La maison de Marie-Soleil Dion contient une pièce remplie de livres. Surnommé « le chalet » par ses occupants et surplombé d’un toit cathédral, l’espace est un joyeux fouillis d’œuvres en tous genres, sans aucun classement apparent, qui laisse entrevoir la passion pour la littérature de la comédienne.

« Notre projet est de classer nos livres pour s’y retrouver, parce qu’on en a vraiment beaucoup, mais on ne les retrouve pas tout le temps », révèle l’actrice avec candeur lors d’un entretien sur Zoom en direct de sa chambre à coucher, en laissant entrevoir des livres qui traînent sur le plancher à ses côtés et d’autres sur une tablette au-dessus de sa tête.

Suggestions scolaires personnalisées
Il faut dire que son amour pour la littérature a été exacerbé par son professeur de français de troisième secondaire, Denis Béland, qui faisait remplir un questionnaire aux centaines d’élèves de ses différents groupes pour connaître leurs goûts et leur personnalité, afin d’orienter ses propositions de lecture. « En fonction de nos réponses, il nous donnait cinq livres obligatoires à lire durant l’année, alors on lisait tous des livres différents », s’exclame la comédienne.

Si son voisin de pupitre, un fan fini de science-fiction, avait reçu le mandat de lire Le Seigneur des anneaux, la jeune Marie-Soleil a été guidée vers la poésie de Paul Éluard. « Je trouvais ça si beau! Dans L’amour, la poésie, qu’il avait écrit pour Gala, la femme de Salvador Dali, je pouvais goûter à l’amour, au désespoir, à la tristesse et au déchirement. » Elle a d’ailleurs donné ce livre en cadeau à plusieurs amis et amoureux. « C’est un peu ma façon de leur montrer ma vision de l’amour, quoique ce n’est pas la plus saine ni la plus simple, mais c’est un amour pur et intense qui me touchait. À l’adolescence, c’étaient mes premiers contacts avec une romance que j’espérais vivre. En vieillissant, je le relis avec un regard plus mature et je vois différentes choses, mais je le trouve encore magnifique. »

À la même époque, ses yeux ont été dirigés vers Jane Eyre et Madame Bovary. « Ce sont de grands classiques qui m’avaient ouverte à des personnages féminins forts qui interpellaient beaucoup la future actrice en moi. J’aimais lire leur détresse, leur douleur, leur intensité et leur absence de compromis, pas parce que je voulais vivre ce qu’elles vivaient, mais parce que je voulais le jouer. »

La passion du polar
Quelques décennies plus tard, quand on demande à l’interprète qu’on a entre autres pu voir dans Like-moi! et L’échappée quels coups de cœur littéraires devraient être adaptés au petit écran, elle réfléchit de longues secondes avant de s’enflammer au sujet des romans poético-policiers de Roxanne Bouchard : Nous étions le sel de la mer, La mariée de corail, ainsi que Le murmure des hakapiks. « J’ai lu les deux premiers — le troisième m’attend tout près de mon lit — et je les trouve vraiment intéressants. J’imagine très bien les paysages de la Gaspésie dans la série et le volet policier dans un petit village avec une gang très colorée. Ces livres sont composés de personnages masculins forts et de beaux personnages féminins. J’adorerais jouer là-dedans! »

D’ici à ce qu’un scénariste ou un producteur capte sa proposition au vol, Marie-Soleil Dion continuera de dévorer les romans policiers et les suspenses qui sont, de loin, ses livres préférés. « J’aime essayer de deviner avant tout le monde ce qui va se passer et tenter de tout décortiquer avant qu’on nous fournisse la réponse. »

Polyvalence littéraire
Cela dit, quand on consulte la liste de ses titres préférés, on découvre une lectrice aux goûts variés. Elle nous parle d’abord avec tendresse de la pièce Ventre, écrite par Steve Gagnon. D’une part, parce qu’elle a participé à la création de l’œuvre sur les planches du Théâtre La Licorne il y a un peu plus de treize ans. D’autre part, surtout pour le propos. « C’est une pièce sur l’urgence d’être jeune, la folle envie de vivre et d’entrer dans les églises pour les déconstruire. En même temps, c’est une déclaration d’amour d’une personne qui s’excuse d’avoir trompé son chum. C’est cru et brut. » L’effet des mots de Gagnon la trouble encore aujourd’hui. « Je l’ai relue dernièrement et je trouve ça encore beau. Je suis fan de ce que Steve écrit et de la manière dont il pense. »

Des mots qui remuent. Des histoires qui émeuvent. Des livres qui marquent à jamais. Voilà ce qui interpelle celle qui anime depuis janvier dernier la quotidienne C’est humain sur les ondes de Télé-Québec. À titre d’exemple, elle évoque N’essuie jamais de larmes sans gants, le best-seller mondial écrit par le Suédois Jonas Gardell. « Ça m’a renversée complètement, dit-elle après avoir transformé un sacre en participe passé pour exprimer sa pensée. J’ai ressenti beaucoup de frustration et de compassion en lisant ce livre. C’est rare, un livre qui nous défait en le lisant. Il m’a habitée longtemps. »

Lire plus ou lire mieux
À chaque question qu’on lui lance, Marie-Soleil Dion répond avec un amour évident pour la littérature d’ici et d’ailleurs. Pourtant, elle considère qu’elle ne lit pas assez. « J’aimerais vraiment lire plus! Durant les fêtes, ma mère a passé les vacances dans notre bulle et je la voyais le nez dans son livre dès qu’elle avait une seconde. Moi, j’ai souvent le nez dans mon cell et ça me gosse. »

Si ses temps libres sont souvent consacrés à l’apprentissage de textes pour ses personnages et son rôle d’animatrice, elle peut, cet hiver, renouer avec sa passion pour les livres. « Présentement, j’alterne entre trois livres : un roman d’Agatha Christie, Femme forêt d’Anaïs Barbeau-Lavalette et Leur domaine de Jo Nesbø. Chaque fois que je plonge dans un livre, je me demande pourquoi je ne le fais pas plus souvent. Ça me fait décoller pas mal plus qu’une série télé. » Depuis la naissance de son fils, elle réfléchit de plus en plus à la place de la lecture dans sa vie. « Je veux qu’il aime lire et que ça participe à créer son imaginaire, alors c’est important qu’il me voie lire. »

Photo : © Andréanne Gauthier

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