Ils se font discrets dans les rayonnages jeunesse, mais les auteurs nippons traduits y sont pourtant présents, apportant leur lot de fraîcheur parmi les albums à mettre entre les mains des enfants.

L’observation : voilà la principale force des auteurs jeunesse japonais, selon Arthur Hubschmid, directeur général de l’édition à L’école des loisirs, qui a publié près d’une vingtaine de traductions provenant du Japon. Il nous apprenait ceci dans une vidéo datant de 2013 où il expliquait également que ce sens de l’observation peut s’entendre en opposition à la dramatisation basée sur la psychologie, laquelle est très forte dans la littérature occidentale. Hubschmid cite en exemple Kazuo Iwamura (dont on vous suggère Les 4 saisons de la famille Souris, ou tout autre livre de cette série magnifique!) : « Il se concentre sur les motifs matériels de ses protagonistes. C’est exactement la force des Japonais. Et c’est pour ça que je trouve intéressant de les importer chez nous, parce qu’ils changent de cadrage, changent de point de vue. Ils ne sont pas au même endroit que nos auteurs à nous ».

C’est avec la belle simplicité de ses histoires que Yuichi Kasano ravira quant à lui les enfants, avec des propositions de couleurs en aplat. Grand admirateur du travail de Béatrix Potter, cet artiste est diplômé de la Faculté d’agriculture de Tokyo : pas étonnant, donc, que plusieurs de ses livres abordent la vie agricole (Tous derrière le tracteur, Bonjour, les vaches!, Tu nous emmènes?, etc.).

Si ce sont les paysages qui vous intéressent, il faudra vous tourner vers Mitsumasa Anno, notamment avec l’épatant album Le Japon d’Anno. Illustrateur très populaire au Japon, lauréat de nombreux prix, dont le prix Andersen en 1984, il était également un passionné de mathématiques et a rendu hommage à cette discipline dans Dix petits amis déménagent, dans Comment la terre est devenue ronde et dans Jeux mathématiques.

Plus près de chez nous, on se tourne vers Le Lièvre de Mars, qui publie l’auteur Noboru Baba avec les titres Onze matous dans un sac et Onze matous et un cochon. Cet auteur, né en 1927, a officié en tant qu’aviateur lors de la Seconde Guerre mondiale, a vendu des pommes, enseigné la menuiserie et a notamment été mangaka, mais c’est avec son incursion du côté de la jeunesse qu’il connaîtra le succès. En effet, au Japon, le premier tome de cette série mettant en scène onze matous un peu voyous a atteint les trois millions d’exemplaires vendus et demeure un grand classique de la littérature jeunesse. Adaptée au cinéma, en dessin animé, en spectacle de marionnettes et en livre théâtral, cette série est devenue un réel phénomène au pays du Soleil levant! C’est que, voyez-vous, ces onze matous ont beau être coquins, ils sont réellement attachants!

Poursuivons dans l’imaginaire : on invite le lecteur à faire un tour du côté du monde loufoque de Shinsuke Yoshitake, notamment avec La librairie de tous les possibles, où un libraire propose des petites histoires pour répondre au désir de ses clients. Avec Youpi, je m’ennuie, C’est pas ma faute et C’est peut-être une pomme, Shinsuke Yoshitake est un peu le « Elise Gravel japonais », prenant le parti des enfants et de ce monde qui, pour eux, est aussi vaste que pour les adultes. Il s’amuse à créer des livres qu’on pourrait qualifier de conceptuels, utilise souvent les couleurs primaires et peu de fioritures. Vraiment, il est à découvrir!

Et pour terminer nos suggestions sur une note contemplative, on se tournera vers l’illustratrice Komako Sakaï, dont les albums Dans l’herbe et L’arbre à confiture sont à la fois un voyage au cœur de la nature et au cœur de l’enfance pleine de promesses et de découvertes, ainsi que vers Akiko Miyakoshi (Quand il fait nuit, Un goûter en forêt), dont les couleurs et la douceur des traits rappellent le travail de Geneviève Godbout et des frères Fan.

Comme il est impossible de circonscrire un genre à quelques caractéristiques communes sans laisser de côté les exceptions qui donnent sa beauté au paysage littéraire, nous vous proposons, tout simplement, d’aller feuilleter les ouvrages des auteurs mentionnés : la littérature est universelle une fois traduite, ça, c’est impossible à nier; et les agréables découvertes y sont assurées.

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