L’été se termine, mais il flotte dans la cour le reste des fous rires partagés, les traces des batailles d’eau des enfants, les piquets des tentes qui ont été construites pour passer les nuits à la belle étoile avec les copains. Un été qui a été rempli d’amis… Et pour le faire durer, je me suis plongée dans « La clique du camp », un livre qui respire l’amitié et l’entraide et qui a été écrit non pas à deux ou à quatre mains, mais bien à huit mains. 

François Gravel, Johanne Mercier, Alain M. Bergeron et Martine Latulippe sont des auteurs chevronnés de littérature jeunesse et, s’ils écrivent chacun de leur propre côté depuis plus de vingt ans, voici maintenant quatre ans qu’ils se sont lancés dans une aventure commune, d’abord avec la série « La bande des quatre », qui met en scène des personnages d’adolescents, et puis maintenant dans « La clique du camp », avec des enfants. On reste autour du thème des camps d’été, mais ici s’ajoute une touche de mystère grâce à l’intrigue concoctée par les moniteurs : en effet, l’un d’eux devient le « fantôme » et joue de vilains tours aux campeurs. Le but de l’équipe formée par Lou, Jules, Jade et Cédric est donc de découvrir le responsable.

« C’est très inspirant de tenter ainsi une nouvelle façon de travailler, très rafraîchissant de sortir un peu de notre confort, indique Martine Latulippe. On ne sait jamais vers quoi l’imagination des autres va nous guider. On commence chacun l’histoire avec une idée en tête, et soudain la proposition d’un des trois autres fait tout basculer et on doit s’adapter. »

Ce plaisir qu’ils ont à écrire se ressent lors de la lecture, alors que de nombreux rebondissements parsèment les pages. Par ailleurs, ce qui est chouette et distingue le livre, c’est qu’au fil du récit, on découvre « quatre humours différents, quatre tons, quatre imaginaires », ce qui permet aux jeunes lecteurs de se reconnaître plus facilement en l’un d’eux tout en s’amusant des quêtes de chacun.

Chez Sarbacane, c’est un duo dans des rôles plus connus, auteur et illustrateur, qui a publié cet été l’extraordinaire Violette Hurlevent, un récit de l’imaginaire à grand déploiement.

« Elle savait que le Jardin sauvage existait depuis bien longtemps ; au cours des siècles, il s’était développé, avait trouvé son équilibre… D’autres gens qu’elle y avaient déjà vécu des aventures, l’avaient parcouru, exploré et modifié. À chaque changement de visiteur, son histoire évoluait, comme un spectacle qui évolue avec l’arrivée de nouveaux spectateurs. Non, pas des spectateurs : des comédiens. Elle était la Protectrice, et son rôle, c’était de faire que le spectacle ne tourne pas à la catastrophe.
— Pour le moment, c’est plutôt mal parti, soupira-t-elle. »

C’est d’abord pour fuir l’arrivée de son père dans cette nouvelle maison qu’elle n’aime pas que Violette, du haut de ses 10 ans, s’enfuit dans le jardin… et découvre une forêt extraordinaire qui est cachée aux autres humains, mais qui s’éveille en sa présence. Rencontrant des loups, des bonhommes de pierre, des sapins vengeurs et d’autres créatures imaginaires, Violette apprend qu’elle est la nouvelle Protectrice de ce jardin qui, malgré sa beauté, recèle aussi de nombreux dangers. Avec Pavel, son chien et fidèle destrier, ainsi qu’avec l’aide des complices qu’elle rencontre en cours de route, Violette devra accomplir différentes quêtes et faire confiance à son intuition pour vaincre de nombreux périls.

Mettant le courage, l’intelligence, l’entraide et l’amitié de l’avant, ce récit d’aventures est un véritable joyau. Dès que le chien, Pavel, se met à parler en entrant dans le jardin et que Violette ne semble pas plus surprise (d’ailleurs, elle lui demande de la vouvoyer puisqu’elle a toujours rêvé qu’on s’adresse ainsi à elle), dès que les premiers personnages du jardin font leur apparition, on tombe sous le charme de cette œuvre qui a un petit goût de Tobie Lolness et bénéficie des magnifiques illustrations à l’encre de Jean-Baptiste Bourgois.

Par ailleurs, toute la genèse de ce livre est aussi intéressante, parce que l’illustrateur et l’auteur ont travaillé ensemble : le premier a d’abord esquissé les personnages et les décors et le deuxième les a ensuite utilisés pour tisser le récit qui révèle une écriture maîtrisée, une véritable voix littéraire. Cet univers imaginaire foisonnant du jardin est déjà fascinant en lui-même, mais il fait aussi écho à la réalité de Violette, ce qu’elle vit dans la forêt étant lié à son milieu familial, pour le moins perturbé.

À La courte échelle, le duo formé par André Marois et Cyril Doisneau parle aussi d’amitié, cette fois entre garçons, dans un récit qui fait durer l’été un peu dans nos têtes : Les héros de la canicule.

Chez Étienne et son frère, il n’y a pas de climatiseur, juste des ventilateurs qui « brassent de l’air chaud ». Heureusement qu’il y a la piscine du quartier, où le plus jeune retrouve ses amis. Mais quand celle-ci ferme durant la pire journée de la canicule à cause des risques d’orage, c’est la catastrophe. Comment se rafraîchir alors même que le bitume est en train de fondre? Qu’à cela ne tienne! Étienne est reconnu pour ses bonnes idées et c’est ainsi qu’il suggère à ses amis de se rendre à la crèmerie en évitant les « rayons de la mort » du soleil, imagine une solution pour le moins originale pour ramasser assez de sous pour que chacun puisse se payer une crème glacée molle, puis entraîne ses copains dans la ruelle pour une (épique) bataille d’eau.

Tout l’esprit de l’enfance se retrouve dans ce roman illustré, mais aussi celui bien typique de la vie en ville, plus particulièrement de Montréal et la courtepointe de ses ruelles. C’est une lecture qui donne des idées pour survivre à l’été indien qui approche, mais qui fait aussi durer l’été, ses fous rires et ses idées folles encore un peu.

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