Gilles Vigneault : Les Chemins de pieds

6
Publicité
Les Chemins de pieds, ce sont ces petites routes tracées par le passage répété des hommes, des sentiers parcourus lentement dans l'errance et la rêverie. Dans ce dernier recueil, Gilles Vigneault propose un retour à l'essentiel, que la vitesse du quotidien a éloigné de nous : « Les Chemins de pieds, c'est une façon d'arriver lentement chez vous », explique le poète de Natashquan. Ces routes, continue-t-il, « ce sont les véritables lignes de la main d'un village ; des chemins construits très lentement par les pas de ceux qui sont passés ; des chemins qui donnent l'occasion de se rendre quelque part. »

Réunissant des textes divers, Les Chemins de pieds comprend des anecdotes, des souvenirs d’enfance, des pensées, des pages de journal de bord, des petits poèmes, des notes de musique. Selon Vigneault, on y perçoit aussi la présence l’enfant qui, prétend-on souvent, « sommeille en nous, mais qui, en réalité, ne dort pas, ne dort jamais, et qui attend simplement que l’on s’éveille pour faire attention à ce qu’il dit, à ce qu’il pense, à ce qu’il souhaite, à ce qu’il est… » De la nostalgie, oui, il y a en dans certains textes, résolument tournés vers le passé, mais il faut aussi compter avec d’autres écrits, qui projettent le lecteur vers le futur. Ainsi, à l’instar des routes terreuses qui se dessinent aux pieds de l’homme, ce recueil « donne à celui qui le parcourt l’occasion de remarquer une racine ou un caillou, de voir passer un oiseau, un renard. » Sur ces sentiers imaginaires, renchérit le poète, on peut « buter sur un caillou ou une racine, et même tomber. Mais on ne se fait pas mal ; ce sont des chemins qui permettent de penser, de réfléchir à ce qu’on est en train de faire, au temps qu’on est en train de parcourir. » Aujourd’hui, on va très vite en pensant à ce qu’on va faire bientôt, et cette attitude chagrine le poète. Les questions se bousculent : pour en arriver à tenir un tel discours, Gilles Vigneault serait-il allé trop vite à un moment de sa vie ? : « Cela m’est arrivé, comme à tout le monde et, quelquefois, j’ai dit des sottises pour éviter de passer lentement par les chemins en question. Je m’en suis aperçu, ou on me l’a fait remarquer, et j’ai essayé d’apporter quelques corrections à mon action », répond-il avec franchise. Entre L’Armoire des jours, paru en 1998, et ce récent ouvrage, six ans se sont écoulés. Vigneault explique ce long mutisme littéraire de façon simple : « Tant qu’on n’a pas assez de matériaux pour faire une table, il faut attendre. » Voilà qui est bien dit! En somme, Les Chemins de pieds, véritable éloge de la lenteur, est une œuvre à l’image de l’être pensif qui le signe, un livre qui « est un peu comme la mémoire, qui joue avec ses blocs pour construire l’avenir, et qu’on appellera, plus tard, l’imagination. »

Publicité