On parle cette fois des mystères du chat, puis des dangers que les réseaux sociaux font peser sur la conversation démocratique.

Comme moi, aimez-vous les chats? Nous sommes nombreux à avoir cette piqûre et il y a d’excellentes raisons d’aimer ces chers félins. Le poète Jacques Prévert, qui en raffolait, aimait quant à lui dire qu’il n’y a pas de chat policier…

Miaou!
Leur mystère fait partie de leurs nombreux attraits et le beau livre du psychologue François Y. Doré, L’énigme du chat, vous aidera à en percer quelques-uns… et vous rappellera qu’il y en a d’autres qui ne sont toujours pas élucidés.

Ce livre, riche en informations superbement vulgarisées, est aussi à mes yeux un très bel exemple de la souhaitable mais trop rare rencontre de la culture scientifique et de la culture littéraire. Doré ponctue en effet le parcours auquel il nous convie de nombreuses et pertinentes références à des félins qu’on retrouve chez divers auteurs (par exemple, Lewis Carroll, Marcel Aymé, Hiro Arikawa), dans les grandes religions, sans oublier les mythologies égyptiennes, grecques, et romaines.

Il y a dans le monde quelque 600 millions de chats qui côtoient les humains. Doré raconte d’abord l’histoire de cette union, qui remonte au Néolithique, il y a donc 12 000 ans environ. Il explique aussi comment certains préjugés à l’endroit du chat (il serait par exemple impossible à dresser) tiennent à notre méconnaissance de sa nature et de ses habiletés. Heureusement, la recherche commence à les dévoiler.

Que sait-on à ce sujet? Doré consacre des chapitres entiers à rappeler ce que l’ingéniosité des chercheurs a permis d’apprendre sur la vision du chat; sur sa perception de l’espace, du temps, des objets; sur ce qu’il peut apprendre par conditionnement; sur sa mémoire; sur sa sociabilité.

Les derniers chapitres traitent de leur relation avec nous, les humains. On vous expliquera comment il y a moins de trente ans on a enfin compris comment le chat produit ce doux ronronnement que nous aimons tant; que le chat préfère les relations qu’il initie, et vous saurez alors pourquoi le vôtre semble aller plus volontiers vers des personnes félinophobes; et vous saurez, si vous ne l’avez pas vécu, qu’il existe une anxiété de séparation chez le chat en milieu familial et qu’elle se manifeste souvent par une miction dans le lit des maîtres de maison.

Amoureux des chats, voici un livre incontournable.

Le terrifiant tribunal des réseaux sociaux
Simon Jodoin est bien connu dans le monde des médias au Québec, notamment pour avoir été durant huit ans rédacteur en chef du magazine Voir et pour être chroniqueur à Radio-Canada. Ce qu’il nous propose avec Qui vivra par le like périra par le like ne laissera personne qui fréquente les réseaux sociaux indifférent — autrement dit, ce livre parlera à tout le monde, ou peu s’en faut.

Vous avez sans doute été témoin de ces graves dérives qui se produisent parfois dans ce monde numérique. C’est d’elles qu’il est ici question. Jodoin en parle à la première personne. C’est que, sans avoir rien fait de mal, il a été au tribunal des réseaux sociaux en étant accusé des pires crimes, cela pour avoir eu des liens professionnels ou d’amitié avec des gens accusés d’agressions et dénoncés entre autres sur une liste diffusée sur Facebook. Et ce tribunal, auquel jusque-là il n’avait pas voulu témoigner, l’a sans procès jugé coupable et condamné.

Ce que raconte Jodoin est terrifiant. Il vous fait comprendre, en la partageant avec vous, toute la gamme des fortes émotions qui le submergent durant des mois alors que son nom est cité, traîné dans la boue, quand une foule en colère se rue sur sa page Facebook pour l’insulter, le menacer, le calomnier, le vouer à la vindicte populaire. Et, horreur suprême, il vous raconte quand il a dû parler de tout ça avec sa jeune fille et la rassurer en lui disant qu’il n’avait bien entendu rien fait de ce dont on l’accuse.

Dans ce livre, Jodoin offre donc le vibrant et touchant récit de sa plongée en enfer et nomme tous les gens concernés. On apprend alors notamment comment certaines personnes qui l’ont accusé ne possédaient aucune information validée justifiant leurs attaques contre lui. Elles se sont retrouvées plus tard elles-mêmes accusées à ce tribunal, et cette fois, vérification faite, ces accusations ont quant à elles été fondées.

Mais en plus de ce récit, Jodoin ponctue son ouvrage de précieuses réflexions sur ce que signifie pour nous tous l’existence de ce tribunal, son mode de fonctionnement et les immenses périls qu’il fait peser sur nos vies et plus largement sur la conversation démocratique.

Ces réflexions ne peuvent que nous interpeller toutes et tous. On y apprend par exemple, avec horreur, que nombre de ses diffamateurs provenaient du monde des médias ou des communications, et étaient donc des personnes dont c’est le métier et la responsabilité sociale de vérifier des informations. Avec l’auteur, on réfléchit aux idées de justice et de vérité qui se mettent en place avec ces réseaux, avec tout ce qui s’y joue sur la vie privée, la réputation, la présomption d’innocence, valeurs mises à mal par ces tribunaux qui n’en sont pas. En bout de piste, Jodoin nous fait réfléchir à la relation que nous devrions avoir avec ce monde numérique où en quelques clics la calomnie prétend s’ériger en justice.

Voici donc une lecture aussi troublante que nécessaire. On peut même espérer qu’elle aidera à ce que le sens commun l’emporte sur les périls qu’elle dénonce.

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