L'initiative Les libraires conseillent répond à la demande des lecteurs avides de suggestions. Chaque mois, un comité formé d’une quinzaine de libraires établit, après moult discussions passionnées et passionnantes, une sélection de cinq livres. Essais, BD, romans jeunesse ou pour adultes, d’ici comme d’ailleurs, ces cinq livres sont mis de l’avant dans les librairies membres de notre réseau. Cette initiative est une belle occasion de promouvoir des livres jugés particulièrement remarquables, ainsi que de valoriser le rôle primordial de votre libraire. Voici la sélection de février.


Parfois les lacs brûlent
Geneviève Bigué (Front Froid)

Vous savez : parfois les lacs brûlent. Paraît-il même que si on y plonge un truc, il ressort tout en or! Est-ce une légende? Est-ce vrai? Une chose est sûre, le lac Kijikone à Rivière-aux-Corbeaux est en proie aux flammes et ça incite nos protagonistes à vouloir vérifier l’étendue de la légende. Une histoire surprenante et bien ficelée par Geneviève Bigué. Les illustrations sont magnifiques et bien rythmées. Mais est-ce que la légende est vraie? À vous d’aller y jeter un œil…
Shannon Desbiens, Librairie Les Bouquinistes (Chicoutimi)

 


Le muguet rouge
Christian Bobin (Gallimard)

Bobin s’en est allé dans l’immanence bienheureuse qu’il savait si bien nous dévoiler, tirant le voile terne de la réalité sur la beauté des petites choses poétiques cachées en coulisse. Comme testament, nulle dernière volonté arrachée dans un dernier râle, aucune colonne de chiffres à accompagner dans de nouveaux enclos bancaires. Fidèle à lui-même, l’immense Bobin nous laisse quelques mots endimanchés pour affronter la vacuité de la modernité, ses hordes d’assoupis en marche vers on ne sait où. On découvre, en plus de sa sempiternelle sérénité, de sa capacité d’émerveillement olympique, un Bobin plus combatif, affûtant un instant les plumes de ses douces ailes de rêveur pour pourfendre de quelques piques ricanantes la médiocrité ambiante. Puis il nous rappelle justement que peu importe l’ampleur de l’atrocité, son époque de référence, il s’agit toujours de trouver en toute chose la couleur éclatante du muguet rouge.
Thomas Dupont-Buist, Librairie Gallimard (Montréal)

 


Il fera chaud cette nuit
Yannick Marcoux (XYZ)

La littérature à connotation sexue est souvent truffée d’exagérations et d’invraisemblances, préférant généralement la surenchère au détriment d’un réalisme ou d’une authenticité dont les tenants et aboutissants sont peut-être trop facilement jugés inaptes à susciter le frisson. Dans ce recueil faisant au contraire la part belle au naturel, du miracle de l’intimité à la très relative banalité du désir, de la sensuelle complicité des promesses que l’on se fait  aux contingences de leur tenue, du rare alignement des astres à ce qu’il faut de bonne volonté pour garder le cap en dépit des aléas ou de la nostalgie d’époques plus spontanées à l’évocation paisible des eaux plus calmes du présent, Yannick Marcoux se fait le chantre d’une vie des sens dont la vivacité se conjugue à même le rythme syncopé d’un quotidien où, pour peu que l’amour soit de la partie, les cœurs battent néanmoins à l’unisson.
Philippe Fortin, Librairie Marie-Laura (Jonquière)

 


Ce que je sais de toi
Éric Chacour (Alto)

Éric Chacour signe un premier roman exceptionnel qui nous plonge dans une famille conservatrice du Caire à partir des années 1960. Tarek, à qui le narrateur s’adresse, devient médecin à la suite de son père. Cette profession imposée est aussi responsable de l’éclatement de sa famille après une rencontre qui viendra bousculer l’ordre établi et qui le poussera à s’exiler à Montréal. Des personnages complexes, des descriptions faisant appel à nos sens, de la douleur et de la douceur, tout cela résume le texte de Chacour qui n’a rien à envier aux auteurs et autrices établi.es.

Pascale Brisson-Lessard, Librairie Marie-Laura (Jonquière)

 


Les facétieuses
Clémentine Beauvais (Sarbacane)

Il est quasi impossible de résumer Les facétieuses sans divulgâcher. L’autrice a pris un pari risqué en écrivant cette histoire loufoque et elle relève le défi avec brio. Avec Les facétieuses, Clémentine Beauvais – l’autrice – devient Clémentine Beauvais – l’héroïne de sa propre histoire. Elle se lance dans une quête où se mêlent réalité et fiction afin de découvrir ce qui a causé la disparition des marraines la bonne fée (car dans l’histoire, elles ont déjà existé). Si le roman est difficile à résumer, il se lit très facilement grâce à un style drôle, léger et rafraîchissant. Même si le roman comporte une bonne dose de fantastique, on y aborde plusieurs sujets qui sont dans l’air du temps : les classes sociales, la place des femmes dans la société ou encore la transidentité. À mettre dans les mains de tous les amateurs d’histoire, d’absurde ou de fantastique!
Jacinthe Crête, Librairie Monet (Montréal)