Gaston Miron, qui êtes-vous ?

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Il va sans dire que le demi-siècle de l'Hexagone est un moment tout indiqué pour célébrer le monumental legs de Gaston Miron (1928-1995), qui en fut l'un des fondateurs et l'âme. Ça tombe bien : trois récentes publications nous y incitent justement.

Découvrir Miron

« De tous les poètes québécois, Gaston Miron est sans doute le plus connu et le plus aimé en France. Une association, les Amis de Gaston Miron, regroupe des poètes et des écrivains de l’Hexagone (je parle ici de la bien nommée patrie des rigueurs formelles…) qui lui vouent par-delà la mort un culte véritablement amical et qui perpétuent sa mémoire.» À elles seules, ces phrases de la préface d’André Brochu à Gaston Miron : Le forcené magnifique suffisent pour nous faire comprendre pourquoi et comment Yannick Gasquy-Resch, professeure à Aix-en-Provence et à la Sorbonne, en est venue à consacrer ce sympathique ouvrage au regretté poète québécois.

Étiqueté « essai biographique», le livre de Mme Gasquy-Resch propose une introduction à la vie et l’œuvre de ce monument de nos lettres. Sans doute cette vocation explique-t-elle en partie le caractère anecdotique du livre, manifestement destiné à un lectorat profane et, qui plus est, pas forcément d’ici (d’où le glossaire en annexe). Certes, celui qui connaît déjà Miron, le chantre du pays, l’éditeur et le militant, n’apprendra pas grand-chose ici, mais le néophyte y trouvera son compte. Sensible à la poésie de Miron, Mme Gasquy-Resch en expose avec rigueur et clarté la force inépuisable.

Une jeunesse en poésie

Moins anecdotique et plus ciblé, Jeunesse et poésie de Christine Tellier s’attarde surtout aux années de formation de Gaston Miron. Pour la rédaction de cette biographie intellectuelle, l’auteure a non seulement consulté de nombreux documents d’archives, mais est allée recueillir le témoignage des survivants de l’époque, premiers compagnons d’armes du poète. Entendons-nous : on ne lira cependant pas ce livre pour découvrir des détails inédits et des révélations croustillantes, mais plutôt pour constater à quel point cette période qui s’étend de l’enfance à la publication du premier recueil, Deux sangs (cosigné avec Olivier Marchand), fut d’une importance capitale dans le développement du futur poète national.

Miron a un jour déclaré que le scoutisme et les mouvements de jeunesse catholique auxquels il a appartenu (l’Ordre du Bon Temps, le Clan Saint-Jacques, l’Action catholique) avaient été son université. Par la bande, Christine Tellier en profite pour avancer une thèse bien personnelle mais difficilement contestable, selon laquelle Gaston Miron et ses collègues de l’Hexagone comptent parmi les instigateurs non négligeables de ce qu’on appellerait la Révolution tranquille.

Au-delà de L’Homme rapaillé

Enfin, pour mieux connaître l’homme et l’œuvre, rien ne vaut la lecture de celle-ci à proprement parler. Lancé ce printemps, le recueil Poèmes épars rassemble pour la première fois des poèmes publiés par Miron entre 1947 et son décès dans des revues et anthologies, dans une édition établie par Pierre Nepveu et Marie-Andrée Beaudet. Hantés par les thèmes de prédilection usuels (la « marche » de la femme idéale, l’angoisse devant l’inconnu, l’obsession du pays et de l’héritage), ces textes renouvellent et prolongent ceux de L’Homme rapaillé, sans jamais en épuiser la valeur. Publié simultanément en éditions courante et de luxe à tirage limité, Poèmes épars est le premier volet d’une série de publications posthumes qui viendront compléter le portrait de l’inoubliable Miron.

En guise d’accompagnement

Signalons enfin que L’Hexagone a également fait paraître, sous la direction de Cécile Cloutier, Michel Lord et Ben-Z. Shek, Miron ou La Marche à l’amour, actes d’un colloque portant le même titre et tenu à l’université de Toronto il y a six ans. L’ouvrage rassemble donc les conférences de plusieurs spécialistes de l’œuvre mironienne, universitaires, poètes ou écrivains dont Marie-Andrée Beaudet, Dominique Noguez et Yves Préfontaine.

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