Simon Roy : La vie en rouge

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À 10 ans, Simon Roy a vu le film The Shining, adapté du roman de Stephen King et réalisé par l’iconique Stanley Kubrick. Trente ans plus tard, l’œuvre culte continue d’être présente dans le quotidien de cet enseignant de littérature au Collège Lionel-Groulx. Avec Ma vie rouge Kubrick, son premier livre, Roy rend un hommage senti à Kubrick. En parallèle, il plonge dans son historique familial, marche sur les traces de sa mère et dissèque ses démons.

Ce dérangeant témoignage – la forme rappelle la trilogie « 1984 » d’Éric Plamondon – est une immersion troublante dans la folie et la perte de contrôle. King l’a imaginée. Kubrick l’a mise en scène. Simon Roy l’a côtoyée. Leurs histoires respectives se croisent, s’entrechoquent. La tuerie à l’école primaire Sandy Hook – vingt-sept personnes furent tuées par un désaxé – a convaincu Roy de prendre la plume : « Depuis plusieurs années, l’idée de décortiquer l’œuvre de Kubrick me trottait dans la tête. Au retour de la grève étudiante de 2012, j’ai commencé à y travailler. Au début, j’écrivais sans envisager une publication. C’était pratiquement secret. Je descendais au sous-sol et je m’installais avec mon ordinateur. Même ma blonde pensait que je chattais avec d’autres femmes. »

Après avoir écrit quatre-vingt-quatre courts chapitres sur Kubrick, ce réalisateur perfectionniste qui a marqué son imaginaire et qu’il aime utiliser pour accrocher ses étudiants dans ses cours de lettres, Simon Roy envoie son manuscrit à certains éditeurs. Le chroniqueur Robert Lévesque, qui dirige la collection « Liberté grande » chez Boréal, aime : « Mais il trouvait le projet un peu geek. Il me parlait de trouver une morale philosophique. » Au final, Roy en charcute les deux tiers et incorpore des touches de son histoire personnelle, consacrant  une large place au parcours de sa mère récemment décédée. La confrontation entre la fiction (Kubrick) et la réalité (sa vie) touche la cible.

Roy n’est pas préoccupé par le fait de se dévoiler ainsi. « À rebours, je réalise que ce livre a été une façon de ne pas laisser ma mère complètement. Je voulais rester avec elle, prolonger notre histoire commune. » En sort-il apaisé? « Oui, ça apporte une certaine paix, même si je n’en suis pas toujours conscient. Mais la porte ne sera jamais complètement fermée… »

 

Photo : © Catherine Fontaine

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