Après avoir souvent effleuré le prix Nobel, Ludmila Oulitskaïa, femme de lettres russe et détractrice notoire de Vladimir Poutine et du kremlin, voit enfin l'ensemble de son œuvre primé par le prix Formentor.

Le prix Formentor, doté d’une bourse de 50 000 euros, est décerné annuellement depuis 1961. Il est une reconnaissance de la qualité et de l’intégrité d’auteurs dont l’œuvre consolide le prestige et le rayonnement de la littérature à travers le monde. Ainsi, Ludmila Oulitskaïa s’inscrit dans la lignée des grandissimes Annie Ernaux, Nathalie Sarraute, Samuel Beckett et Jorge Luis Borges.

Les membres du jury, délibérant du lauréat dans la demeure du romancier José Saramago à Lanzarote, louangent l’écrivaine pour :

« le souffle narratif puissant avec lequel elle enregistre les émotions les plus subtiles de l’âme humaine, pour la sensibilité avec laquelle elle raconte l’épopée de personnes jetées dans le labyrinthe du monde, pour la délicatesse avec laquelle elle réhabilite la dignité d’hommes et de femmes soumis au sort despotique du malheur. »

Ayant quitté Moscou quelques jours après l’invasion de l’Ukraine, Oulitskaïa habite maintenant Berlin. Autrefois biologiste, elle s’est mise à écrire en 1970 après avoir perdu sa chaire de génétique faute de sa proximité avec les dissidents du régime politique soviétique en place. Sa bibliographie regroupe désormais plus d’une trentaine de parutions traduites dans quinze pays. Le 7 avril 2022, Gallimard a publié son dernier recueil intitulé Le corps de l’âme, où les femmes se trouvent au premier plan. À 79 ans, sa posture droite et imperturbable devant les injustices du monde et son goût pour la liberté d’expression demeurent contagieux et nécessaires.

Photo : © Dmitry Rozhkov

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