroule dans le quartier chaud de Montréal, celui des cabarets, des bordels, de la corruption et de l’alcool, où gravite une faune bigarrée. La romancière Marie-Eve Bourassa est aussi scénariste, ce qui transparaît dans son sens du rythme, ses dialogues forts et ses personnages authentiques, imparfaits, des écorchés auxquels on s’attache. « J’aime les personnages poqués, qu’on apprend à aimer à travers tous leurs tares et leurs défauts. Je n’aime pas vraiment les héros, je préfère m’attacher à ces personnages que je trouve plus humains », dévoilait-elle dans une entrevue accordée à La Presse en mai dernier lors de la parution de Tout écartillées (VLB éditeur), dans lequel elle renoue avec un personnage de paumé. Cette fois, dans les années 1970, un détective privé, ancien policier lui aussi, au tempérament plutôt nonchalant, tente de retrouver un film XXX qu’une barmaid veut récupérer. Marie-Eve Bourassa a entre autres remporté un prix Arthur-Ellis et un prix Saint-Pacôme et a aussi écrit pour un public adolescent avec la série Parasites (La Bagnole).

 

Photo : © Emixam Eduoh

Maxime Houde
Maxime Houde a commencé à écrire pendant ses études en traduction. Il a alors inventé le personnage de Stan Coveleski, qui exerce à Montréal dans les années 1940, que l’on a découvert dans La voix sur la montagne. Après la mort de sa femme, il tombe très bas : cynisme, alcool, dépression, etc. Puis, après avoir sombré, le policier déchu reprend du service comme détective privé. Après Le poids des illusions, L’infortune des bien nantis, La misère des laissés-pour-compte, entre autres, on le retrouve dans L’évaporée du Red Light (Alire), un huitième polar le mettant en scène. Cette fois, dans le monde interlope des années 1950, il tente de retrouver une cigarette girl qui a disparu. L’enquête va se complexifier quand il va comprendre que cette femme est plus importante qu’il n’y paraît. L’auteur a aussi écrit un roman noir, campé également dans l’effervescence des années 1940, qui rend hommage aux films noirs américains de cette époque. Un petit truand aux ambitions démesurées et aux incartades nombreuses se met dans le trouble en se retrouvant à la merci d’un malfrat dans La vie rêvée de Frank Bélair.

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