12 coups de cœur de l’équipe Les libraires pour le 12 août

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Le choix ne s’est pas fait sans douleur, mais l’équipe des Libraires s’est quand même prêtée avec joie à l’exercice de choisir deux, et seulement deux, titres québécois tant aimés. Évidemment, chacun de nous a plus de deux coups de cœur québécois en mémoire. Disons alors qu’il s’agit de deux livres parmi nos nombreux préférés. Et comme c’est le rôle et le plaisir du libraire de conseiller les personnes en mal de lecture, libre à vous de vous laisser inspirer. Voici ce que ça donne.

Les coups de cœur de Cynthia

Les deuxièmes, Zviane (Pow Pow)

EXTRAIT: « Notre relation est parfaite, justement parce qu’on est un sandwich de bord d’autoroute l’un pour l’autre. T’es rien d’autre pour moi, qu’un superbe, un sublime, un incroyable sandwich, le sandwich du meilleur roadtrip ever. C’est spécifiquement ça la beauté de notre relation : je serai toujours ton numéro deux. »

Hongrie-Hollywood Express, Éric Plamondon (Le Quartanier)

EXTRAIT: « Je viens d’avoir quarante ans et les questions que je me posais à vingt ans sont encore brûlantes, non tranchées, non résolues. J’ai eu de l’acné, je suis allé à l’université, j’ai eu du cul, je me suis marié, je me suis drogué, j’ai voyagé, j’ai fait du sport, j’ai lu les journaux, j’ai dit «bonjour », j’ai dit «oui, merci », j’ai été président de classe, j’ai été employé du mois, j’ai milité pour ci et j’ai milité pour ça. »

Les coups de cœur de Daniel

Arvida, Samuel Archibald (Le Quartanier/Boréal compact)

EXTRAIT: « L’Amérique est une mauvaise idée qui a fait du chemin. C’est ce que j’ai toujours pensé et ce n’est même pas une image. J’aurais dû dire : l’Amérique est une mauvaise idée qui a fait beaucoup de chemins. Une idée qui a produit des routes interminables qui ne mènent e part, des routes coulées en asphalte ou tapées sur la terre, dessinées avec du gravier et du sable, et tu peux rouler dessus pendant des heures pour trouver à l’autre bout à peu près rien, un tas de bois, de tôle et de briques, et un vieux bonhomme planté debout en travers du chemin qui te demande : — Veux-tu bin me dire qu’est-ce que tu viens faire par icitte ? »

Il pleuvait des oiseaux, Jocelyne Saucier (XYZ)

EXTRAIT: « Où il sera question de grands disparus, d’un pacte de mort qui donne son sel à la vie, du puissant appel de la forêt et de l’amour qui donne aussi son prix à la vie. L’histoire est peu probable, mais puisqu’il y a eu des témoins, il ne faut pas refuser d’y croire. On se priverait de ces ailleurs improbables qui donnent asile à des êtres uniques. L’histoire est celle de trois vieillards qui ont choisi de disparaître en forêt. Trois êtres épris de liberté. »

Les choix de Dominique

La petite fille qui aimait trop les allumettes, Gaétan Soucy (Boréal)

EXTRAIT: « Nous avons dû prendre l’univers en main mon frère et moi car un matin peu avant l’aube papa rendit l’âme sans crier gare. Sa dépouille crispée dans une douleur dont il ne restait plus que l’écorce, ses décrets si subitement tombés en poussière, tout ça gisait dans la chambre de l’étage d’où papa nous commandait tout, la veille encore. »

La héronnière, Lise Tremblay (Leméac/Actes Sud)

EXTRAIT: « Depuis, j’ai appris à mes dépens que la seule règle du village était le mensonge. Tout le monde sait tout et tout le monde fait semblant de l’ignorer. »

Les coups de cœur d’Isabelle

Le monde sur le flanc de la truite, Robert Lalonde (Boréal)

EXTRAIT: « Le monde aperçu dans l’eau, ou sur le côté de la truite. Du coin de l’œil, je l’aperçois, et les mots viennent, tranquillement, un à un, ils descendent dans le grand lac de ciel que j’ai alors dans la tête. »

Recommencements, Hélène Dorion (Druide)

EXTRAIT: « Durant cet après-midi de profonde intimité où je suis allée conduire ma mère vers sa mort, j’ai touché au plus grand dénuement, à ce très peu auquel nous tenons véritablement, lorsqu’un fil casse. Dans cette chambre blanche où une fenêtre donnait sur les montagnes, je ne pouvais rien retenir: ni son souffle qui s’épuisait, ni les gestes ni les paroles que nous avions partagés; un fleuve emportait à mesure ce qui appartenait au temps. »

Les choix de Josée-Anne

La brèche, Marie-Sissi Labrèche (Boréal)

EXTRAIT: « Une semaine déjà, une semaine entre ça et l’hôtel, ça va vite, mais pas assez vite, car je suis encore son étudiante, il peut corriger ma peau avec son crayon rouge, il peut écrire C’est bien ou Ce n’est pas bien, il peut aussi écrire Je veux te revoir ou Je ne veux plus te revoir. Je ne veux pas que ça arrive, la pilule serait trop dure à avaler, parce que j’ai été moi-même devant lui, j’ai arraché mes couches de maquillage devant lui, il a décoché un regard de côté et m’a vue, un petit clown sans nez rouge. »

Ventre, Steve Gagnon (L’instant même)

EXTRAIT:
« LUI
J’ai failli tout détruire.
ELLE
C’était un vendredi, hein, c’est ça, vendredi. Soir.
LUI
Quand je suis rentré chez nous.
ELLE
I’ était. J’ pense qu’i’ était entre huit pis neuf heures
LUI
Chez nous rempli de toutes tes osties de bébelles qui traînent tout l’ temps.
ELLE parce que j’ finissais d’ travailler à huit pis j’ te rejoignais chez tes parents à neuf LUI
J’ai failli toute détruire.
ELLE
mais quand j’ suis arrivée chez nous, t’ étais là. »

Les choix de Sabica

L’homme de ma vie, Aline Apostolska (Québec Amérique)

EXTRAIT: « Au fond, je vous raconte ces histoires pour les mêmes raisons que vous les lisez. Ma petite histoire n’est qu’une version de la vôtre. Un éclat d’humanité. On en revient toujours au même point. Les hommes. Les femmes. Le Soleil. La Lune. La nuit. Le jour. Les relations entre les hommes et les femmes. Des rondes entre le Soleil et la Lune. Le jour qui court toujours après la nuit. Tant et tant de dérisoires petits tours de piste. Dans l’histoire de chacun, des éclats des histoires d’autrui. En chacun, des échos du tintamarre général. »

Terre du roi Christian, Sylvain Trudel (Typo)

EXTRAIT: « Tout jeune, il avait commencé à s’intéresser aux astres et il avait appris que toutes les étoiles, toutes les planètes et tous les soleils seraient un jour appelés à mourir. Quand il était en voiture et qu’il voyait des mouches s’écraser sur le pare-brise, il pensait à la fin du monde, il pensait à l’agonie des soleils, il pensait aux supernovae, ces étoiles mourantes qui en sont à leur dernier souffle.
Une nuit, il a eu très peur, il n’a pas compris ce qui lui arrivait. Il a senti le monde se refermer sur lui, les membranes du ciel se sont contractées, l’air s’est raréfié, son petit corps a été pris de convulsions, et il est né. »

 

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