À chaque édition de la revue Les libraires, nous vous proposons une sélection de livres qui se glissent facilement dans votre poche. Petit prix et petit format, certes, mais de grandes découvertes et de belles plumes!

Le mauvais côté des choses
Jean Lemieux, Québec Amérique, 448 p., 16,95$
Maintenant à l’escouade des crimes majeurs du SPVM, André Surprenant enquête sur une affaire complexe, en plus de soupçonner la présence d’une taupe au sein de la police. À la sortie d’une pizzeria, le propriétaire a été assassiné, et on a lui a amputé la main droite. Ce meurtre est-il lié à un règlement de comptes du crime organisé? Ou est-ce l’œuvre d’un psychopathe? Comme les victimes s’accumulent et que chaque fois, on retrouve une branche d’amélanchier près des cadavres, il pourrait s’agit d’un tueur en série. En parallèle de cette histoire, Surprenant revisite son passé familial; il cherche la trace de son père, disparu en 70, qui pourrait être soudainement réapparu à Los Angeles. Avec ce quatrième titre de cette série policière, Jean Lemieux échafaude un suspense bien ficelé et captivant.

Les choses humaines
Karine Tuil, Folio, 352 p., 15,50$
Jean et Claire forment un couple parfait, du moins en apparence, puisque chacun entretient une relation avec quelqu’un d’autre. Puis un jour, les illusions se fissurent encore davantage : leur fils, à qui tout semblait réussir lui aussi, est accusé de viol par la fille de l’amant de Claire. Un processus judiciaire est enclenché, confrontant les univers de la victime et de l’accusé, propulsant la famille de celui-ci au cœur de la tourmente et dans un engrenage vertigineux. Lauréat du prix Goncourt des lycéens et du prix Interallié, ce roman au regard acéré et lucide sonde les constructions sociales, les rapports hommes-femmes, la réussite et le pouvoir, tout en explorant les failles et les peurs des êtres.

M’étendre sur l’asphalte
Julie Bosman, Nomades, 208 p., 12,95$
Dans ce roman jeunesse, l’auteure nous entraîne dans la préadolescence de Julie, 12 ans, au début des années 80. Cette dernière fera un saut dans le monde adulte plus précocement qu’elle ne l’aurait cru, notamment en raison du décès de son meilleur ami. Mais il ne s’agit pas d’un roman sombre : on suit ensuite la narratrice — qui adore Diane Dufresne, David Bowie et les virées au dépanneur — dans ce grand amour qui la chamboule, avec un garçon plus vieux qu’elle, dans son désir de voir rapidement son corps évoluer vers celui d’une femme, dans les contradictions qui s’élèvent entre elle et ses parents. Pour les adultes qui le liront, c’est le plaisir de retrouver tous ces marqueurs culturels liés aux années 80; pour les jeunes qui dévoreront ce livre, c’est découvrir une époque où les cellulaires n’existaient pas, où la vie se vivait ailleurs, tout en étant similaire à la leur. Dès 12 ans

L’oiseau moqueur
Walter Tevis (trad. Michel Lederer), Gallmeister, 336 p., 17,95$
L’auteur du Jeu de la dame, récemment adapté en série sur Netflix, a imaginé dans L’oiseau moqueur un univers où le passé n’existe plus et où l’individualisme est à son paroxysme. Au XXVe siècle, les livres, les films et les émotions sont bannis depuis longtemps. Les humains se sont délestés des efforts intellectuels et du travail, qui est maintenant accompli par des robots. Ils peuvent maintenant être tranquilles et ne rien faire, surtout qu’on leur fournit des tranquillisants. Dénués de leur humanité, ils vivent sans sentiments, sans vivre pleinement, peinant à remplir les vides de leur existence. Un jour, un jeune homme solitaire découvre le passé — et la lecture —, une brèche vers l’humanité, qu’il explore en compagnie d’une rebelle qui s’oppose à ce système. Un androïde très perfectionné, sensible à la souffrance, souhaite se suicider, mais n’a pas ce pouvoir. Ces personnages instilleront-ils l’espoir dont a besoin ce monde robotisé?

