À l’époque où le Canada était sous le régime français, seuls les institutions religieuses ou des particuliers bien nantis possédaient une bibliothèque. Cette dernière était alors composée entièrement de livres provenant de France, puisqu’encore aucune impression ne se faisait au Canada (rappelons qu’il faudra attendre Fleury Mesplet, en 1776, afin de pouvoir dire qu’un véritable imprimeur exerçait son métier au Canada français).

Si aux États-Unis c’est à Boston, en 1658, qu’ouvriront les portes de la toute première bibliothèque publique, il faudra attendre 1779 pour qu’un tel établissement voie le jour au Canada francophone : la Bibliothèque de Québec. Cette bibliothèque fut longuement surnommée la « bibliothèque de Haldimand », en raison du nom de celui qui l’a mise sur pied, Frederick Haldimand, alors gouverneur en chef de la province de Québec. Son objectif, comme il l’écrivait dans une correspondance, était de « créer un meilleur accord de sentiments et une plus complète union d’intérêt entre les anciens et les nouveaux sujets de la Couronne ». Pour lui, la bibliothèque était ainsi un vecteur idéologique, qui permettait de doter le Québec d’une institution susceptible d’être instrumentalisée à des fins politiques

La Bibliothèque de Québec contenait alors notamment les œuvres en 40 volumes de Voltaire (pourtant alors soumis à la censure en France), de même que L’encyclopédie d’Alembert et de Diderot et les 23 volumes signés Jean-Jacques Rousseau. Deux ans après l’ouverture de la bibliothèque, son catalogue contenait 714 livres en anglais contre 1001 en français, ce qui confirmait la visée de départ d’Haldimand : démontrer aux Canadiens français les bienfaits de la Couronne britannique, en mettant à leur disposition des ouvrages écrits dans leur langue.

La première bibliothèque de Montréal fut quant à elle fondée en 1796 par des marchands, des politiciens et des hommes de loi, plutôt que par des instances politiques coloniales comme ce fut le cas pour la Bibliothèque de Québec.

 

L’information contenue dans cette capsule historique provient de l’épatant et complet ouvrage D’obscurantisme et de lumières : La bibliothèque publique au Québec des origines au 21e siècle, de François Séguin, aux éditions Hurtubise. Une lecture édifiante pour quiconque s’intéresse à la fois à l’histoire et au phénomène des bibliothèques publiques.

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