Dix essayistes de moins de 40 ans qui transforment le Québec d’aujourd’hui

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Une société se forme une idée à la fois. Les penseurs d’ici décortiquent leur environnement et cherchent à établir les fondements d’un monde meilleur. Pour souligner leur importance, Les libraires propose une liste de dix jeunes personnalités qui transforment le Québec à leur façon. Leur réflexion, souvent inspirante, continuera de nous inspirer pendant encore des décennies.

Anne-Marie Beaudoin-Bégin : la linguiste décomplexée
Le Québec a une relation tourmentée avec sa langue. Lire l’insolente linguiste – elle se qualifie elle-même ainsi! – permet de combattre cette sempiternelle insécurité linguistique qui nous tiraille tous à un moment ou l’autre. Dans La langue rapaillée. Combattre l’insécurité linguistique des Québécois (Somme toute), elle appelle à reconnaître la richesse du français québécois. On aime son regard rafraîchissant, son propos mordant, sa fronde assumée. Elle travaille actuellement sur un nouvel ouvrage, un retour attendu.

Frédéric Bérard : le défendeur du droit
Frédéric Bérard est un juriste reconnu pour ses réflexions approfondies et accessibles. Cela explique pourquoi on prend tant plaisir à l’entendre lors de ses nombreuses interventions publiques ou à le lire, et pourquoi ses étudiants – il enseigne le droit public à l’Université de Montréal – l’apprécient autant. Que ce soit dans La fin de l’État de droit? (XYZ) ou Droit à l’indépendance (XYZ), Bérard se bat contre toute forme d’injustice et appelle à respecter le droit et la démocratie. Comment ne pas être sensible à son appel?

Philippe Bernier Arcand : l’antipopuliste
Philippe Bernier Arcand a la mi-trentaine, est bardé de diplômes (sociologie, administration publique, sciences politiques, communication) et commente souvent l’actualité. En 2009, il signait Je vote moi non plus (Amérik Média), un essai qui expliquait en quoi les politiciens étaient responsables du cynisme ambiant. Quatre ans plus tard, il analysait la montée du populisme dans La dérive populiste (Poètes de brousse), avant de revisiter l’histoire du PQ (Le Parti québécois. D’un nationalisme à l’autre, Poètes de brousse). Observateur aiguisé de la société, Arcand réussit à déceler des tendances, à tisser une argumentation solide et à décrire son époque.

Mathieu Bock-Côté : le sociologue nationaliste
En quelques années, le sociologue Mathieu Bock-Côté est devenu une figure majeure du monde des idées québécoises. Parfois contesté, parfois adulé, il ne laisse personne indifférent. Avec sa verve légendaire, sa culture déroutante, ses tribunes nombreuses, il construit une pensée riche, toujours imagée, toujours précise. Souverainiste, conservateur, il se dit inspiré par les œuvres des philosophes français Raymond Aron et Alain Finkielkraut. Bock-Côté a déjà publié huit titres – certains à titre de collaborateur –, dont Fin de cycle (Boréal), Exercices politiques (VLB) et Le tour du jardin (Boréal), un entretien avec l’écrivain Jacques Godbout. Et dire qu’il a seulement la mi-trentaine…

Pierre-Luc Brisson : l’historien résistant
Il n’a pas la trentaine, s’exprime avec aplomb et est entièrement ancré dans la modernité. Pourtant, c’est à l’histoire ancienne que l’historien Pierre-Luc Brisson s’intéresse d’abord et avant tout (il a d’ailleurs une maîtrise en la matière). Il adore l’Antiquité et la richesse des connaissances des Anciens. À tel point qu’il milite pour qu’on s’en inspire davantage dans notre société actuelle. Le cimetière des humanités, passionnant essai paru aux éditions Poètes de brousse, abordait cette méconnaissance collective de notre héritage et appelait à refaire de l’école « un lieu d’élévation de l’esprit des futurs citoyens ». Il déplore que les « humanités » soient délaissées au profit de savoirs techniques plus « bénéfiques » pour les entreprises. À quand la réforme Brisson pour le système d’éducation? D’ici là, on attend impatiemment son prochain cri du cœur.

