Le conseil d'administration de l'Association nationale des éditeurs de livres (ANEL) a nommé à l'unanimité sa prochaine directrice générale. Karine Vachon succédera à Richard Prieur qui avait annoncé son départ le 1er décembre prochain. Œuvrant depuis plus de dix ans au sein de l'équipe, Mme Vachon connaît les dossiers sur le bout de ses doigts, en plus de posséder une maîtrise en histoire du livre et de l’édition. Nous avons voulu savoir comment elle entrevoyait ses nouvelles fonctions à l'ANEL, une association qui rassemble plus de 110 maisons d'éditions francophones au Québec et au Canada.

L’invitation du Canada comme hôte d’honneur de la Foire du livre de Francfort 2020 est reportée à 2021 en raison de la pandémie. Comment les éditeurs membres de l’ANEL et Québec Édition composent avec cette réalité, après s’être consacrés pendant des mois à l’organisation de cet événement qui devait être imminent?
Le report à 2021 du Canada à l’honneur à la Foire du livre de Francfort a été accueilli avec joie et soulagement par les éditeurs et l’équipe de Québec Édition. Être sous les projecteurs lors du plus important événement au monde destiné aux professionnels du livre est une occasion unique de promotion et de développement de marchés internationaux pour les éditeurs et les auteurs. En effet, beaucoup de travail a été accompli ces dernières années par un grand nombre de partenaires du Québec et du Canada : soutenir les éditeurs dans la vente de droits pour favoriser la traduction d’œuvres d’ici en allemand, organiser des événements littéraires en Allemagne, sélectionner la délégation d’auteurs qui seront à l’honneur, organiser des stands collectifs d’envergure et un pavillon d’exposition, mais tout cela n’est pas perdu. En 2021, nous serons plus prêts que jamais, nous aurons d’ailleurs plus de temps pour développer des liens avec des libraires allemands et des journalistes, et les lecteurs allemands auront eu la chance de lire, déjà, un grand nombre d’œuvres d’ici en traduction. Les éditeurs d’ici continuent de vendre des droits aux éditeurs allemands. Il reste à voir, à court terme, comment, en 2020, la formule virtuelle de la Foire leur permettra de poursuivre leurs efforts d’exportation en matière de cession de droits.

2020-2021 est l’année où les milieux scolaires auront enfin accès à une plateforme leur donnant accès au livre numérique. Comment les éditeurs accueillent-ils le lancement du projet Biblius?
S’assurer que le livre d’ici occupe une place prépondérante dans les écoles et les bibliothèques scolaires est primordial pour l’ANEL et ses éditeurs. Les éditeurs suivent avec intérêt des projets innovants comme Biblius qui visent à accroître l’accès à notre littérature aux élèves et aux enseignants, dans la mesure où ces initiatives permettent une juste rémunération des auteurs. Par ailleurs, l’ANEL collabore à l’élaboration du projet Biblius, avec Bibliopresto. La cohabitation du livre numérique et du livre imprimé dans les écoles est là pour rester; mais les modèles présentés aux éditeurs évolueront certainement avec le temps, en fonction des pratiques qui sont faites par les usagers.

Comment l’élan que vous souhaitez donner à l’ANEL se distinguera-t-il de celui de votre prédécesseur, Richard Prieur?
Je travaille avec Richard Prieur depuis plus de 10 ans; je suis arrivée à l’ANEL quelque six mois avant lui. Cela aura été un réel plaisir de collaborer avec lui pendant tant d’années, et, sur plusieurs dossiers, mon travail s’inscrira dans la continuité de ses actions. Je peux a priori paraître plus posée que Richard, mais ceux et celles qui me côtoient savent l’énergie et la passion que je mets dans les dossiers que je mène. J’entends accentuer la synergie entre les différents comités – le numérique, la promotion, le droit d’auteur, etc. – et la collaboration de l’ANEL avec les différents acteurs de l’écosystème du livre.

Quelle est votre perception du rôle que les librairies indépendantes ont joué depuis le début de la crise le 13 mars dernier?
Les librairies indépendantes ont joué un rôle extraordinaire depuis le début de la crise, d’une part, en réalisant, pendant le confinement un nombre impressionnant de livraisons, permettant à la population d’avoir accès aux livres et à la lecture. Le site leslibraires.ca a démontré toute sa pertinence et son efficacité. Du côté de l’ALQ, des initiatives comme « Lire en chœur » ont permis de promouvoir une quantité incroyable de titres. Selon les indicateurs que nous avons du marché actuellement, via la BTLF, les ventes de livres, cet été, ont été en hausse par rapport à l’an dernier et c’est très encourageant. Je salue le travail des libraires qui ont aussi valorisé les livres de fonds, à la réouverture des librairies, alors que les nouveautés se faisaient rares, et qui aujourd’hui encore, continuent de travailler dans des conditions particulières, avec le port du masque et la distanciation sociale.

Comment portez-vous votre rôle en tant que femme à la tête d’un poste de direction?
Je considère qu’il y a à l’ANEL et dans le milieu du livre des modèles de femmes qui occupent un poste de direction générale avec brio, comme Katherine Fafard à l’ALQ, avec qui j’aurai la chance de collaborer davantage. Ma nomination à la direction générale de l’ANEL a été très bien reçue, si j’en crois tous les courriels qui m’ont été envoyés. Je me sens appuyée par les membres de l’Association, qui me connaissent et qui m’ont vu diriger les activités de Québec Édition pendant une décennie. Il y a eu d’autres femmes à la direction de l’ANEL avant moi, mais je dois dire que je suis heureuse d’être nommée maintenant, en 2020, alors qu’il y a plus de femmes que jamais à siéger au conseil d’administration de l’ANEL et à participer aux activités de différents comités. La mixité et la place grandissante des femmes sont importantes.

Crédit photo : Marc-Antoine Zouéki

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