Mademoiselle Samedi soir
Heather O’Neill (trad. Dominique Fortier), Alto, 512 p., 19,95$
À Montréal, dans les années 90, Nouschka et Nicolas, des jumeaux inséparables, vivent avec leur grand-père. Leur mère les a abandonnés et leur père, bien qu’il soit une légende grâce à ses chansons, est plutôt absent de leur vie. Frère et sœur, ces êtres charmants qui attirent les regards aiment la démesure et rejettent l’ordinaire. À l’aube de leurs 20 ans, ils essaient de se construire un avenir et se retrouvent sous les projecteurs alors que Nouschka devient la reine de beauté au défilé de la Saint-Jean-Baptiste. Dans ce roman touchant, oscillant entre l’ombre et la lumière, Heather O’Neill magnifie le quotidien de ses personnages esseulés assoiffés d’amour, de grandeur et de douce folie.

L’homme qui pleure de rire
Frédéric Beigbeder, Le Livre de Poche, 312 p., 13,95$
Après avoir travaillé dans le monde de la publicité dans les années 90, puis dans celui de la beauté et de la mode dans les années 2000, Octave Parango — le double littéraire de l’écrivain — gravite maintenant dans le milieu de l’humour, tenant une chronique humoristique à la radio, à l’émission matinale la plus écoutée. Un matin, il sabote son intervention, se faisant virer en ondes. Avec sa verve éloquente et corrosive, Frédéric Beigbeder conclut sa trilogie satirique entamée avec 99 francs et Au secours pardon en poursuivant son observation cynique et drôle des égarements et aliénations de la société contemporaine. Il décortique cette fois la tyrannie du rire, dorénavant omniprésente dans la sphère publique, obnubilée par le divertissement.

Le fils du notaire. Jacques Ferron : genèse intellectuelle d’un écrivain
Marcel Olscamp, BQ, 472 p., 19,95$
L’année 2021 marque le centenaire de naissance de Jacques Ferron (1921-1985), médecin, militant et grand écrivain. Pour célébrer cet anniversaire, BQ publie une édition intégrale de ses Contes ainsi que sa biographie écrite par Marcel Oslcamp, un ouvrage qui a notamment été récompensé du prix Victor-Barbeau et du prix Jean-Éthier Blais. En plus de redécouvrir l’œuvre de Ferron (L’amélanchier, Les roses sauvages, Le ciel de Québec, La conférence inachevée, etc.), largement autobiographique et à l’imaginaire singulier, c’est l’occasion d’en apprendre davantage sur sa vie, son parcours, son engagement social et son univers. L’histoire du Québec, surtout les années 20 à 50, se dévoile également à travers le regard de ce jeune Québécois, né dans une famille aisée et intellectuelle, qui a laissé un incroyable legs à la littérature et à la société québécoise.

Le monde est à toi
Martine Delvaux, Héliotrope, 152 p., 14,95$
Dans ce livre, la féministe Martine Delvaux s’adresse à sa fille et par le fait même à tous les jeunes qui se trouvent sur le point de faire leur entrée dans la vie adulte. En même temps que l’auteure repasse les principes d’éducation auxquels elle tient, elle laisse toute liberté au jeune individu d’être ce qu’il est, sans venir influencer sa trajectoire en y calquant des schémas préétablis. Elle fait consciencieusement l’examen de sa maternité, qu’elle ne prétend pas parfaite, mais qui toujours souhaite approcher les choses avec le cœur. Car avant tout, l’amour est au centre de l’aventure, il s’immisce dans chaque pli, il incarne le sens et l’héritage de la transmission. Ce carnet ne s’affiche pas comme un guide, mais il inspire tant qu’il finit par être une référence que l’on revisite encore et encore.

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