Prix jeunesse des libraires 2014 : finalistes 6-11 ans

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Pour la troisième année du Prix jeunesse des libraires du Québec , neuf livres québécois ont su charmer le cœur du comité de sélection. En attendant que tous les libraires du Québec votent sur leur coup de cœur, nous vous proposons une petite intrusion chez les auteurs finalistes grâce à de courtes entrevues. Vous n’avez pas encore lu ces albums ou romans? Hâtez-vous! Ci-dessous, les finalistes de la catégorie 6-11 ans. 

 

Edgar Paillettes

Simon Boulerice, Québec Amérique

 

Crédits photo Marie-Soleil Dion-Bouchard

Edgar Paillettes, c’est l’histoire d’Henri, le grand frère d’Edgar le flamboyant, Edgar l’excentrique. En fait, Henri doit composer avec un petit frère qui, en plus de parler en faisant des poèmes ou des rimes, se costume différemment chaque matin. Parfois, il est un cowboy, parfois, une jolie fée. Il est drôle Edgar… Mais Henri, qui adore pourtant son petit frère, aimerait parfois que ses parents – voire la Fée des dents! – lui accorde le même intérêt, les mêmes droits. Comment Henri pourra-t-il montrer à tous que, lui aussi, il est spécial? Un roman touchant, avec tout ce qu’il y a d’étoiles dans la plume de Boulerice pour le rendre tendrement coloré!

 

Quelques questions à Simon Boulerice :

Le personnage d’Edgar en est un haut en couleur, et c’est peu dire. On dit qu’il serait inspiré d’un vrai petit garçon que vous auriez rencontré. Qui était-il? Et quelles sont les différences entre lui et le Edgar Paillettes inventé pour le roman? A-t-il lu/aimé le roman!?
En février 2013, j’étais en tournée avec un solo de théâtre jeunesse dans le nord de la France. Une metteure en scène qui  montait un de mes textes (Éric n’est pas beau) avec des enfants a su que j’étais de passage dans sa ville, et a pensé m’inviter à un enchaînement. En chemin, elle m’a prévenu: dans ce groupe se trouvait Edgar Demagondeau, un petit garçon unique qui se costumait tous les jours pour se rendre à son atelier. Ce matin-là, Edgar était un cowboy. La première question qu’il m’a posée a été: « Vous aimez la paillette? » J’ai eu un coup de foudre pour son absence de censure. Quand la metteure en scène m’a dit qu’elle croyait que ses amis d’atelier l’enviaient secrètement de vivre un petit Halloween à tous les jours, j’ai su que j’allais m’inspirer d’Edgar pour une histoire. Avec son accord, j’ai écrit sur lui à partir de cette première rencontre. Quand je l’ai revu, en février 2014, un an plus tard, c’était pour lui remettre le roman. Roman qui l’a rendu très fier, même si tout y était inventé. La flamboyance du vrai petit Edgar a simplement coloré celle de mon petit Edgar.

 

La fée des dents, qui voyage en passant par les garde-robes des enfants, est d’une originalité frappante! Pourquoi avoir choisi d’intégrer à ce roman, en l’apparence très réaliste, cette touche de fantaisie? Et… d’où est venue l’idée de choisir les garde-robes comme passage pour la jolie fée!
Mon réalisme a l’heureuse habitude de déraper, peu importe le lectorat auquel je m’adresse. Dans Edgar Paillettes, ça dérape effectivement dans la fantaisie, par le biais de la fée des dents, un personnage hissé haut dans le panthéon de la mythologie de mon enfance. Elle m’a toujours passionné bien plus que le Père Noël. Si ce dernier a le loisir de réussir des entrées fracassantes via les cheminées de maison, je ne vois pas pourquoi ma fée n’aurait pas l’honneur d’émerger théâtralement du placard! D’autant plus que pour Edgar, sa garde-robe, c’est un lieu mythique où reposent tous ses costumes et sa féerie.

