Mylène Paquette : Ces exploits qui ouvrent les horizons

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Comme Ulysse, le héros mythique, Mylène Paquette revient de l’autre côté de l’horizon avec un savoir nouveau. Si, grâce à Homère, nous avons découvert l’histoire fabuleuse de L’Odyssée, c’est également par le biais d’un récit que la jeune femme offre un témoignage fort, celui de son aventure, dans le livre Dépasser l’horizon,qui agit comme une véritable catharsis.

L’entreprise de la capitaine Mylène Paquette est une première, une odyssée impensable, l’apogée du parcours héroïque d’une jeune femme inspirée et volontaire : 4554 kilomètres parcourus et 129 jours passés seule, dans son bateau à rames, avec comme ultime objectif de traverser l’Atlantique par la route du nord. Au fil de son écriture précise et touchante dans Dépasser l’horizon, elle nous amène aux frontières de son rêve dans une réalité extrême qui défie l’imaginaire.

Le récit va bien au-delà de l’anecdote. Il remonte aux sources du défi, dans les méandresde l’émotion. Elle navigue aux marges de ses horizons intimes, sur un océan parallèle. Si cet exercice d’écriture n’est pas un simple compte-rendu, c’est un voyage en soi, une recréation originale d’un contexte aux multiples ramifications. Il s’agit d’une nouvelle traversée de la navigatrice, isolée pendant quarante-six jours, à louvoyer à travers ce qui devient une expérience poétique. Amené à bon port, l’objet-livre a le caractère d’un artéfact, comme son bateau, l’Hermel.

Par la qualité de son témoignage, Mylène Paquette inscrit son livre dans la lignée des récits des grands navigateurs-écrivains solitaires (Slocum, Moitessier, Colas, Autissier…) qui, non seulement nous amènent dans des lieux inaccessibles au commun des mortels, mais nous font participer à une démarche humaine authentique et généreuse qui amorce une réflexion éthique, soulignant les parallèles entre solitude et communion avec la nature.

Grâce à leurs multicoques à voile, les anciens marins polynésiens ont répandu leur culture sur l’immense Pacifique. À bord de leurs bateaux, il y avait toujours un « trouveur de chemin », qui tenait le cap vers une île minuscule, souvent à des milliers de kilomètres, perdue dans l’océan. Selon leur croyance, le bateau restait immobile, c’est la mer qui défilait sous la coque. Lors de ces traversées épiques, ce guide était sans repos, à l’affût du moindre signe aquatique et céleste. Héritier d’un don et d’un savoir ancestral, le « trouveur de chemin » devait faire sortir l’île de la mer, la faire émerger de l’autre côté de l’horizon. Et pour y arriver, il ne devait surtout pas cesser de l’imaginer…

À force d’imaginer l’Atlantique, Mylène Paquette en fait émerger une histoire surhumaine. Mais sa simplicité convaincante nous la rend familière. Elle semble avoir développé une force tranquille où certitudes et intuitions se conjuguent dans l’action. N’est-ce pas un autre exploit? Ses talents multiples élèvent toute son entreprise au-delà du record sportif, au faîte d’une actualité à l’affût de communication, de coopération, de quête de sens, de dépassement de soi, d’action créatrice, de conscience écologique, d’espoir en l’avenir et de liberté.

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