L’auteur américain Philip Roth est mort dans un hôpital de New York hier le 22 mai à 22h30 à l’âge de 85 ans. L’immense écrivain a succombé à une insuffisance cardiaque congestive, a annoncé Andrew Wylie, l’agent de Roth. Le biographe officiel de l’auteur, Blake Bailey, confirme la nouvelle par ces mots laissés sur Twitter : « Philip Roth est mort ce soir, entouré d’amis de toujours qui l’aimaient tendrement. Il a été un homme chéri, notre plus grand écrivain vivant. »

Il y a six ans que Philip Roth avait cessé d’écrire. Une décision assumée par celui-ci et qui a donc fait de Némésis son dernier livre. Tout a débuté en 1959 avec la publication de Goodbye, Columbus, un recueil de nouvelles qui n’est pas passé inaperçu. Mais c’est avec la parution du roman Portnoy et son complexe près de dix ans plus tard qu’il fera grand bruit, écorchant certaines sensibilités par des descriptions à caractère sexuel des plus crues. On y lit le récit d’Alexander Portnoy, juif américain trentenaire, à son psychanalyste. Fantasmes inavouables (mais ici avoués) qui questionnent la morale bienpensante avec humour, cynisme et tendresse, des qualités qu’on retrouve d’ailleurs un peu partout dans l’œuvre de Philip Roth. Audacieuse et rebelle font aussi partie des caractéristiques attribuées aux livres de l’écrivain.

Trois cycles ont été identifiés dans l’œuvre de Roth, à commencer par celui de David Kepesh débuté en 1975 avec Le sein, poursuivi en 1979 par Professeur de désir et clos en 2004 avec La bête qui meurt. Entre-temps, un deuxième cycle est entamé avec Nathan Zuckerman dont on fait la connaissance dans L’écrivain des ombres (1981) et que l’on suit avec Zuckerman délivré (1982), La leçon d’anatomie (1985), L’orgie de Prague (1987), La contrevie (1989), Pastorale américaine (1999), J’ai épousé un communiste (2001), La tache (2002) et enfin Exit le fantôme (2009). Un troisième cycle se déploie avec Némésis, entamé avec Un homme (2007), puis Indignation (2010), Le rabaissement (2011) et Némésis (2012).

Plusieurs livres ne font pas référence à l’un ou l’autre cycle et se déploie individuellement, par exemple Le Théâtre de Sabbath et Portnoy et son complexe cités plus haut, ou encore Le complot conte l’Amérique publié en 2006 ou Patrimoine (1992), qui relate la maladie et la mort de son père.

L’auteur était également très estimé de ses pairs, une trentaine de ceux-ci parmi les plus influents (Bret Easton Ellis, Salman Rushdie, etc) l’ayant déclaré en 2013, à l’aube des 80 ans de Roth, « meilleur écrivain vivant ». Le roman Le Théâtre de Sabbath est ressorti comme le livre ultime par les camarades littéraires.

Il a obtenu de nombreuses récompenses, dont le fameux Pulitzer en 1998 pour Pastorale américaine, le Médicis étranger en 2002 pour La tache ou encore le prix international Man-Booker en 2011 pour l’ensemble de son œuvre. Il n’a cependant pas reçu le Nobel, bien qu’ils fussent plusieurs à l’avoir anticipé. En septembre 2017, il entre dans la célèbre collection française La Pléiade.

Rendons à César ce qui appartient à César : Philip Roth appartient aux grands écrivains de l’Amérique.

 

Chronique de Robert Lévesque : Philip Roth : Judéité, sexualité, sagacité

 

Photo Nancy Crampton © Opale / Éditions Gallimard

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