Pour aborder la guerre, on s’arme de livres !

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Le langage enfantin met en perspective la simplicité des événements les plus politiques, les plus engagés, les plus lourds, bref, les plus compliqués. Aborder la guerre avec des yeux d'enfants, c'est ne pas avoir peur des mots ni des gens. Pour un auteur, c'est aussi avoir l'objectivité de placer ses personnages dans le pays de l'occupant plutôt que dans celui de l'occupé ; l'enfance n'a pas de frontières.

Intimement liée à l’histoire, la guerre emprunte fréquemment le détour de l’imaginaire dans les livres pour enfants. Dans Zappe la guerre, par exemple, Pef présente la Première Guerre mondiale par le biais des soldats du Monument aux morts qui reviennent à la vie le temps de vérifier si leur décès a bel et bien servi à la paix. De son côté, Tsuchiya, dans l’album Fidèles éléphants, a voulu démontrer toute l’horreur du sujet, en offrant la perspective déstabilisante d’un animal qu’on affame jusqu’à la mort. Ce sont des ruses d’auteurs conscients qu’il faut dorénavant beaucoup plus que des images pour toucher le cœur des jeunes lecteurs ; il faut des mots percutants et des situations frappantes de réalisme.

Du côté des romans, la mise en scène de protagonistes de l’âge du lecteur créer une identification franche et immédiate. Ainsi, l’hostilité des enfants, qui se superpose à celle des adultes dans Secrets de guerre, démontre de façon très convaincante comment l’on en vient aux armes à partir de bagatelles. Du côté du recueil de textes Enfants en guerre, on utilise le fait vécu pour créer un sentiment d’empathie chez le lecteur, alors que dans La Route de Chlifa, c’est en installant le personnage principal dans un contexte connu des adolescents – l’école secondaire – et en dévoilant ses souvenirs que l’on présente la guerre.

Avant même d’aborder la guerre avec les jeunes, parlons-leur de tolérance ; tolérance envers les autres, envers les différences, tolérance en famille, à l’école, entre amis. Dans cette voie, l’éditeur qui remporte mon plus grand respect est Rue du monde dont la visée éditoriale consiste à offrir des livres pour « interroger et imaginer le monde ». Avec des titres comme Le Grand Livre contre le racisme ou Cour couleur (anthologie de poèmes contre le racisme), on peut longuement travailler le rapport aux autres cultures en classe. Et dans On vous écrit de la terre, recueil de lettres adressées par les enfants aux petites et grandes choses de la vie, on propose aux jeunes d’écrire à leur tour une lettre qui partira en orbite autour de la terre, à bord du satellite Kéo, pour ne revenir sur terre que dans 50 000 ans, gardant en mémoire la vie des enfants du 3e millénaire. Je soulignais que l’enfance n’a pas de frontière, j’oubliais cependant de spécifier qu’elle est aussi intemporelle, universelle.

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