La Comics Code Authority : Une censure de l’intérieur, pour éviter la censure extérieure

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En 1954, le Sénat américain décide de se pencher sur le dossier de la délinquance juvénile. Invité à titre d’expert lors de la commission d’enquête sur le sujet, le psychiatre Fredric Wertham – qui avait publié La séduction des innocents, un livre s’opposant diamétralement aux comics en les accusant de corrompre la jeunesse – convainc l’assistance de la véracité de ses thèses. L’Église et des groupes de citoyens boycottent alors les comics et les écoles vont même jusqu’à les brûler lors d’autodafés publics.

Effrayés par une possible future législation qui donnerait un droit de regard au gouvernement sur leurs créations et apeurés par les effets que créerait sur leur clientèle le doute grandissant des parents à l’égard des superhéros, les éditeurs prennent les devants et créent la Comics Code Authority(CCA), qui veille à réguler le contenu des magazines avant même leur publication. Le sceau de la CCA obtenu, les bandes dessinées peuvent reprendre la route jusqu’à leurs lecteurs, les commerçants acceptant, pour la plupart, de ne vendre que celles qui auront été autorisées.

Mais qu’entend-on exactement par « régulation de contenu »? La représentation de violence excessive ou de sexualité est proscrite, les publicités de tabac, d’alcool, d’armes ou celles mettant de l’avant des femmes dénudées sont interdites; les figures d’autorités, les groupes raciaux ou religieux ne doivent pas être ridiculisés; la représentation de certains personnages, tels vampires, loups-garous, zombies ou goules, est totalement prohibée; le mot « crime » ne doit jamais apparaître sur la couverture, de même que les mots « horreur » et « terreur » dans les titres; le divorce doit toujours être traité de façon non désirable et sans humour; et, très important, le bien doit toujours triompher sur le mal.

Si la Comics Code Authority a eu un fort impact sur le contenu des histoires de justiciers ou de vengeurs masqués (certains auteurs affirment même que les récits se réduisaient à des histoires d’amour ou présentaient des modes de vie ‘’pépères’’), il n’en reste pas moins qu’il en résulta un fort succès commercial pour plusieurs, tout en ouvrant la porte à l’apparition d’un réseau de création et de diffusion underground, pour qui l’utilisation des thèmes interdits devenait la panacée. Depuis janvier 2011, le CCA a totalement disparu avec le retrait des deux derniers gros éditeurs encore membres : DC et Archie.

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