L’écrivain allemand Edgar Hilsenrath est décédé le 30 décembre dernier alors qu’il était âgé de 92 ans. Celui qui a acquis une notoriété internationale notamment grâce à son humour satirique et sa façon particulière de raconter la tragédie humaine laisse une œuvre dense et unique.  

Né en 1926 et issu d’une famille juive, Hilsenrath a connu l’horreur de la guerre, l’exil et la vie de ghetto. Une grande partie de son enfance sera touchée par l’errance et l’obligation de fuir. Selon ses dires, l’écriture était pour lui une façon de lutter contre l’oubli. Quelques-unes de ses œuvres relatent très spécifiquement la Shoah et bien qu’il soit d’origine allemande, son travail sera d’abord publié et reconnu aux États-Unis avant de réellement être accepté puis lu dans son pays natal qui le considèrera longtemps comme un auteur indésirable.

Plusieurs de ses romans ont valu à ce romancier inclassable des prix, dont le prix Alfred-Döblin, considéré comme la plus prestigieuse récompense littéraire allemande, qu’il a reçu en 1989 pour son livre Le conte de la dernière pensée publié en français aux éditions Le Tripode.

Son œuvre entière traite de sa vie, de la vie, aussi crue et dure qu’elle puisse être et qu’il dépeint avec un réalisme à la fois épouvantable et en même temps presque burlesque, avec une voix singulière et une authenticité marquante. On lui doit bon nombre de titres importants, dont son premier roman Nuit, Le nazie et le barbier, Fuck America ou encore Le retour au pays de Jossel Wassermann, tous disponibles aux éditions Le Tripode.

Fuck America n’est pas un roman ordinaire. Si son auteur, Edgar Hilsenrath, est comparé à John Fante et à Charles Bukowski, ces maîtres du récit coup de poing qui ne fait pas dans la dentelle, c’est pour les bonnes raisons. Des raisons littéraires d’une rare qualité et non pas le trash pour le trash. Publié en Allemagne en 1980 et traduit pour la première fois en français en 2009, Fuck America raconte l’histoire de Bronsky, rescapé des camps de la mort et immigrant aux États-Unis après la guerre, qui cherche à retracer la mémoire de ces événements en écrivant un roman autobiographique intitulé Le branleur. Tragicomédie ayant pour décors l’envers du rêve américain et l’Allemagne nazie, Fuck America porte sur ces thèmes un regard troublant autant qu’inusité.
Fuck America – Commentaire de lecture de Christian Girard de la librairie Pantoute, Québec

Son dernier roman Terminus Berlin a été publié en Allemagne en 2006 et la sortie est prévue en France pour le mois de février. Reste à espérer que ce dernier morceau de son œuvre se rendra jusqu’à nous.

 

© D.R.

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