Aurélie Lanctôt : la féministe antiaustérité
Aurélie Lanctôt a 24 ans et elle assume entièrement sa posture féministe. Étudiante en droit et diplômée en communication, elle fait entendre ses idées sur un blogue de la plateforme web Ricochet, en plus de collaborer à la Gazette des femmes et à ICI Radio-Canada. Avec sa première publication, un crochet qui vise les politiques d’austérité du gouvernement Couillard, elle a fait parler d’elle. Les libéraux n’aiment pas les femmes critique les attaques aux droits et libertés des femmes, notamment en raison de coupes en éducation, dans les garderies ou en santé publique. On entendra encore sa voix, c’est certain, et on s’en portera probablement mieux.

Jonathan Livernois : le spécialiste des idées
L’érudit Jonathan Livernois a terminé son doctorat en littérature en 2010. Spécialiste de l’histoire intellectuelle et littéraire du Québec, il multiplie les façons de faire rayonner la pensée. Professeur à l’Université Laval, directeur littéraire chez Leméac, chroniqueur régulier à la revue Liberté, chercheur et collaborateur pour différentes revues, le jeune trentenaire trouve néanmoins le temps de publier à un rythme régulier. Après des collaborations avec l’éminent Yvan Lamonde (Papineau, Boréal), on retient notamment son essai Remettre à demain, un document d’exception qui entremêle histoire et littérature et qui s’intéresse au Québec comme lieu de projets inachevés.  

Gabriel Nadeau-Dubois : l’éloquent militant
On l’a connu alors que la sève étudiante coulait dans les rues du Québec pendant ce printemps historique de 2012. Visage de la mobilisation, il fut l’idole d’une tranche de la population, et il fut honni par les autres. Nul ne peut cependant nier son éloquence, sa rigueur, son engagement sincère. Tenir tête, paru en 2013 aux éditions Lux, le prouvait d’ailleurs. Avec cet ouvrage, qui a d’ailleurs remporté le prix du Gouverneur général (Essais), il analysait cette grève étudiante avec une sincérité désarmante et un besoin d’expliquer cette colère sourde qui peut trouver écho ailleurs que chez les étudiants. L’homme de 25 ans (!) a également dirigé un plaidoyer pour la gratuité scolaire (Libres d’apprendre, Écosociété).  

Simon Tremblay-Pépin : l’observateur argumenté
Doctorat en science politique en poche, Simon Tremblay-Pépin construit sa route en décryptant les failles de la société. En 2013, il frappait un grand coup avec Illusions (Lux), critique acerbe du milieu médiatique québécois. Chercheur à l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS), il a orchestré la publication du premier tome de « Dépossession : une histoire économique du Québec contemporain » (Lux), consacré aux ressources naturelles et au malaise profond laissé par leur gestion actuelle. Intervenant convaincu, il continuera certainement de s’imposer dans les débats sociaux.

Catherine Voyer-Léger : la blogueuse citoyenne
Depuis des années, Catherine Voyer-Léger tisse son fil sur le web. Sur son blogue ou sur les médias sociaux, la politologue de formation discute d’arts, de culture, de littérature. Elle observe la société et s’intéresse particulièrement aux médias et à la critique. Métier critique (Septentrion), essai accessible et nécessaire, plaide d’ailleurs pour un espace de pensée, de critique, où intellectuels et spécialistes occuperaient une place prédominante. En parallèle à ces réflexions sociales, Catherine Voyer-Léger explore également l’intime, notamment avec des ouvrages comme Détails ou dédales ou le récent Désordre et désirs (Hamac). 

 

Cinq autres noms que nous suivons…

Catherine Dussault Frenette (L’expression du désir au féminin dans quatre romans québécois contemporains, Nota bene et collaboratrice à Sexe, amour et pouvoir, Remue-ménage)

Ralph Elawani (Les marges détachables, Poètes de brousse)

Le duo Éric Martin et Maxime Ouellet (Université inc., Lux)

Simon-Pierre Savard-Tremblay (Le souverainisme de province, Boréal)

Paul St-Pierre Plamondon (Des jeunes et l’avenir du Québec, Les Malins et Les orphelins politiques, Boréal)

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