Pierrette Dubé

36
Publicité

Lauréate Prix Jeunesse des libraires 2015, catégorie 0-5 ans.

Entrevue réalisée par Les libraires en octobre 2015, pour son catalogue de Noël.

Selon vous, quel est le plus grand changement à s’être produit en littérature jeunesse depuis la parution de votre premier album, en 1988? Les thèmes, les lecteurs, l’offre, etc.?
C’est principalement l’offre qui a changé. À l’époque, peu de maisons d’édition publiaient des livres jeunesse, et encore moins des albums. Aujourd’hui, la production d’albums jeunesse a considérablement augmenté, et il faut s’en réjouir. Elle n’est pas seulement abondante, elle est aussi – et généralement – plus diversifiée qu’avant et de bonne qualité. Les albums québécois sont beaux et bons.

Mais cette production accrue a aussi des effets pervers. Comme le public lecteur, lui, ne s’est pas élargi, il se vend moins d’exemplaires de chacun des livres publiés, et il est donc de plus en plus difficile pour les créateurs de vivre de leur travail. Cela dit, nous pouvons être fiers de ce qui se fait ici. Les éditeurs jeunesse sont souvent moins frileux que certains de leurs homologues étrangers et ils laissent une grande liberté aux créateurs. Les petits lecteurs, eux, n’ont pas vraiment changé : ils veulent une bonne histoire qui les touche, les étonne ou les amuse. Il y a des livres que je lisais autrefois à mes enfants et qui, aujourd’hui, intéressent tout autant mes petits-enfants.

Rosie, la petite truie, surpasse ses limites et réalise ses rêves, ce qui permet de croire qu’elle a une forte estime de soi. Trouvez-vous que l’estime de soi des enfants d’aujourd’hui est particulièrement fragilisée par la pression et les codes sociaux actuels?
Les enfants d’aujourd’hui subissent peut-être un peu plus de pression que ceux d’autrefois, car on a souvent des attentes très élevées à leur endroit. On leur demande déjà d’être performants et on laisse de moins en moins de place au jeu libre, à la rêverie et même à l’ennui. Mais contrairement à certaines idées reçues, l’enfance n’est pas et n’a jamais été une période paradisiaque, car ce n’est pas toujours facile d’être un enfant. Heureusement, la lecture a le même effet sur les enfants que sur les adultes : elle aide à vivre. Si Rosie a fait rire ou sourire un seul enfant et lui a fait comprendre que ce n’est pas grave d’être parfois maladroit et de faire des erreurs, elle n’a pas perdu son temps…

Au fait, pourquoi une truie?
J’ai choisi une petite truie comme personnage parce que c’est un animal qui donne une impression de vitalité, de joie de vivre et d’insouciance, et aussi, sans doute, parce qu’une petite truie à vélo, c’est un peu déconcertant. Je dois avouer, toutefois, que je n’ai pas une connaissance intime des petites truies… Lorsque j’ai écrit, en m’improvisant spécialiste de la psychologie porcine, « jouer, manger, dormir, la petite truie ne désirait rien de plus », il m’a semblé que cette affirmation pouvait s’appliquer à beaucoup d’enfants de cinq ou six ans. Lorsqu’on demande aux enfants de cet âge ce qu’ils aiment faire par-dessus tout, beaucoup répondent « jouer » ou « manger ». Il est possible que j’aie ajouté « dormir », parce que, moi, j’aime bien dormir.

Si, pour Noël, vous aviez la chance d’offrir un livre à Rosie, lequel serait-ce?
Je crois que je lui offrirais Confisqué!, un album écrit par Carole Tremblay et illustré par Isabelle Malenfant (Les 400 Coups). Je suis sûre que cet album pourrait à la fois effrayer et amuser Rosie. C’est une combinaison gagnante! Peut-être que je tricherais un peu et que j’ajouterais un deuxième livre dans le paquet-cadeau : Monsieur Tralalère, écrit par Nathalie Ferraris et illustré par Josée Bisaillon (Fonfon). Rosie ne pourrait pas résister à ce sympathique facteur de Postes Tralala.

Publicité