Shanghai: Prendre le thé avec Qiu Xiaolong

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Dans Le lotus bleu, Hergé nous présente un Shanghai rempli d’opium et de méchants Japonais, tandis que dans La condition humaine, Malraux nous dévoile une ville aux prises avec un soulèvement populaire. Le Shanghai de Qiu Xiaolong, lui, est dynamique, fascinant, et l’inspecteur Chen Cao doit composer avec ses traditions et ses contradictions.

À travers l’œil de cet écrivain chinois, Shanghai nous apparaît comme une cité grouillante et débordante de paradoxes où le passé côtoie le présent, comme en témoigne cet extrait de Mort d’une héroïne rouge : « Au nord de la rue Jingling, la rue du Yunnan était devenue une “rue des Gourmets” prospère, pleine de gargotes et de restaurants, mais au sud elle restait presque inchangée; vieilles maisons délabrées, datant des années quarante, avec des paniers, réchauds et points d’eau collectifs alignés sur le trottoir. »

Dans Visa pour Shanghai, nous découvrons également que la ville évolue autour du Bund, boulevard qui longe la rivière Huangpu : « Le Bund s’étirait le long du fleuve comme un foulard déroulé… À droite, le parc brillait comme une perle éclairant la nuit. » Dès les premières pages du roman, nous constatons l’attachement de l’inspecteur vis-à-vis de cette oasis urbaine : « Le parc du Bund restait son parc. La brise fraîche lui apporta la petite musique de la tour des Douanes. À l’époque de la Révolution culturelle, elle jouait un autre air,L’orient est rouge”»

Shanghai se modernise et la culture communiste laisse tranquillement sa place à la culture capitaliste : « Comme dans beaucoup de quartiers, des bataillons de petits vendeurs avaient transformé cette rue résidentielle en marché non officiel. L’étroite ruelle était bordée de petites cabanes, de présentoirs, d’étals, de brouettes chargées de marchandises et de boutiques… Quelques marchands s’étaient installés sous des auvents ou des parasols… Certains avaient étalé leurs marchandises sur un tapis à même le trottoir, faisant ressembler la rue à une vaste foire. »

Les grands restaurants d’allure occidentale côtoient les échoppes qui offrent des produits typiques : « Elle aperçut au coin un restaurant de type occidental. Leur café est délicieux, dit-il, mais on va au marché, derrière. Elle leva les yeux : une enseigne à l’entrée d’une étroite ruelle indiquaitMarché central. Des petits bars avec deux ou trois hauts tabourets, des marchands ambulants avec des comptoirs sur roues proposant telle ou telle spécialité, des restaurants microscopiques semblaient en pleine effervescence. Exactement l’endroit où Catherine Rohn avait envie d’être, un endroit bruyant et désordonné, en prise avec la réalité de la ville. Des poulpes, des tortues d’eau, des poissons vivants baignaient dans des bassines en bois ou en plastique. » Cet extrait, également tiré de Visa pour Shanghai, démontre que, si les Chinois ont une relation privilégiée avec la nourriture, les Shanghaïens ne font pas exception.

Finalement, Xiaolong nous invite à goûter un Shanghai meublé de maisons de thé, de shikumens, de parcs, de gens et d’histoire.

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