À chaque édition de la revue Les libraires, nous vous proposons une sélection de livres qui se glissent facilement dans votre poche. Petit prix et petit format, certes, mais de grandes découvertes et de belles plumes!

Fille, femme, autre
Bernardine Evaristo (trad. Françoise Adelstain), Pocket, 576 p., 15,95$
« Il est difficile de trouver les mots pour décrire une œuvre aussi magistrale que Fille, femme, autre. Les personnages sont spectaculaires, criants de vérité. Chacun mériterait un roman à lui seul. L’autrice britannique possède une plume unique, intelligente et sensible. Elle signe ici un livre qui doit être lu. » Voilà ce qu’a écrit entre nos pages Camille Gauthier, de la Librairie Le Fureteur, à propos de ce roman choral, qui a été finaliste au Prix des libraires et lauréat du Booker Prize ainsi que des British Book Awards. Douze femmes noires, fortes et courageuses, de milieux et d’âges divers, racontent leur existence. Avec ce livre envoûtant sur la liberté, la différence et la tolérance, Bernardine Evaristo les sort de l’ombre. En librairie le 29 septembre

L’apparition du chevreuil
Élise Turcotte, Alto, 168 p., 15,95$
Dans L’apparition du chevreuil, il se dégage une atmosphère inquiétante et une tension palpable, grâce à une écriture brillante et bien ficelée. Après avoir été victime de menaces sur les réseaux sociaux pour ses propos jugés féministes, une écrivaine se retire dans un chalet pour avoir la paix, fuir et écrire, mais son histoire familiale refait surface, ruinant sa tranquillité. Isolée dans la forêt et au cœur d’une tempête, elle a l’impression d’être suivie et se sent menacée par ce qui l’entoure, notamment le bâtiment voisin, un lieu abandonné. Lauréat du prix Ringuet, ce roman sonde avec lucidité la violence, les diktats sociaux, la condition féminine et la prise de parole.

Les testaments
Margaret Atwood (trad. Michèle Albaret-Maatsch), Robert Laffont, 652 p., 17,95$
Les testaments, c’est la suite du roman La servante écarlate, imaginé par l’écrivaine canadienne plus de trente ans après la parution de cette célèbre dystopie, d’ailleurs adaptée en série télévisée. Lauréat du Booker Prize en 2019 (ex æquo avec Fille, femme, autre), ce roman puissant se déroule quinze ans après la fin de la précédente histoire alors que le régime théocratique de la République de Gilead, dont la fin annoncée approche, détient toujours le pouvoir. Mais cette fois, ce n’est pas June la narratrice; on suit plutôt trois femmes très différentes dont les destins sont liés. Il y a la fille d’un commandant important, une Canadienne vivant dans une famille qui s’oppose au régime de Gilead, et une femme qui fait partie des bourreaux, Tante Lydia, personnage déjà connu de cet univers, dont le parcours singulier sera davantage révélé.

Fin de combat
Karl Ove Knausgaard (trad. collectif), Folio, 1520 p., 27,95$
Impossible de passer outre l’ultime volet de la grande aventure autobiographique de cet auteur norvégien, qui s’efforce d’explorer ses émotions et les possibles de l’écriture réaliste pour décrire une vision du monde qui lui est propre (et qui trouve justement dans cette authenticité une universalité dont témoigne le succès mondial de son œuvre). Dans ce sixième tome, il parle énormément de l’écriture, de cette période où il s’apprêtait à publier le premier volet de Mon combat et de son oncle qui menace de lui intenter un procès. Il remet en question ses souvenirs, essaie de comprendre pourquoi écrire sur sa vie — et le publier! — lui est si important. C’est aussi dans ce volet qu’il tisse un lien entre son œuvre et son analyse de la montée du nazisme, par le biais de Mein Kampf. Oh! Et soulignons la récente traduction d’En automne (Denoël), qui comprend une lettre adressée à sa fille à naître ainsi que vingt courts textes où il observe un sentiment ou un phénomène précis.

Conversations entre amis
Sally Rooney (trad. Laetitia Devaux), Points, 340 p., 15,95$
Dans Conversations entre amis, l’écrivaine irlandaise derrière le populaire Normal People dépeint la jeunesse, l’incommunicabilité ainsi que la complexité des relations amicales, intimes et amoureuses. À Dublin, deux femmes, qui ont été amantes puis amies proches, tentent de trouver leur place dans le monde. Alors qu’elles évoluent dans le milieu artistique, elles rencontrent une femme et son mari, un couple plus âgé qu’elles, qui chamboulera leur vie. Ces personnes formeront une sorte de quatuor amoureux, dont les sentiments et les liens seront parfois confus. Un roman rafraîchissant où se mêlent passion, séduction, jalousie, errance et quête de soi.

Cheval Indien
Richard Wagamese (trad. Lori Saint-Martin et Paul Gagné), BQ, 272 p., 11,95$
Adapté au cinéma et récompensé, ce roman sensible et puissant raconte la résilience et la force d’un jeune homme meurtri au destin tragique. Alors qu’il est au fond du baril, isolé dans un centre de désintoxication, Saul Cheval Indien, un Ojibwé d’origine anishinabeg du Nord ontarien, réfléchit à son existence, se remémore les horreurs subies dans les pensionnats autochtones, là où on a voulu l’arracher à ses racines, effacer sa culture, son identité. Ces effroyables traumatismes finiront par le faire sombrer dans l’alcool. C’est sa passion pour le hockey qui saura le garder en vie, être son échappatoire, son espoir, même si sa carrière dans ce sport n’empêchera pas sa descente aux enfers ni le racisme qu’il subira. Une lecture essentielle, émouvante, cruelle, qui ébranle. En librairie le 15 septembre

Chienne
Marie-Pier Lafontaine, Héliotrope, 112 p., 15,95$
« Un roman qui fait mal, qui obsède. L’effroi à chaque page dans les mots et surtout dans ceux qui sont tus. Le récit d’une enfance violentée, détruite et la voix d’une femme qui n’en guérira pas, mais qui aura su crier sa rage. » C’est en ces mots que la libraire Marie-Hélène Vaugeois a décrit ce livre coup-de-poing. Voilà, en effet, une lecture brutale, cruelle, dont on ne sort pas indemne. Dans cette autofiction, une première œuvre qui lui a valu le prix Sade, Marie-Pier Lafontaine raconte son enfance horrible, saccagée par la violence. Son père, un être sadique épouvantable, la terrorisait, la traitait comme une chienne, littéralement, la battant, la tenant en laisse et la contraignant à marcher à quatre pattes. De son côté, sa mère, témoin de ces humiliations et de ces atrocités, n’intervenait pas. Comment se remettre de cette douleur indicible? En librairie le 20 septembre

Ici n’est plus ici
Tommy Orange (trad. Stéphane Roques), Le Livre de Poche, 352 p., 13,95$
Avec ce roman choral, l’auteur américain arapaho et cheyenne tisse une histoire grandiose qui lie entre elles douze personnes, hommes et femmes, qui se retrouvent à l’occasion d’un grand pow-wow à Oakland. Plutôt que de dépeindre une vie en réserve, Tommy Orange montre la vie urbaine et son béton, dans sa laideur et sa pauvreté, là où une poignée de gens souhaitent pourtant célébrer la beauté de leur culture. C’est un roman de l’identité, qui explore la difficulté que vivent les communautés autochtones dans un milieu urbain, et même s’il fait place à la rage, il ne laisse pas de côté la poésie des images. Finaliste au Pulitzer de la fiction et lauréat de l’American Book Award, ce roman en est un notamment encensé par l’auteur et rappeur québécois Samian.

Publicité