 

Ce roman fait l’éloge de l’excentricité, mais également du besoin d’être tout simplement soi-même. En quoi la différence et la conformité sont des terrains inspirants pour l’écrivain que vous êtes? 
Je navigue moi-même constamment entre les deux. Je suis unique comme Edgar et banal comme Henri (le frère narrateur de l’histoire). Je connais bien les états de mes protagonistes. J’ai été un enfant qui a emmagasiné timidement son excentricité pendant des années, avant de la faire éclater à 17 ans, quand je suis débarqué à Montréal. J’étais un garçon foncièrement flamboyant qui se censurait. Écrire Edgar Paillettes est certainement une manière de vivre à retardement mon excentricité juvénile. Par procuration, j’ai le sentiment d’être en paix avec toutes les fois où j’ai accepté de demeurer dans l’ombre, pour ne pas faire un fou de moi. Et j’ai surtout envie que mes jeunes lecteurs se disent qu’on a toujours peu à perdre à être totalement soi-même.

Pour approfondir :

Une entrevue avec Simon Boulerice, lors de la parution de ses précédents romans : c’est ici!

 

Qu’est-ce qui fait courir Mamadi

Étienne Poirier, Soleil de Minuit

  

Mamadi est un grand rêveur. Et malgré les embûches qui se dressent sur son passage, malgré les épreuves difficiles, il continue de garder espoir, de courir, encore et toujours. Qu’est-ce qui fait courir Mamadi déborde de vie, mais surtout, de courage! L’auteur, Étienne Poirier, habite Trois-Rivières et enseigne à Manawan, une communauté atikamekw de Lanaudière.

 

Quelques questions à Étienne Poirier :

Ce roman, bien qu’écrit avec euphémismes, espoir et beaucoup de doigté, traite néanmoins de sujets difficiles : pillage de village, enlèvements, reconstruction… En quoi est-il important selon vous de parler de telles réalités dans la littérature jeunesse? Pourquoi avoir choisi ce sujet en particulier pour votre quatrième ouvrage?
Qu’est-ce qui fait courir Mamadi? est d’abord un roman sur la perte et la reconstruction. Je ne souhaitais pas mettre en scène la misère, mais la vie. Je voulais explorer le thème de la résilience chez les enfants bien davantage que celui des atrocités qui la rendent nécessaire. Mais, pour ce faire, il fallait des images fortes qui frappent l’imaginaire. C’est là que la guerre et les camps se sont imposés. Je pense, en outre, que la littérature, qu’elle soit de jeunesse ou non, est ce territoire où toutes les explorations sont permises. Les livres, ceux que j’aime du moins, sont un merveilleux terrain de rencontre de l’autre et de construction de soi. En témoignant de la force de Mamadi, j’ai voulu la communiquer aux jeunes lecteurs, mais également l’expérimenter moi-même au fil de l’écriture.

 

Qu’avez-vous le plus apprécié dans l’écriture de l’histoire de Mamadi?
Je voulais un livre qui se lise d’un seul souffle, que sa lecture soit rapide et soutenue un peu à l’image d’une course de fond. Mais comme plusieurs passages devaient mettre en scène l’attente et la langueur, cela représentait un certain défi d’originalité formelle. Ainsi, de nombreuses images me sont apparues et j’ai pris beaucoup de plaisir à jouer avec elles et à les exploiter. J’aime bien le ton qui se dégage du texte.

 

Qu’est-ce qui fait courir Mamadi est en lice au Prix jeunesse des libraires du Québec, mais il le fut également pour le prix Hackmatack et celui Prix des nouvelles voix de la littérature. En tant qu’auteur, qu’est-ce que ça vous fait d’avoir une telle reconnaissance? Ça vous pousse à continuer, ou ça vous met de la pression pour les prochains!?
Je sais pertinemment que tous mes livres ne recevront pas un tel accueil, alors je profite du moment! En écrivant, je ne songe jamais à la réception que le texte pourrait avoir, je me mets déjà suffisamment de pression! Je ne pense pas en termes de public ou de lecteur à atteindre. Je me concentre sur le livre auquel je travaille, sans plus. La reconnaissance du milieu, c’est celle que mérite le livre, pas moi. Ça me flatte et ça m’encourage à continuer, bien sûr…  En fait, ça me permet de croire davantage à ma démarche, ça ne m’étouffe pas.

