À chaque édition de la revue Les libraires, nous vous proposons une sélection de livres qui se glissent facilement dans votre poche. Petit prix et petit format, certes, mais de grandes découvertes et de belles plumes!

L’affaire Myosotis
Luc Chartrand, Québec Amérique, 492 p., 16,95$
Il a remporté le prix Arthur-Ellis du roman policier en langue française, le prix Ténébris ainsi que celui de Saint-Pacôme du roman policier : autant de lauriers prouvant la grande qualité de cette œuvre! Luc Chartrand est journaliste, à la presse écrite comme à la télévision, et a couvert les conflits au Moyen-Orient durant plusieurs années : c’est donc en mettant ses connaissances à profit qu’il élabore ce thriller politique enlevant qui nous entraîne en zone de guerre sous moult rebondissements. Son personnage, Paul, ancien journaliste maintenant basé en Israël, apprend le meurtre d’un vieil ami à Gaza. Cet ami finançait un organisme international créé pour venir en aide aux enfants victimes de guerres… Si les autorités canadiennes accusent les terroristes, l’enquête de Paul dévoile que les coupables sont plutôt des gens qui ont le bras long…

 

Autopsie d’une femme plate
Marie-Renée Lavoie, BQ, 256 p., 12,95$
À 48 ans, Diane voit son mariage s’écrouler alors qu’elle s’apprêtait à célébrer vingt-cinq années de vie commune avec son mari qui, à la place, décide de la quitter pour une femme plus jeune. Après être passée par toutes les étapes du deuil et avoir rejoint les nombreux survivants du divorce, Diane tente de se réinventer. L’histoire aurait pu être banale, mais elle ne l’est pas grâce à la plume rafraîchissante et colorée de Marie-Renée Lavoie, loin d’être plate, tout comme ses personnages, toujours attachants. L’auteure qui nous a charmés avec La petite et le vieux et Les chars meurent aussi signe une œuvre sensible et drôle sur la fragilité du couple ainsi que sur les aléas d’une séparation et de la vie. Découvrez d’ailleurs la suite de ce roman dans le récent Diane demande un recomptage.

 

Cottage, fantômes et guet-apens
Ann Granger (trad. Élisabeth Kern), 10/18, 360 p., 25,95$
Les amateurs d’« Agatha Raisin enquête » qui se cherchent une nouvelle série de cosy-crimes à se mettre sous la dent apprécieront ce roman, premier volet d’une série qui, en anglais, en compte déjà cinq. Cette fois, on n’est pas dans les Cotswolds, mais bien dans les campagnes du tout aussi bucolique Gloucestershire. L’enquête débute alors qu’une femme de 19 ans est retrouvée morte, sur une ferme abandonnée. Les personnages sont forts, et parfois même loufoques, et l’enquêteur n’est pas un amateur, mais bien un membre d’un corps policier. Le tout se démarque ainsi des autres séries de cosy-crimes à succès. Oh! Et on y retrouve un peu la dichotomie entre rat des villes et rat des champs, bien entendu!

 

La Maison
Emma Becker, J’ai lu, 446 p., 15,50$
La journaliste et romancière Emma Becker a passé, à l’âge de 23 ans, deux années dans un bordel, en Allemagne, comme prostituée. Si son désir était d’abord de décrire un phénomène de société, l’écrivaine en elle a vite repris le dessus. En résulte La Maison, un roman biographique où Emma Becker nous ouvre les portes de ce lieu habituellement à l’abri des regards indiscrets, où beaucoup de bienveillance, d’amour et de conseils s’échangent. Cet ouvrage n’a pas fait l’unanimité en raison du côté reluisant de la prostitution qu’il met de l’avant, mais tous en ont salué la qualité littéraire. En entrevue, d’ailleurs, l’auteure nous mentionnait souhaiter qu’on retienne qu’avant de parler de prostitution, elle a parlé de la force des femmes, de leurs désirs et libertés individuelles : « J’ai rendu une part de force, de dignité et de splendeur à ces femmes qu’on aimerait réduire à des corps. »

 

Les frères Lehman
Stefano Massini (trad. Nathalie Bauer), 10/18, 912 p., 18,95$
Entre l’arrivée à New York d’Henry Lehman en 1844 et l’effondrement de la banque Lehman Brothers en 2008, il se sera passé cent soixante-quatre années où quatorze Lehman de trois générations différentes auront participé à l’édification d’un empire financier qui se soldera par la faillite. Ce roman inspiré de la véritable histoire et entièrement écrit en vers libres est un tour de force. Il raconte de l’intérieur et avec beaucoup d’humour les faits qui ont mené cette puissance mondiale à péricliter jusqu’à l’écrasement final. En parallèle, le récit d’une société qui carbure au profit se dessine entre les pages avec les conséquences inévitables qu’elle entraîne. Long poème épique moderne, ce livre qui a remporté en 2018 le prix Médicis dans la catégorie essai montre avec brio la grandeur et la décadence d’une Amérique aux prises avec son insatiable appât du gain.

 

Jack et le temps perdu
Stéphanie Lapointe et Delphie Côté-Lacroix, XYZ, 96 p., 19,95$
Tous les jours, Jack vogue sur son bateau. Ce pêcheur pas comme les autres ne cherche qu’une chose : la baleine grise qui s’est emparée de son fils. Seul et désespéré, il abandonne tout et sombre peu à peu au fil de sa quête douloureuse, obsédé par la recherche de son fils. Les mots touchants de Stéphanie Lapointe et les illustrations sensibles de Delphie Côté-Lacroix font de ce roman graphique une œuvre émouvante, tout en finesse, qui témoigne de la fragilité et de la solitude du personnage, prisonnier d’un fol espoir. Lauréat du Prix du Gouverneur général, cet album d’une tristesse infinie nous chavire le cœur.

 

Suzanne Travolta
Élisabeth Benoit, Héliotrope, 224 p., 14,95$
À Montréal, dans le Mile-End, la voisine de Suzanne s’est enlevé la vie. Suzanne — et d’autres personnes de son entourage — essaie de comprendre cet événement tragique. Pourquoi s’est-elle suicidée? Il y a Suzanne qui raconte cette histoire, esquissant peu à peu le portrait de cette disparue, une vision forcément subjective, puisque c’est impossible de tout savoir sur elle et que tous la perçoivent différemment. Et il y a aussi Bob, que les autres ne connaissent pas, mais qui, lui, s’intéresse plutôt à Suzanne qu’il observe, et il nous apprend des choses que Suzanne ne nous révèle pas. Finaliste au Prix littéraire des collégiens, ce premier roman d’Élisabeth Benoit, à la structure audacieuse, propose une joute narrative originale qui montre à quel point les gens peuvent être insaisissables.

 

Une joie féroce
Sorj Chalandon, Le Livre de Poche, 316 p., 13,95$
Appréciée de tous, Jeanne est une femme discrète, peu exigeante, qui s’excuse presque d’exister. Puis, un jour, la vie cesse de suivre tranquillement son cours; elle apprend qu’elle souffre d’un cancer du sein. Délaissée par son mari désemparé par la situation, Jeanne se réfugie chez trois autres combattantes, rencontrées lors d’un traitement de chimio. Et voilà qu’à leur contact, Jeanne n’a plus envie de se taire; elle a envie de hurler, de vivre pleinement, d’être libre. Ensemble, ces femmes résistent malgré la maladie et refusent les injustices. Après tout, elles n’ont plus rien à perdre. Un roman touchant sur la solidarité féminine, la force et le courage des femmes.

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