Denis Vaugeois: La conquête du Nouveau Monde

9
Publicité

Trois ans après leur remarquable Champlain. La Naissance de l’Amérique française, les éditions du Septentrion publient La Mesure d’un continent. Atlas historique de l’Amérique du nord 1492-1814, de Raymonde Litalien, Jean-François Palomino et Denis Vaugeois. L’ouvrage a connu un accueil enthousiaste, tant de la part des médias que des libraires. La réponse du public n’a pas tardé à suivre et en décembre 2007, le premier tirage, qui se déclinait en trois présentations au contenu unique, soit l’édition courante, de prestige sur papier Mohawk et de luxe numérotée sous coffret, était épuisé.

Mais pourquoi offrir trois versions d’un même ouvrage? «Avant tout, explique Denis Vaugeois, un tirage de grande qualité est destiné au grand public. Par étapes, nous avons opté pour de la couleur à 100%, élargi le format pour assurer une meilleure mise en valeur des cartes (malgré une augmentation considérable des coûts) et retenu les à-plats dorés, un vernis de finition. De plus, compte tenu du sujet, nous avons voulu une édition anglaise. Pour qu’ » ils  » sachent! Troisièmement: nous avions comme modèle Les Océans de papier* de Le Carrer. Leur papier nous faisait rêver. On a décidé de procéder à un tirage de 1000 copies sur un papier semblable avec l’espoir que ce tirage intéresserait la Société du 400e, à Québec. Finalement, nous avons commercialisé ces exemplaires avec beaucoup de succès. Comme quoi, les beaux et bons livres ne sont pas menacés.»

Plus grand que nature
L’actualité autour du 400e anniversaire de la ville de Québec ramène La Mesure d’un continent sur les devants de la scène. Septentrion a refait un tirage du livre dans un format réduit de dix pour cent, le rendant ainsi accessible à ceux qui n’auraient pu se procurer la première édition, et une magnifique exposition intitulée «Ils ont cartographié l’Amérique», placée sous la houlette du commissariat du cartothécaire de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) et du coauteur de l’atlas historique, Jean-François Palomino, est en cours jusqu’au 24 août à la Grande Bibliothèque.

L’orchestration de La Mesure d’un continent a été rendue possible grâce à Raymonde Litalien, Jean-François Palomino et Denis Vaugeois. Ce dernier raconte comment il a fait la connaissance de Palomino: «Je l’ai rencontré en 1999, à Paris. Il étudiait et travaillait à la Bibliothèque nationale de France, et m’y a facilité la consultation de documents. Lorsqu’il est rentré au Québec, je l’ai fortement recommandé à Philippe Sauvageau, alors directeur de la Bibliothèque nationale du Québec. À son arrivée, Mme Lise Bissonnette a appuyé avec enthousiasme le projet en marche. Raymonde Litalien, quant à elle, a déjà publié au Septentrion un ouvrage sur les explorateurs de l’Amérique du Nord et a dirigé avec moi Champlain. La Naissance de l’Amérique française. Elle s’est ajoutée à l’équipe de rédaction et a été étroitement associée à toutes les étapes. Beaucoup de personnes ont également apporté leur contribution, notamment Edward Dahl, mon mentor en cartographie ancienne, avec qui j’ai publié Les Trésors des Archives nationales et Sphæræ Mundi».

Repousser les frontières
Le présent ouvrage est de la même eau. Plus qu’un simple atlas, il représente véritablement une riche illustration de la découverte, puis de la pénétration du continent. Sa lecture est aisée et fascinante, et chacun des auteurs y va de ses forces pour nous emmener dans cette aventure de nos origines. La carte et le texte, ici, sont en admirable symbiose. On sait que les motifs pour lesquels les monarchies européennes encourageaient les explorations étaient multiples. Les navigateurs et les cartographes — et certains portaient les deux chapeaux, notamment Champlain — servaient bien sûr la connaissance scientifique, mais aussi un dessein de propagande et de domination, voire de conquête. Plusieurs des cartes illustrant cet atlas vont bien au-delà du document et constituent de véritables œuvres d’art, montrant avec élégance, dans leur pourtour ou en cartouche, une ville, un mode de vie, une particularité du pays. Une bonne moitié d’entre elles sont issues de collections canadiennes, notamment celle de la BAnQ, bien sûr, mais aussi celles de l’université McGill, du musée Stewart et de Bibliothèque et Archives Canada, dans lesquelles ont puisé les auteurs. «Les collections sont très dispersées, précise Denis Vaugeois. La plus complète est à Ottawa, les plus riches sans doute en France et aux États-Unis. Il faut noter que notre approche relative à l’ensemble du continent nord-américain est inhabituelle; aucune institution n’a un tel mandat.»

La Mesure d’un continent couvre une période s’arrêtant en 1814 car, selon Vaugeois, «le fil conducteur était la recherche d’un passage vers la Chine. À partir des années 1806-1814, avec les synthèses de Clark et Thompson, on sait qu’il n’existe pas de voie navigable vers l’Asie: on a pris la  » mesure du continent « . Reste le passage de l’extrême Nord.»

Mais ceci est une autre histoire. Pour l’instant, les énergies de l’auteur et éditeur vont au 400e anniversaire de la fondation de Québec et à la publication, du tome V de L’Histoire populaire du Québec de Jacques Lacoursière. D’ici là, lisez avec plaisir La Mesure d’un continent et allez admirer les très belles cartes que nous présente la Grande Bibliothèque, à Montréal.

* Les Océans de papier (Glénat, 2006) est un luxueux ouvrage de grand format qui, en rassemblant une riche sélection de cartes marines, narre un pan de l’histoire mondiale.

Bibliographie :
La Mesure d’un continent, Denis Vaugeois, Jean-François Palomino et Raymonde Litalien (dir.), Septentrion, 300 p., 59$ Champlain. La Naissance de l’Amérique française, Denis Vaugeois et Raymonde Litalien (dir.), Septentrion, 400 p., 89$

Publicité