 

La plus grosse poutine du monde

Andrée Poulin, Bayard Canada

Crédits photo Mélanie Provencher

Le projet « Prodigieuse Poutine » est audacieux : si, en apparence, il semble avoir comme objectif d’être inscrit dans le livre Guinness des records sous l’onglet « La plus grosse poutine du monde », il a également comme but, pour le jeune Thomas, de retrouver sa mère. Grâce à la visibilité que lui donnera cette confection grandiose, il espère que sa mère, qui l’a quitté il y a près de dix ans sans explication aucune, revienne vers lui. Aidé de son équipe de soccer, il mettra son plan à l’œuvre!

 

Quelques questions à Andrée Poulin :

Malgré le sujet en apparence rigolo (une poutine de 650 kilos), le roman effleure des thèmes difficiles : le départ de la mère dysfonctionnelle et le gouffre de distance entre le père et le fils. L’idée de cette poutine énorme est-elle une façon pour vous, l’auteure, de justement aborder des thématiques plus lourdes tout en continuant à divertir les jeunes?
En fait, quand j’ai commencé à écrire ce roman pour la collection Zèbre, mon idée était d’en faire une histoire drôle. Une aventure bourrée de péripéties rigolotes sur comment un ado arrive à faire une poutine géante. Mais l’intrigue a dérapé dans une direction inattendue et s’est mise à flirter avec le drame plutôt qu’avec l’humour. C’est ce qui est un peu à la fois déroutant et magique, stressant et fabuleux de la création : on ne sait jamais vers quoi on vogue.

 

La collection « Zèbre » dans laquelle est publié votre roman s’adresse aux lecteurs moins avancés, à ceux pour qui la lecture n’est pas nécessairement un loisir. En quoi cela a-t-il modifié votre écriture en cours de rédaction? Avez-vous pris plaisir à vous adresser à un tel public?
Au départ, je savais que la collection « Zèbre » visait un public bien précis. Mais cela n’a aucunement entravé mon écriture. Je me suis dit : je vais pondre l’histoire la plus accrocheuse possible et tâcher de faire en sorte que les jeunes (autant les lecteurs passionnés que les lecteurs récalcitrants) aient envie de plonger dans le récit et d’y rester jusqu’à la fin. Ceci dit, j’ai eu un vif plaisir à varier les types de narration pour ce roman: textos, courriels, dialogues et narration au « je ».

 

Le livre des records Guinness fascine depuis des années de multiples générations. Pourquoi avoir choisi ce record en particulier, de la plus grosse poutine du monde? Jeune, avez-vous également rêvé de figurer de livre des records, comme votre personnage?
Depuis une dizaine d’années, je fais beaucoup d’animations scolaires en tant qu’auteure et ça me fascine toujours de voir à quel point les jeunes sont captivés par Le livre des records Guinness. L’idée de faire un record autour de la poutine m’a été inspirée par une vidéo sur YouTube d’une école secondaire du Saguenay (par ici pour voir la vidéo en question!). Une équipe de profs et des élèves avaient avait tenté de réaliser un record semblable. J’ai découvert sur le tard le livre des records Guinness, mais petite fille, je rêvais de briser des records olympiques, notamment en sauts de ski, que j’admirais beaucoup. Le plus drôle, c’est que je n’avais rien d’une sportive. Je me suis consolée en devenant une athlète de la plume…

 

Pour découvrir les entrevues avec les finalistes 12-17 ans, c’est par ici: 

http://revue.leslibraires.ca/articles/litterature-jeunesse/prix-jeunesse-des-libraires-2014-finalistes-12-17-ans

 

 

 

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